Si la Cour suprême des États-Unis confirme la décision de la cour d'appel fédéral, cela pourrait conduire à la "ruine financière" des États-Unis. En juillet, les recettes des droits de douane se sont élevées à 159 milliards de dollars.
C'est un véritable camouflet pour Donald Trump. Vendredi 29 août, une cour fédérale a considéré que le président américain n'avait pas le pouvoir pour instaurer les droits de douane, jugés illégaux. Selon les juges, le chef d'État, qui avait annoncé vouloir taxer plusieurs dizaines de pays, a outrepassé son autorité en vertu d'une loi sur les pouvoirs d'urgence.
Cependant, ces taxes resteront en vigueur jusqu'au mois d'octobre, ce qui laisse le temps à l'administration de faire appel auprès de la Cour suprême.
"Si elle était maintenue, cette décision détruirait littéralement les États-Unis", a réagi Donald Trump sur son réseau Truth Social. Il a également dénoncé une décision "incorrecte" prise par une "cour d'appel hautement politisée".
Quels droits de douane la cour a-t-elle annulés ?
La décision de la cour d'appel porte sur les droits de douane que Donald Trump a imposés à la quasi-totalité des partenaires commerciaux des États-Unis, le 2 avril, ainsi que sur les taxes qu'il avait imposées auparavant à la Chine, au Mexique et au Canada.
Outre des taxes de 10 % à la quasi-totalité des pays pour toute la marchandise qui entrait au États-Unis, le président républicain avait mis en place des droits de douane allant jusqu'à 50 % aux pays avec lesquels les États-Unis accusent un déficit commercial. Dans sa guerre commerciale, il avait ensuite suspendu ces taxes pendant 90 jours afin de donner aux partenaires commerciaux le temps de négocier des accords. Certains d'entre eux, comme Royaume-Uni, le Japon et l'Union européenne, ont réussi à s'entendre avec Washington, mais les accords étaient jugés déséquilibrés.
Ceux qui n'ont pas cédé ont été ciblés plus durement au début du mois. Le Laos a été frappé par des droits de douane de 40 % et l'Algérie par un prélèvement de 30 %. En outre, Donald Trump a également maintenu les droits de douane de base.
Cependant, la décision de la cour d'appel ne couvre pas les autres droits de douane imposés par le président américain, notamment celles sur l'acier étranger, l'aluminium et les automobiles.
Elle ne concerne pas non plus les taxes que Donald Trump a imposés à la Chine au cours de son premier mandat, et que le président Joe Biden a maintenus.
Pourquoi la Cour s'est-elle prononcée contre le président ?
Donald Trump a revendiqué avoir le pouvoir d'agir sans l'approbation du Congrès, a qui il revient normalement le pouvoir de fixer les taxes. Le président avait alors justifié ses décisions par la loi de 1977 sur les pouvoirs économiques d'urgence internationaux (International Emergency Economic Powers Act - IEEPA). Il a assuré que les déficits commerciaux constituaient une "urgence nationale".
Une loi qu'il avait également invoqué en février au moment d'imposer des droits de douane au Canada, au Mexique et à la Chine, mettant alors en avant le flux illégal d'immigrants et de drogues et assurant que les trois pays devaient faire davantage pour l'arrêter.
En mai, le tribunal américain du commerce international de New York, saisi par cinq entreprises ainsi que douze États américains, avait rejeté cet argument, estimant que les droits de douane imposés "dépassent toute autorité accordée au président".
Vendredi, la cour d'appel fédérale a écrit dans sa décision qu'"il semble peu probable que le Congrès ait eu l'intention d'accorder au président un pouvoir illimité d'imposer des droits de douane".
Qu'en est-il du programme commercial de Donald Trump ?
Si Donald Trump a d'ores et déjà annoncé porter cette affaire devant la Cour suprême, que se passerait-il si la décision de la cour d'appel venait à être confirmée ? Le gouvernement a fait savoir qu'il devrait alors rembourser une partie des taxes à l'importation perçues depuis leur entrée en vigueur.
Cela porterait un véritable coup au Trésor américain. Les recettes provenant des droits de douane s'élevaient à 159 milliards de dollars (135,8 milliards d'euros) en juillet, soit plus du double de ce qu'elles étaient à la même période de l'année précédente. Le ministère de la Justice a d'ailleurs prévenu ce mois-ci, dans un document juridique, que l'annulation des droits de douane pourrait entraîner la "ruine financière" des États-Unis.
Cela pourrait également mettre Donald Trump dans une position délicate lorsqu'il tentera d'imposer des droits de douane à l'avenir.
"L'administration pourrait perdre un pilier de sa stratégie de négociation, ce qui pourrait inciter les gouvernements étrangers à résister aux demandes futures, à retarder la mise en œuvre d'engagements antérieurs, voire à chercher à renégocier les conditions", a déclaré Ashley Akers, avocat principal au cabinet Holland & Knight et ancien avocat du ministère de la Justice, avant la décision de la cour d'appel.
Donald Trump dispose cependant d'autres lois pour imposer des taxes à l'importation, mais elles limiteraient la rapidité et la sévérité avec lesquelles il pourrait agir. Par exemple, dans sa décision de mai, le tribunal du commerce a noté que le Républicain conservait le pouvoir d'imposer des droits de douane pour remédier aux déficits commerciaux en vertu d'une autre loi, la loi sur le commerce de 1974. Mais cette dernière limite les droits de douane à 15 % et à 150 jours pour les pays avec lesquels les États-Unis ont d'importants déficits commerciaux.
L'administration pourrait également invoquer des prélèvements en vertu d'une autre autorité légale - l'article 232 de la loi de 1962 sur l'expansion du commerce - comme elle l'a fait avec les droits de douane sur l'acier, l'aluminium et les automobiles étrangers. Mais cela nécessite une enquête du département du commerce et ne peut pas être imposé à la discrétion du président.