Une vidéo circulant sur les réseaux sociaux a soulevé des questions sur le fonctionnement du Parlement européen et sur le temps de parole alloué aux eurodéputés lorsqu'ils interviennent.
La diffusion en ligne d'une vidéo montrant un eurodéputé polonais d'extrême droite interrompu en plein discours a suscité de vives critiques d'internautes, qui ont dénoncé un non-respect présumé de la démocratie au Parlement européen.
La vidéo en question montre Grzegorz Braun répondant à un discours de l'eurodéputée socialiste belge Kathleen Van Brempt sur le soutien de l'UE à l'Ukraine.
"Vous n'aidez pas l'Ukraine en prolongeant cette guerre", déclare-t-il au Parlement européen. "Vous n'aidez pas les Ukrainiens qui cherchent un abri, qui fuient leur propre pays et...".
Son micro est alors coupé par Esteban González Pons, vice-président du Parlement européen, qui redonne la parole à Kathleen Van Brempt.
Cette dernière répond que l'intervention de Grzegorz Braun "n'était pas vraiment une question" et déclare que le Parlement a été uni depuis le début de la "guerre illégale de la Russie contre l'Ukraine" en apportant une aide militaire, financière et infrastructurelle aux Ukrainiens.
"Ils ont clairement indiqué qu'ils voulaient faire partie d'une Europe libre et non d'une fédération russe où la démocratie et la liberté d'expression n'existeraient pas", affirme Kathleen Van Brempt.
Une interruption conforme à la procédure
La vidéo est souvent partagée avec des légendes critiquant le supposé manque de démocratie du Parlement européen et qualifiant Kathleen Van Brempt - qui a évoqué le manque de liberté d'expression en Russie dans son discours - "d'hypocrite".
En réalité, Esteban González Pons a simplement agi conformément à la procédure parlementaire habituelle en interrompant Grzegorz Braun.
Le Cube a contacté les services de presse du Parlement européen pour obtenir des éclaircissements, qui nous ont renvoyés à l'article 178 du règlement intérieur.
Il stipule que le président peut donner la parole aux députés qui indiquent - en levant un carton bleu ou en utilisant le système électronique - qu'ils souhaitent poser une question à un autre député pendant qu'ils parlent.
Limite du temps de parole
La règle précise que la question ne peut durer plus de 30 secondes et qu'elle doit être en rapport avec l'intervention à laquelle elle se rapporte.
"Le Président ne peut le faire que si l'orateur accepte la question et s'il est convaincu que cela n'entraînera ni une perturbation du débat, ni un déséquilibre flagrant dans les affinités des groupes politiques des députés s'exprimant dans ce débat", stipule le règlement.
Enfin, le président ou le vice-président qui préside une séance plénière du Parlement peut couper le micro d'un eurodéputé s'il estime qu'il a parlé trop longtemps.
Dans la vidéo jointe aux messages en ligne, on peut voir que l'intervention de Grzegorz Braun dure près de 40 secondes, soit plus que la limite autorisée.
Des interventions très encadrées
La transcription du débat complet est disponible ici.
Le règlement intérieur du Parlement contient également d'autres règles liées au système des cartons bleus. Par exemple, une seule question "carton bleu" par intervention est généralement autorisée, et il doit s'agir d'une question et non d'une déclaration.
Le président du Parlement peut également refuser des questions de carton bleu pour respecter le temps imparti, et le député qui pose la question et l'orateur ne peuvent pas appartenir au même groupe politique.
"Le président peut autoriser le député qui a posé la question à réagir à la réponse de l'orateur pendant une demi-minute au maximum", précise le règlement. "L'orateur peut ensuite donner suite à cette réaction".