La guerre des drones

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Par Euronews
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Ce sont les armes qui posent le plus de questions en ce 21ème siècle, les drones, un moyen important pour lutter contre un adversaire sans aucun

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Ce sont les armes qui posent le plus de questions en ce 21ème siècle, les drones, un moyen important pour lutter contre un adversaire sans aucun risque pour les pilotes. Mais quels sont les risques ?

Les drones ont réussi à tuer les responsables d’attaques contre des civils, en Europe et aux Etats-Unis. Mais les drones peuvent être aussi une arme à double-tranchant, qui tuent des passants ou des civils innocents. On les juge comme un outil d’exécutions sommaires, contraires au droit international. On dit aussi que les drones sont moins efficaces que les armes conventionnelles. D’autres pays utilisent des avions, ou des soldats au sol, pour une plus grande efficacité.

Pour “the Network”, depuis le Parlement européen à Bruxelles, nous accueillons : – Alain De Neve, chercheur belge à l’Institut royal supérieur de défense, – Andrew Stroehlein, porte-parole de Human Rights Watch, et – Roland Freudenstein, directeur de la recherche au Centre d‘études européennes Wilfried Martens.

Chris Burns:
“Bienvenue à vous tous, je voudrais commencer par une question pour Alain – quelle est l’efficacité des drones dans la lutte contre les groupes extrémistes, et sommes-nous plus en sécurité grâce à eux?”

Alain De Neve:
“Nous ne savons pas s’ils sont efficaces, nous ne connaissons pas les résultats de cette stratégie des Etats-Unis et d’autres pays qui utilisent des drones.”

Chris Burns:
“Vous êtes un analyste militaire pour le gouvernement belge, n’est-ce pas?”

Alain De Neve:
“Oui”

Chris Burns:
“Andrew, pour Human Rights Watch, comment voyez-vous cela? “

Andrew Stroehlein:
“Les règles de la guerre sont très claires, il faut distinguer les combattants et les civils. Dans de nombreux cas, des drones ont pu le faire , mais dans d’autres cas, ils ne pouvaient pas les distinguer. Vous avez posé la question : sommes-nous plus en sécurité? Eh bien cela dépend de qui vous voulez parler ? Si vous parlez d’une famille qui vit au Yémen, détruite par une frappe de drone, alors “nous” ne sommes pas en sécurité.

Chris Burns:
“ Roland, sommes-nous plus en sécurité? Quelle est l’efficacité des drones ? “

Roland Freudenstein:
“Tout d’abord, tout ce que vous pouvez dire contre les drones, vous pouvez le dire à propos de toutes les armes modernes. Maintenant, la question est de savoir si les drones nous ont permis de diminuer le danger d’Al-Qaïda ? Les drones ont-ils été efficaces pour éviter le regroupement et le travail des membres d’Al-Qaida et la préparation d’attentats terroristes majeurs dans les pays occidentaux ? Oui, les drones ont été efficaces.”
“First of all, anything you can say against drones, you can say about any modern weapon system. Now the question is have drones been effective in keeping Al Qaida on the run? Have they been effective in keeping Al Qaida from re-grouping and planning and executing large terrorist attacks in western countries? Yes they have.”

Chris Burns:
“Si on poursuit cet argument, les drones ne sont-ils pas plus précis qu’une bombe ou un missile de croisière ? Peut-être les drones font-ils moins de dommages collatéraux, et moins de victimes civiles ? Qu’en pensez-vous Alain ?”

Alain De Neve:
“Ce n’est pas une arme parfaite. Il peut y avoir des erreurs de ciblage. C’est moins facile de faire la distinction entre civils et militaires. Il y a toujours un risque de confusion.

Chris Burns:
“Donc, Andrew, pensez-vous que les drones peuvent être plus précis, ou non ? “

Andrew Stroehlein:
“Le problème ce sont les bases légales et juridiques des drones, qui ne sont pas rendues publiques. Par exemple en août dernier, le Royaume-Uni a lancé une attaque de drones en Syrie. David Cameron a déclaré s‘être basé sur un avis juridique, mais il a dit qu’il ne le rendrait pas public. Et qu’il garderait secret les éléments de preuve qui ont servi de base pour cette attaque en Syrie. Donc il est lui-même juge, jury et bourreau.”

Chris Burns:
“N’y a t-il pas des exécutions extra-judiciaires ? Ou est-ce justifié parce qu’ils ont pris part à des attaques terroristes, comme ces gens qui ont été tués ? Alain ? “

Alain De Neve:
“Les attaques de drones ont été réalisées dans un environnement très permissif récemment. “

Chris Burns:
“ Donc, vous pensez qu’ils devraient être plus réglementés ? “

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04.12 Alain De Neve:
“ Ils devraient être plus réglementés que maintenant.”
“It should be more regulated than now.”

Chris Burns:
“Sont-ils hors de contrôle?”

Roland Freudenstein:
“Non. Pour prendre l’exemple américain, il y a déjà une procédure élaborée par le Département américain de la Justice pour autoriser les frappes de drones. Cela passe par plusieurs étapes. La décision est prise par des civils, et des juges. Et c’est le seul moyen.”

Chris Burns:
“Certaines personnes affirment qu‘à la place de l’utilisation de ces méthodes aseptisées de la guerre, on devrait plutôt aller sur le terrain. Nous devrions envoyer des troupes pour être plus efficaces. Qu’en pensez-vous Alain ? “

Alain De Neve:
“Des frappes de drones ne vous empêchent pas d’avoir des troupes sur le terrain. Parfois, pour bien cibler, vous devez avoir déjà des troupes sur le terrain.”

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Chris Burns:
“C’est une aide pour les drones ?”

Alain De Neve: :
“Oui.”

Chris Burns:
“Comment voyez-vous cela Andrew ? Certaines personnes disent que l’on devrait plutôt aller sur le terrain, et que l’on ne devrait pas utiliser ce type d’armes automatiques.”

Andrew Stroehlein:
“Du point de vue des droits de l’homme, et en vertu du droit international, ce n’est pas vraiment la question. La question n’est pas le type d’ arme que vous utilisez, c’est comment vous l’utilisez et si vous faites la distinction entre des cibles légitimes, à savoir des combattants ennemis, et des civils. C’est une distinction claire qui doit être faite, peu importe l’arme, peu importe si vous avez des troupes sur le terrain ou non.”

Chris Burns:
“Qu’en est-il d’essayer de gagner les cœurs et les esprits sur le terrain ? Nous perdons le soutien des populations visées. Les gens sont en colère à propos de leurs proches, de leurs familles tuées par des drones.”

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Roland Freudenstein:
“Oui, mais la population serait encore plus en colère avec des troupes au sol. Le droit international a été créé à une époque où ce genre de terrorisme n’existait pas. Je pense que nous devons travailler sur la modification des lois internationales, incorporant les drones dans une politique internationale de lutte contre le terrorisme.”

Chris Burns:
“Faut-il un traité international ? Peut-être même une modification de la Convention de Genève ?”

Andrew Stroehlein:
“Je pense qu’il y a une pente très dangereuse si on l’emprunte. Le droit international nous a bien servi dans de nombreux cas. Il crée des règles claires que tout le monde comprend. Nous regardons cela avec un point de vue très occidental. Que faire si la Russie envoie un drone sur Varsovie, ou sur Londres ? Si un drone russe survole survole Londres pour tuer quelqu’un, qu’ils disent que c’est un ennemi, que dirions-nous ? Nous serions scandalisés . L’Occident serait à juste titre outré, et c’est ce qu’il se passe très souvent.”

Chris Burns:
“Que se passerait-il si on arrêtait ? C’est ce que souhaitent certaines personnes. Quel serait le danger ? Faut-il arrêter ? Je sais ce que vous allez dire , Roland , mais quels dangers voyez-vous si on arrête?”

Roland Freudenstein:
“Nous envoyons très loin des hommes et des femmes se battre pour nous. Ces soldats risquent d’avoir une jambe arrachée, traumatisés à vie , ou ils risquent de perdre la vie. Je pense que l’on doit fournir le meilleur équipement possible. Voilà l’urgence, et voilà pourquoi je ne pense pas que l’on va, ou que l’on devrait, arrêter d’utiliser des drones. “

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Chris Burns:
“Quels dangers voyez-vous, Andrew ? Pensez-vous qu’il serait possible d’arrêter tout cela? “

Andrew Stroehlein:
“Mon argument n’est pas de dire qu’il faut arrêter les drones. Ce ne serait pas réaliste. Mais nous avons un problème avec la transparence, nous ne comprenons pas et nous ne pouvons pas connaître les avis juridiques ou les preuves qui ne sont pas rendus publics. Nous sommes dans la situation où nous devons faire confiance au président, nous devons faire confiance au Premier ministre qui sont juge, jury et bourreau à la fois. Et je ne suis pas à l’aise avec cette situation.”

Roland Freudenstein:
“ Vous savez, parler des procédures juridiques ou de transparence c’est très bien, mais quand on réfléchit au côté opérationnel des drones, sur la façon dont on les utilise, il y a aussi un besoin évident de secret. Donc, nous devons tracer une ligne précise entre ces deux choses. Et je pense que nous sommes sur le point de le faire.”

Andrew Stroehlein:
Je reviens sur mon exemple de Londres. Imaginez le président Poutine nous dire : ayez confiance en moi, nous avons des preuves, et j’ai pris des conseils juridiques pour ma frappe de drone, mais je ne vais pas vous montrer mes preuves. Voulez-vous faire confiance au président Poutine sur ce sujet?

Chris Burns:
“Désolé, mais nous n’avons plus de temps. Je vous remercie beaucoup. Je voudrais bien continuer le débat… Je tiens à remercier nos invités, Roland Freudenstein, Andrew Stroehlein et Alain De Neve. Je suis Chris Burns, et merci d’avoir suivi The Network.”

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