Le projet Sw@da x Niczos combine le "chant blanc", la musique électronique, le rap et l'expressivité d'un dialecte unique, qui est encore parlé à la frontière entre la Pologne et le Bélarus. Il s'avère que la fascination pour les racines peut être le chemin vers la piste de danse.
Lorsqu'on évoque le patrimoine musical de la Podlasie, région historique située à la frontière entre la Pologne et le Bélarus, on pense tout de suite au chant blanc, une technique vocale traditionnelle propre à de nombreux peuples slaves.
Mais le duo polonais Sw@da x Niczos a prouvé que le folklore de leurs terres natales peut sonner différemment et séduire les amateurs d'électronique et de rap à Varsovie et dans d'autres grandes villes.
Nika "Niczos" Jurczuk et Wiktor "Swada" Szczygieł ont même atteint la finale de la sélection polonaise de l'Eurovision avec une chanson en dialecte de Podlasie, parlé par les Biélorusses ethniques vivant dans cette zone frontalière.
Cependant, les autorités de Minsk, qui se méfient apparemment des préférences musicales de la diaspora biélorusse, ont même inscrit la page Instagram du musicien Sw@da sur la liste des contenus "extrémistes".
Même si le duo a terminé à la deuxième place et n'ira pas à l'Eurovision, la créativité des musiciens a toutes les chances de gagner de nouveaux fans en Europe.
Une voix qui porte une histoire
Nika et Wictor se tournent vers leurs racines musicales dans leur travail - le chant blanc, que l'on appelle ainsi en raison de la pureté et de la transparence du son. C'est une voix forte, souvent comparée à un cri, proche d'un appel ou d'une plainte, mais un cri mélodique qui raconte les histoires qui se trouvent au plus profond de l'âme.
Pour Nika, c'est une forme d'expression personnelle qui lui permet de garder ses distances tout en s'immergeant dans quelque chose d'authentique, qui remonte à la nuit des temps. "Il y a de la magie en lui. Il est dur, mais en même temps très malléable. On peut l'utiliser pour transmettre des émotions que les mots ne peuvent pas exprimer", souligne la chanteuse.
Dans la région de Podlasie, le chant est si répandu qu'il coule même dans le sang depuis l'enfance. "Quand j'étais encore une très jeune fille, j'apprenais déjà le chant blanc, le chant folklorique. Nous nous sommes rencontrés [Nika et moi - ndlr] dans un groupe folklorique, donc ce type de chant ne m'est pas étranger. Je l'ai toujours beaucoup apprécié. C'est un beau témoignage de la tradition et de la culture", souligne Agata Stepaniuk, artiste de l'ensemble Sw@da x Niczos.
La parole des grands-mères, le rythme de l'avenir
Le projet a également son propre langage. Les artistes ne se contentent pas de chanter en polonais ou en biélorusse. Ils utilisent la micro-langue de Podlasie, le langage que l'on peut encore entendre dans les villages, dans les conversations des grands-mères et des grands-pères.
L'artiste Anna Owerczuk, qui participe au projet entend encore les cris dans les villages "A gde ona", "a skul", "a czyja Ty ", c'est ainsi que l'on parlait et que l'on parle encore dans les villages".
Une basse qui fait bouger tout le monde
Sw@da, en tant que producteur de musique, crée un tissu moderne autour de cet univers sonore avec des rythmes, des synthés et des basses qui font danser. "Il s'avère que les personnes d'un certain âge aiment danser sur la basse, mais aussi celles qui amènent leurs enfants. Ces derniers dansent également", ajoute le producteur.
Une nouvelle vie pour une ancienne voix
Sw@da x Niczos ne reconstruisent pas le folklore, ils s'en inspirent. Ils lui donnent une nouvelle forme : le Podlasie bounce. Il s'agit d'un phénomène de frontière, non seulement culturelle entre la Pologne, le Bélarus et la Lituanie, mais aussi entre tradition et modernité.
Ce projet musical unique montre qu' il est possible de parler avec sa propre voix, son propre langage, qui peut être fort, puissant et extrêmement dansant.