Les Afghanes ont peur et manifestent : "il faut s'inquiéter pour leurs droits, mais pas d'alarmisme"

Des femmes manifestent pour défendre leurs droits sous le régime Taliban à Kaboul, le 3 septembre 2021
Des femmes manifestent pour défendre leurs droits sous le régime Taliban à Kaboul, le 3 septembre 2021 Tous droits réservés Wali Sabawoon/Copyright 2021 The Associated Press. All rights reserved.
Tous droits réservés Wali Sabawoon/Copyright 2021 The Associated Press. All rights reserved.
Par euronews
Partager cet articleDiscussion
Partager cet articleClose Button
Copier/coller le lien embed de la vidéo de l'article :Copy to clipboardLien copié

Soutenir les droits des Afghanes : à Bruxelles, "pas d'alarmisme", mais sur place, les femmes ont peur et se mobilisent pour leur avenir sous les talibans,

PUBLICITÉ

Au Parlement européen à Bruxelles, un débat s'est focalisé sur les risques du retour au pouvoir des talibans pour l'avenir des Afghanes. La sous-commission européenne aux droits de l'homme dit qu'il faut s'inquiéter, défendre les droits des femmes et des filles.

Andreas von Brandt, ambassadeur et chef de la délégation de l'UE pour l'Afghanistan expliquait aussi qu'il ne fallait pas être alarmiste :

"Je dirais qu'il y a lieu de s'inquiéter. Et je pense que les femmes afghanes et les hommes politiques afghans sont d'accord avec cela. Mais il n'y a probablement pas lieu d'être alarmiste, car tout ce qui se passe est ancré dans la société afghane, et parfois l'alarmisme, lorsqu'il n'y a qu'un seul point de vue, nous empêche d'examiner l'ensemble du problème. Donc, je pense que pousser les talibans à respecter leurs engagements et aider à développer un Afghanistan islamique modéré est ce que nous pouvons encore faire."

"Ce que je voulais dire par 'pas d'alarmisme', c'est qu'il faut traiter un acteur politique non pas en fonction de ce qu'il a dit il y a 25 ans, mais regarder ce qui se passe maintenant. A juste titre, si j'étais une femme en Afghanistan, je partirais probablement immédiatement et j'aurais le même niveau d'angoisse, mais ce qui se passe principalement en ce moment, est basé sur la peur. Tout ce que je voulais dire, c'est qu'il ne faut pas perdre de vue ce qui n'est pas encore arrivé et qu'il ne faut pas toujours revenir en arrière et dire ce qui s'est passé en 1996, 1997 ou 1998 recommencera. Peut-être, et je l'espère, avons-nous une chance d'influencer encore les choses."

Capture d'écran Union européenne via AP
Andreas von Brandt, ambassadeur et chef de la délégation de l'UE pour l'Afghanistan, Bruxelles, 6/09/2021Capture d'écran Union européenne via AP

Pour l'heure, les talibans, qui autrefois interdisaient aux femmes d'étudier, ont annoncé les accepter dans les universités privées sous strictes conditions ( mais ils n'ont rien dit concernant l'enseignement public). Ils entendent obliger les étudiantes à porter une tunique noire et ample (abaya) et un niqab ne laissant voir que les yeux.

... si j'étais une femme en Afghanistan, je partirais probablement immédiatement...
Andreas von Brandt
Ambassadeur et chef de la délégation de l'UE pour l'Afghanistan

 Et ils prônent aussi la séparation des filles et des garçons. Elles doivent étudier hors de la vue des hommes ; dans une classe juste pour elles si elles sont plus de 15, dans une classe où elles sont séparées des hommes si elles sont moins de 15.

Des universités privées ont rouvert à Kaboul ce lundi, mais elles étaient largement désertées :

"La plupart de nos étudiants ne sont pas là" affirme Reza Ramazan, professeur d'informatique à l'université Gharjistan de Kaboul. "On ne sait même pas s'ils sont encore dans le pays", observe-t-il, les Afghans éduqués ayant pris par dizaines de milliers le chemin de l'exil depuis le soudain retour au pouvoir des talibans. Quant aux autres, "ils craignent les talibans et ne savent désormais plus de quoi leur avenir sera fait", après deux décennies de hausse de la scolarisation.

Dans les faits, la non mixité était déjà souvent la norme, comme dans cette école de Mazar-e Sharif. Mais ici l'inquiétude est montée d'un cran et le nombre de filles scolarisées a même diminué de moitié.

"Ils disent que vous pouvez étudier jusqu'à la sixième année, puis c'est fini. Mais je n'aime pas l'idée de ne pas pouvoir continuer à étudier. Ils disent qu'ils vont mettre des obstacles pour que tu ne puisses pas étudier ce que tu veux, que les filles ne peuvent pas devenir enseignantes ou médecins."

Manifestation réprimée

Toujours à Mazar-e Sharif, des dizaines de femmes et de militants des droits des femmes ont manifesté lundi pour demander l'application des conventions internationales pour les droits des femmes en Afghanistan. Les forces talibanes ont dispersé la manifestation à coup de feu en l'air.

Ces femmes réclament pourtant seulement l'égalité des droits et une participation au futur gouvernement promis "inclusif" par les talibans :

"Ils disent qu'ils vont donner des droits aux femmes, mais pas aux plus hauts niveaux du gouvernement, et nous ne voulons pas cela. Et il faut savoir qu'il y a beaucoup de femmes qui soutiennent financièrement leurs familles."

Pour le moment, les femmes ont une voix, on les entend, mais pour combien de temps encore ? Cela reste à voir, car jusqu'à présent les preuves que les Talibans ont changé envers les droits des femmes sont minces, voire contradictoires.

Sources additionnelles • AP, AFP

Partager cet articleDiscussion

À découvrir également

En Afghanistan, plus d'un million de filles n'ont pas accès à l'éducation au début de l'année scolaire

Afghanistan : retour à Kaboul pour deux anciens prisonniers de Guantanamo

En Afghanistan, les recherches des survivants se font avec des moyens dérisoires