Nos filles ne seront pas excisées

Nos filles ne seront pas excisées
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Par Euronews
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Chaque année dans le monde, trois millions de fillettes sont victimes de mutilations sexuelles. En Afrique, on estime qu’elles touchent une femme sur trois.

Dans de nombreux pays, des lois visent à combattre ces pratiques, mais elles ne suffisent pas pour résoudre cette question mondiale, particulièrement complexe. Le débat prend de l’ampleur en Afrique et en Asie, continents les plus touchés, mais il gagne aussi les pays occidentaux.

La France, comme d’autres nations, interdit ces actes qui font des dizaines de milliers de victimes dans la population immigrée. Au moins 65.000 cas sont recensés. Ces gestes qui incluent l’ablation ou la lésion des organes génitaux externes de la femme ont donné lieu à plus d’une centaine de poursuites judiciaires dans le pays. La loi française les réprime y compris quand une fillette résidant en France a été excisée à l‘étranger.

A Paris, nous rencontrons une auteure qui en a fait son combat depuis longtemps. Aujourd’hui installée à Bruxelles, Khady Koita, mère de quatre enfants, nous raconte ce qu’elle a enduré à l‘âge de sept ans au Sénégal. C’est d’ailleurs ce qu’elle a écrit dans son livre titré “Mutilée” : “deux femmes m’ont attrapée et traînée dans la pièce ; l’une me tient la tête et ses genoux écrasent mes épaules de tout leur poids pour que je ne bouge pas ; les hurlements que j’ai poussés me résonnent encore aux oreilles, j’ai pleuré et crié,” témoigne-t-elle.

“Cette violence faite à mon corps d’enfant, je ne la comprenais pas,” se souvient la mère de famille, “personne ne m’en avait avertie… De quoi me punissait-on?”

“La conséquence psychologique est très, très importante parce qu’elle dure toute la vie,” ajoute-t-elle avant de conclure : “il y a des périodes où cela nous mène à la dépression.”

Il est bien difficile pour les autorités occidentales de mesurer l’importance du phénomène dans leurs pays. En France, les médecins et certains intervenants auprès des enfants sont obligés de signaler tout cas avéré ou présumé. Le secret professionnel éventuel est alors levé.

Parmi les militants de cette cause, un homme – ils sont rares – : un chanteur originaire du Mali. Il a dû quitter son pays après avoir subi des menaces pour une chanson qu’il avait écrite : “Exciser, c’est pas bon” dans laquelle il dénonçait les mutilations génitales. Bafing Kul espère toucher les jeunes par sa musique, mais aussi inciter les hommes à se mobiliser. “Dans la société patriarcale, c’est l’homme, le chef de famille,” reconnaît-il, “donc il est très important que les hommes s’engagent pour que les choses changent car ce combat ne sera gagné au Mali et ailleurs que si les hommes s’engagent,” lance-t-il avant de poursuivre : “le combat de l’excision n’est pas qu’un problème de femmes, c’est un problème de droits humains.”

Bafing Kul a réalisé un documentaire au Mali sur l’excision. Les diverses opinions qu’il a recueillies dans la rue légitiment pour la plupart, ces pratiques pour des raisons sociologiques, religieuses ou coutumières. Si certains estiment qu’elles permettent de rendre les femmes plus fidèles, d’autres assurent que ces dernières “auraient trop de plaisir” si on ne les y soumettait pas.

Ceux qui dénoncent ces mutilations assurent de leur côté qu’aucune religion n’exige qu’une fillette soit excisée. Ils estiment qu’il s’agit d’un acte criminel et non d’une tradition culturelle. Selon eux, il faut associer campagnes de prévention et lois plus sévères. “Vous pouvez répéter pendant 30 ans aux familles : “ne le faites pas”. Si elles n’ont pas la crainte d‘être sanctionnées par la justice, elles feront ce qu’elles voudront,” estime Linda Weil-Curiel avocate à la CAMS (Commission pour l’abolition des mutilations sexuelles) avant d’ajouter : “mais je sais que la peur du procès et de la prison amène beaucoup de familles à être très prudentes et à protéger leurs enfants.”

Autre dimension évoquée par Isabelle Gillette-Faye, directrice du Groupe pour l’abolition des mutilations sexuelles (GAMS) : “l‘éducation joue un rôle fondamental : dans les pays du continent africain, à partir du moment où le niveau d‘études des personnes augmente – et même le niveau primaire, le simple fait de savoir lire et écrire -,” souligne-t-elle, “on observe une diminution de la reproduction de la pratique des mères en direction des filles.”

L’ONU a adopté récemment, pour la première fois, une résolution condamnant ces mutilations, pressant les responsables politiques du monde entier à lutter davantage contre ce fléau.

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