L'ex-agent de la DGSE abattu roulait-il pour le président Sassou-Nguesso ?

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Par Maxime Biosse Duplan
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L'homme tué par balles en Haute-Savoie est un ancien agent de la DGSE française. Daniel Forestier avait avoué en septembre dernier faire partie d'un commando dont la mission était d'éliminer Ferdinand Mbaou, opposant au président congolais Denis Sassou-Nguesso.

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L'homme tué par balles en Haute-Savoie est un ancien agent de la DGSE française. Daniel Forestier a été assassiné de cinq balles au thorax et à la tête la semaine dernière - un travail de "professionnels" selon la police - à Ballaison. Il aurait travaillé pour les services de renseignements extérieurs pendant 14 ans, au sein d'une unité militaire chargée des opérations clandestines.

Mais surtout, Daniel Forestier avait avoué en septembre dernier faire partie d'un commando dont la mission était d'éliminer Ferdinand Mbaou, opposant au président congolais Denis Sassou-Nguesso. Une information judiciaire avait alors été ouverte. La mort de l'ancien agent secret, aujourd'hui, est un "règlement de compte" selon le procureur de la République de Thonon.

Retour sur les éléments clés de cette affaire.

1. Qui était Daniel Forestier ?

A 58 ans, cet homme a affirmé être militaire de carrière et avoir travaillé quatorze années au service "action" de la DGSE. Les 31 août et 1er septembre dernier, lors d'un "entretien" au commissariat d'Annemasse, il aurait déclaré être à la tête d'un groupe constitué pour tuer l’opposant congolais Ferdinand Mbaou, résidant en France, dans le Val d'Oise. Avec un autre ex-agent de la DGSE, Bruno Susini, il est mis en examen le 12 septembre pour « participation à une association de malfaiteurs » et « détention d’explosif ».

Jusqu'à son assassinat, Daniel Forestier vivait, selon France Bleu Pays de Savoie, à Lucinges en Haute-Savoie avec sa femme et ses enfants depuis une vingtaine d’années. Connu de tous, bien intégré, il avait écrit selon le maire des romans d'espionnage. Il avait démissionné l'année dernière de son poste de conseiller municipal.

2. Ferdinand Mbaou, l'homme à abattre

Ferdinand Mbaou, 62 ans, est un opposant congolais pour qui le président Sassou-Nguesso est "arrivé au pouvoir par les armes, se maintient au pouvoir par les armes, et ne peut être renversé que par les armes". Ancien général, chef de la garde présidentielle de Pascal Lissouba, chef d'Etat démocratiquement élu en 1992 et renversé par le coup d'Etat de Denis Sassou-Nguesso en 97, Ferdinand Mbaou est réfugié en France.

En novembre 2015 déjà, il a été victime d'une tentative d'assassinat. Un homme lui a tiré dans le dos alors qu'il marchait en direction de la gare de Bessancourt, où il habite. Le tueur s'enfuit. Pour le réfugié congolais, aucun doute, le président de son pays a commandité son meurtre. Ferdinand Mbaou demande une protection policière qui lui est refusée. L'enquête n'avance pas mais pire, c'est lui qui est mis à l'index : en janvier 2017, un arrêté des ministres français de l'Economie et de l'Intérieur l'accuse d'être un "putschiste" qui "incite, facilite et participe à la commission d'acte de terrorisme".

C'est en lisant la presse en septembre dernier, après la mise en examen de Daniel Forestier et Bruno Susini, que Ferdinand Mbaou a appris l'existence de ce nouveau complot pour l'assassiner.

3. Dans l'ombre, le régime du Congo-Brazzaville... Et la "Françafrique"

Denis Sassou-Nguesso a été président de la République du Congo de 1979 à 1992, puis à nouveau depuis 1997, quand il a renversé le président élu Pascal Lissouba. En 2015, il a fait modifier la constitution du pays. En mars 2016, il a été réélu président au premier d'une élection fortement contestée par l'opposition.

Le Canard Enchaîné, septembre 2006

De nombreuses affaires troubles d'ingérence française émaillent l'histoire du Congo-Brazzaville, riche en pétrole, depuis les années 80. Transport d'armes pour le régime via des bateaux appartenant à Elf (futur Total), amitié franche entre Jacques Chirac et Sassou-Nguesso, soupçons de détournement de fonds publics via des banques françaises... les dossiers sont nombreux et les spécialistes de la "Françafrique" savent que le Congo est depuis les années 70 l'un des meilleurs exemples de cette collaboration économique et politique - pour le meilleur et pour le pire.

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