Coronavirus : à HawaÏ, soignants, locaux et touristes confinés font face au Covid-19

Un surfeur passe sous la ligne de signalisation à Waikiki, le vendredi 20 mars 2020, à Honolulu.
Un surfeur passe sous la ligne de signalisation à Waikiki, le vendredi 20 mars 2020, à Honolulu. Tous droits réservés  (AP Photo/Marco Garcia)
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Par Thomas Seymat avec AP
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Isolé au milieu de l'Océan pacifique, l'archipel d'Hawaï doit lui aussi faire face à la pandémie de coronavirus.

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L'archipel d'Hawaï a beau pratiquer une distanciation sociale géographique, situé en plein milieu de l'Océan Pacifique, il n'en est pas moins affecté par la pandémie de Covid-19. Au 25 mars, 95 cas de personnes testées positives au nouveau coronavirus y étaient recensés. Selon la presse locale, il y a eu 4 658 tests Covid-19 réalisés, tous sauf 379 par des laboratoires privés. Un décès initialement attribué au coronavirus a été testé post-mortem et s'est révélé négatif.

Hawaï pourrait voir 40 000 à 45 000 cas d'ici la fin avril si des mesures drastiques ne sont pas prises, a déclaré Kirk Caldwell, le maire d'Honolulu. Avec moins de 300 unités de soins intensifs dans l'État, les projections indiquent qu'Hawaï pourrait dépasser sa capacité de lits de soins intensifs d'ici le 25 avril. C'est pour ralentir les infections et "aplatir la courbe" que le gouverneur David Ige a proclamé un confinement valable pour toutes les îles, et ce, jusqu'au 30 avril.

Mais à Hawaï, dont l'économie dépend en grande partie du tourisme, officiels, locaux et soignants s'attendent à devoir faire face aux conséquences de l'épidémie pendant plusieurs mois.

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Traduction : Protégez nos anciens, distanciation sociale !

Emily est enseignante sur l'île d'Oahu, où se trouve Honolulu. Elle raconte un quotidien qui a "changé radicalement du jour au lendemain. La majorité des habitants prennent au sérieux l'ordre de rester chez eux afin de se protéger, de protéger nos populations vulnérables et nos kupuna," mot hawaiien pour désigner les aînés.

La majorité des habitants prennent au sérieux l'ordre de rester chez eux afin de se protéger, de protéger nos populations vulnérables et nos kupuna (nos aînés)

La solidarité entre habitants fonctionne bien, selon elle : "Les gens prennent des nouvelles de leurs voisins et leurs amis, et offrent leur aide en cas de besoin. L'un des premiers groupes qui a été créé dans ma zone était composé de bénévoles qui préparent des colis de secours pour les voisins âgés".

Tensions entre locaux et touristes

Interrogé par Euronews en début de semaine, Emily pointe du doigt le comportement de certains touristes, moins impliqués que les locaux dans le respect des consignes. "Malheureusement, je ne pense pas que l'on puisse en dire autant de la plupart des touristes". Malgré l'ordre de confinement, "les quelques fois où j'ai dû sortir pour faire des courses ou voir ma famille, la majorité des gens que j'ai vus étaient des touristes".

"Même si de nombreux magasins et restaurants étaient fermés, les plages et les piscines des hôtels étaient toujours bondées, contre l'avis du gouvernement," explique l'enseignante. "Beaucoup ont publié sur les médias sociaux des informations sur les vols bon marché qu'ils ont pris pour venir ici. C'est frustrant pour ceux d'entre nous qui ont des familles qui essaient simplement de rester en sécurité".

Entre temps, le gouverneur de l'Etat d'Hawaï, David Ige, a annoncé une quarantaine obligatoire de 14 jours pour tous les voyageurs, touristes ou locaux, entrants dans l'Etat qui a pris effet le jeudi 26 mars. Il s'agit d'une mesure supplémentaire, suite à ses déclarations du 17 mars où il enjoignait les visiteurs à reporter leurs vacances à Hawaï pendant au moins 30 jours.

Sur Instagram, le hashtag #HawaiiisClosed est utilisé par les locaux pour inciter les potentiels touristes à rester chez eux, à annuler leurs vacances ou pour manifester leur mécontentement contre le non-respect des consignes. Selon l'agence AP, Honolulu a fermé tous les parcs publics et les zones de loisirs vendredi 20 mars jusqu'à la fin du mois d'avril afin de contribuer à stopper la propagation du coronavirus. Des rubans de sécurité jaunes ont été mis en place à Waikiki pour dissuader l'accès de la plage et la police a informé les baigneurs de quitter la zone. Mais de nombreux baigneurs sont simplement passé sous les rubans pour accéder à la plage et au littoral.

Les habitants d'Hawaï, eux, sont priés de reporter leurs voyages non essentiels, y compris les voyages vers les îles voisines, pendant au moins 30 jours.

"Le ministère de la santé nous dit que la grande majorité de ces cas proviennent d'habitants qui ont voyagé dans des zones plus touchés et sont ensuite rentrés chez eux" explique un médecin d'Honolulu contacté par Euronews et qui souhaite rester anonyme. Ce pédiatre exerçant à l'hôpital ausculte tous les enfants admis dans l'établissement, "sauf ceux dont l'état nécessite des soins intensifs ou venant pour un traitement oncologique".
Il est donc amené à voir aussi des enfants souffrant d'une éventuelle infection par Covid-19. "J'ai personnellement pris en charge plusieurs patients qui ont été testés pour le Covid-19, mais aucun n'est encore revenu positif".

Nouvelle possibilité de test du coronavirus sur l'île

La distance avec le 'mainland', les Etats-Unis continental où le bilan a dépassé les 1 000 morts, n'a pas protégé l'archipel et, à Hawaï, l'éloignement risque d'aggraver la pénurie de matériel. "Nous sommes confrontés aux mêmes problèmes que d'autres établissements dans le monde : à savoir la pénurie d'équipements de protection individuelle (EPI) et plus particulièrement de masques respiratoires N95" détaille le médecin.

Seule bonne nouvelle de ces derniers jours, "ce n'est que récemment que nous avons la possibilité d'effectuer des tests Covid-19 dans notre hôpital. Auparavant, tous les tests devaient être effectués par le ministère de la santé ou un laboratoire privé sur le continent".

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Un professionnel de la santé parle à une personne voulant se faire tester pour le Covid-19 à une clinique médicale d'Urgent Care Hawaï, le 13 mars 2019, à Pearl City, HawaïAP Photo/Marco Garcia

Cette procédure impliquait un délai d'exécution d'environ une semaine. "Nous avons donc la chance de disposer maintenant d'une capacité de test élargie en prévision de l'afflux de patients dans les semaines à venir," explique le pédiatre. "La situation évolue très rapidement, ce qui constitue un défi. Nous apprenons chaque jour de nouvelles choses sur cette maladie".

Pour Mel, une infirmière dans une clinique ambulatoire d'Honolulu, les soignants à Hawaï font face, malgré des ressources limitées. "Je pense que nous faisons face à ce défi du mieux que nous pouvons mais un leadership fort et une communication claire sont essentiels".

Si elle ne s'occupe pas de patients positifs au coronavirus, elle soigne des patients diabétiques, une pathologie qui accroit les risques liés au Covid-19. Elle suit donc la situation de près : "Notre hôpital nous informe quotidiennement des changements qu'il apporte pour protéger le personnel et servir les patients. Je pense que les défis auxquels les hôpitaux d'Hawaï sont confrontés sont les mêmes que dans le reste du pays : des ressources limitées, notamment au niveau des équipements de protection individuel".

Et, lorsqu'elle parle à ses collègues soignants, "ils sont épuisés et anxieux face à la situation actuelle, mais ils continuent à bien faire leur travail car ils sont dévoués au service de la communauté".

Télétravail en place

Comme ailleurs dans le monde, le télétravail est désormais de mise à Hawaï, sauf pour les travailleurs essentiels, et ce malgré les difficultés. Mel, l'infirmière d'Honolulu, se considère comme ayant de la chance : "Je fais des visites téléphoniques avec mes patients".

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Mais c'est plus compliqué pour d'autres. "Mon travail a été grandement affecté. En tant qu'enseignante ici à Hawaï, je ne pense pas que nous étions prêts à passer aussi rapidement au numérique," explique Emily. "C'est une situation qui a pris tout le monde par surprise".

"En ce moment, je pense que la majorité des enseignants se concentrent non seulement sur leur programme, mais aussi sur le maintien d'un lien avec leurs élèves" poursuit-elle. "Je sais que de nombreux élèves et leur famille cherchent à retrouver une vie normale en ces temps très incertains. J'espère qu'en tant qu'enseignants, nous pouvons contribuer à y parvenir d'une manière ou d'une autre".

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