Immigration, relations avec l'UE, terrorisme : entretien avec le président tunisien Kaïs Saïed

Kaïs Saïed
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Par Aissa BOUKANOUN
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Euronews s'est entretenue avec le président tunisien à l'occasion de sa venue à Bruxelles pour rencontrer les leaders européens.

Dans ce nouveau numéro de The Global conversation. euronews s'est entretenue avecle président tunisien Kaïs Saied. Alors que l'Union européenne a récemment intensifié les négociations avec la Tunisie pour redynamiser un partenariat global en matière de migration, en échange d'un soutien de l'UE à la Tunisie pour assurer le succès de sa transition démocratique, Kaïs Saïed était à Bruxelles pour s'entretenir avec les dirigeants européens. Entretien.

FRANCISCO SECO/AFP or Licensors
Kaïs SaïedFRANCISCO SECO/AFP or Licensors
"Il n'y aura pas de sécurité et de paix en Tunisie si nous ne traitons pas les causes qui ont conduit à cette immigration illégale"
Kaïs Saïed
Président tunisien

Aissa Boukanoun, Euronews : Vous êtes ici à Bruxelles pour une visite de travail. Plusieurs sujets de première importance sont sur la table des discussions avec les responsables européens, comme la question migratoire. Quelle stratégie de coopération votre pays envisage-t-il d'adopter en matière d'échange d'informations sur l'immigration illégale de la Tunisie vers l'Europe ?

Kaïs Saïed, Président tunisien : J'ai parlé de ce sujet de l'immigration illégale ou légale à plusieurs reprises. Beaucoup de personnes parlent de solution en se basant sur la question de la sécurité, mais il est clair que cette optique n'est pas suffisante pour freiner la vague migratoire. Si ces migrants illégaux atteignaient leurs objectifs, en vivant bien, en réalisant leur rêve, en obtenant les mêmes opportunités que les citoyens en Europe obtiennent dans leurs pays, la question de l'immigration ne se poserait pas. Beaucoup de migrants illégaux qui atteignent l'Europe à partir de la Tunisie et de l'Afrique du Nord, sont exploités par des organisations criminelles : ils sont forcés de travailler illégalement, les droits des réfugiés sont bafoués. Nous devons également parler de la migration légale des universitaires et autres travailleurs hautement qualifiés, par exemple. L'année dernière, près de cinq cents médecins sont partis en Europe.

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"Il faut combattre les réseaux de trafic d'êtres humains en Europe également"
Kaïs Saïed
Président tunisien

Aissa Boukanoun, Euronews : Quelles sont les ressources dont la Tunisie a besoin de la part de l'UE pour combattre les réseaux de trafic d'êtres humains qui sont actifs en Tunisie ?

Kaïs Saïed : Pour lutter contre ces réseaux en Tunisie, mais aussi en Europe, il faut regarder du côté de ceux qui les accueillent. Ces migrants sont forcés de travailler illégalement dans les champs, dans des usines ou sur le marché du travail au noir. Il faut combattre les réseaux de trafic d'êtres humains en Europe également. Il n'y aura pas de sécurité et de paix en Tunisie si nous ne traitons pas les causes qui ont conduit à cette immigration illégale. Certains migrants illégaux ont été obligés de partir, parce qu'ils ont perdu tout espoir, ils n'ont plus de rêves.

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Kaïs Saïed accueilli à Bruxelles par le président du Conseil européen Charles MichelFRANCISCO SECO/AFP

Aissa Boukanoun, Euronews : L'UE et la Tunisie ont établi un partenariat privilégié en 2012. Avec ce plan d'action, la priorité est donnée au développement socio-économique, Dans quelle mesure êtes-vous susceptible d’investir grâce à ce partenariat pour lutter contre le chômage des jeunes en Tunisie ?

Kaïs Saïed : Oui absolument, il y a des accords avec un certain nombre de pays européens et avec l'UE dans le domaine de la création d'emplois pour les jeunes. Je leur ai dit que nous devions mettre en place un nouveau mécanisme pour plus de justice dans le monde.

Aissa Boukanoun, Euronews : Les Européens vous ont-ils écouté lorsque vous leur avez parlé des difficultés que rencontre la Tunisie pour se procurer des doses de vaccins contre le Covid-19 ?

Kaïs Saïed : Oui ils nous écoutent. J’ai parlé ici de solutions opérationnelles. En Tunisie, nous adoptons des plans d'action pour la vaccination, mais ils sont encore insuffisants et inefficaces. Ces derniers jours, nous avons reçu un signal d'alarme de différentes régions tunisiennes qui souffrent d'une pénurie d'oxygène et de matériel médical. Mais nous avons réussi à faire en sorte que la situation soit sous contrôle. Ces situations catastrophiques ne peuvent être traitées qu'avec une approche d’assistance globale, et non uniquement au sein d’un seul pays.

"La Tunisie n'est pas ciblée quotidiennement par le terrorisme. Nous sommes un pays sûr"
Kaïs Saïed
Président tunisien

Aissa Boukanoun, Euronews : Passons maintenant à la lutte contre le terrorisme. Juste après la révolution de 2011, la Tunisie a fait face à une importante recrudescence d’activités et d’attaques djihadistes qui sont actifs près des frontières avec la Libye et l’Algérie. Où en est la Tunisie dans sa lutte contre les groupes djihadistes ?

Kaïs Saïed : La Tunisie n'est pas ciblée quotidiennement par le terrorisme. Nous sommes un pays sûr. Nous devons protéger notre société en utilisant nos valeurs culturelles afin de faire barrage à l’influence des terroristes, qui menacent principalement les personnes vulnérables.

Aissa Boukanoun, Euronews : Cette année, nous avons assisté à la normalisation des relations diplomatiques de certains pays arabes avec Israël. Comment la Tunisie observe-t-elle cette étape ?

Kaïs Saïed : Nous traitons avec les pays en respectant leur liberté de prendre ces décisions et nous ne voulons pas du tout interférer dans leurs choix, ils sont libres, mais nous sommes également libres des nôtres.

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