Depuis 1988, le Parlement européen décerne chaque année le prix Sakharov à des personnes, des groupes ou des organisations en reconnaissance de leur action en faveur de la défense des droits de l'Homme, de la liberté d'expression et des valeurs démocratiques
Deux journalistes emprisonnés, le Bélarusse Andrzej Poczobut et la Géorgienne Mzia Amaglobeli, sont les lauréats du prix Sakharov 2025 pour la liberté de pensée, décerné mercredi par le Parlement européen à Strasbourg.
"Les deux sont des journalistes actuellement en prison sur la base d'accusations inventées de toutes pièces, simplement pour avoir fait leur travail et dénoncé l'injustice", a déclaré la présidente du Parlement européen, Roberta Metsola.
"Leur courage en a fait des symboles de la lutte pour la liberté et la démocratie", estime-t-elle, en ajoutant que le Parlement européen "se tient à leurs côtés et à ceux de tous ceux qui continuent à réclamer la liberté".
"Le journalisme n'est pas un crime"
Andrzej Poczobut, qui a été nominé par le groupe PPE, est un journaliste issu de la minorité polonaise au Bélarus, connu pour ses critiques à l'égard du régime d'Alexandre Loukachenko. Détenu depuis 2021, il a été condamné à huit ans de prison dans une colonie pénitentiaire.
"Andrzej Poczobut n'est pas seulement un journaliste, il est un symbole de vérité et de courage. Un homme qui a refusé de céder à la peur, qui est resté fidèle à ses valeurs même derrière les barreaux", a déclaré à Euronews Svetlana Tikhanovskaïa, leader de l'opposition bélarusse dont le mari, Sergueï Tikhanovski, a été gracié et libéré de prison en juin dernier après cinq ans d'emprisonnement.
"Pendant des années, le régime d'Alexandre Loukachenko a tenté de le réduire au silence, mais la voix d'Andrzej n'en est devenue que plus forte, car elle parle au nom de tous les Bélarusses qui croient en la liberté et la dignité. Il est notre héros, notre exemple, et nous rappelle que le journalisme n'est pas un crime".
Svetlana Tikhanovskaïa estime que "cette décision du Parlement européen envoie un message fort : aux dictateurs, que la vérité ne peut être emprisonnée, et aux prisonniers politiques, qu'ils ne sont pas oubliés", ajoutant que "chaque mot de solidarité franchit les murs des prisons biélorusses et donne de la force à ceux qui continuent de se battre".
"La lumière trouve toujours son chemin"
Journaliste géorgienne et fondatrice des médias en ligne Batumelebi et Netgazeti, Mzia Amaglobeli a quant à elle été arrêtée en janvier 2025 pour avoir participé à des manifestations antigouvernementales en Géorgie et condamnée à deux ans de prison pour des motifs politiques. Selon l'enquête, la journaliste aurait giflé Irakli Dgebuadze, chef de la police de Batoumi.
Elle est la première femme prisonnière politique de Géorgie depuis l'indépendance du pays.
Âgée de 50 ans, Mzia Amaglobeli est spécialisée dans les enquêtes sur le gaspillage d'argent public et les abus de pouvoir. Elle a observé une grève de la faim pendant une quarantaine de jours après son incarcération, avant de l'interrompre pour des raisons de santé.
"Ensemble, Andrzej et Mzia incarnent ce que représente le prix Sakharov : le courage, la conscience et la conviction inébranlable que même dans l'obscurité, la lumière trouve toujours son chemin", a déclaré Svetlana Tikhanovskaïa à Euronews.
Liberté de pensée
Les autres finalistes étaient les journalistes et les travailleurs humanitaires en Palestine et dans toutes les zones de conflit, nommés par le groupe des Socialistes et Démocrates et de La Gauche, ainsi que les étudiants serbes qui ont lancé des manifestations nationales après le drame de la gare ferroviaire de Novi Sad le 1er novembre 2024, nommés par le groupe Renew Europe.
La Marche des fiertés de Budapest, nommée par les Verts/ALE, l'écrivain franco-algérien Boualem Sansa, mis en avant par les Patriotes pour l'Europe (PfE), et le défunt activiste conservateur américain Charlie Kirk, nommé par l'Europe des nations souveraines (ESN), n'ont pas été retenus.
La cérémonie de remise des prix aura lieu à Strasbourg le 16 décembre, mais les deux lauréats ne pourront y assister que s'ils sont libérés l'ici là.
Depuis 1988, le Parlement européen décerne chaque année le prix Sakharov, accompagné d'une récompense de 50 000 €, à des personnes, des groupes ou des organisations en reconnaissance de leur action en faveur de la défense des droits de l'Homme, de la liberté d'expression et des valeurs démocratiques.
Le prix Sakharov 2024 avait été décerné à des leaders de l'opposition vénézuélienne, dont la lauréate du prix Nobel de la paix 2025, Maria Corina Machado.