France : pénalisation définitive des thérapies de conversion

Gay Pride march, June 26, 2021, in Paris
Gay Pride march, June 26, 2021, in Paris Tous droits réservés Lewis Joly/Copyright 2021 The Associated Press. All rights reserved
Tous droits réservés Lewis Joly/Copyright 2021 The Associated Press. All rights reserved
Par Ophélie Barbier avec AFP
Partager cet articleDiscussion
Partager cet articleClose Button

Mardi 25 janvier, la loi contre les thérapies de conversion en France a été définitivement adoptée.

PUBLICITÉ

Les thérapies de conversion, qui visent à imposer un changement de sexualité aux personnes lesbiennes, gays, bi et trans (LGBTI+), sont définitivement classées comme un délit dans le Code pénal français depuis mardi. "Nous condamnons tous ceux qui envisagent un changement de sexe ou d'identité comme une maladie", a annoncé la députée LREM Laurence Vanceunebrock, à l’origine de ce texte de loi.

Deux ans d'emprisonnement et 30 000 euros d'amende

Benoît Monchotte est psychopraticien et thérapeute communautaire. Il œuvre auprès de la communauté LBGTI+ et fait du bénévolat pour le Centre LGBTI+ Lyon. "Les thérapies de conversion prétextent reposer sur des techniques cognitives et comportementales, mais n'ont évidement aucun effet, car les orientations de genre ou de sexualité ne sont pas des pathologies", rappelle Benoît Monchotte. Le psychopraticien explique que "ces concepts pseudo-scientifiques sont robustes et difficilement déconstruisables, et bien souvent, l'issue d'une thérapie comme celle-ci est un psycho-traumatisme".

Être soi n'est pas un crime. Non, l'homosexualité et la transidentité ne sont pas des maladies que l'on pourrait soigner. Non, il n'y a rien à guérir
Elisabeth Moreno
Ministre de l'Égalité entre les femmes et les hommes, de la Diversité et de l'Égalité des genres

Ces pratiques sont désormais punies de deux ans d'emprisonnement et 30 000 euros d'amende. Les peines pourront s'élever à trois ans de prison et à 45 000 euros d'amende en cas de circonstances aggravantes, selon l’AFP. "Des gens se font battre, violer, mutiler. C'est abominable. Je qualifie cela de traumatisme d'extermination, car ces thérapies n'ont d'autre vocation que d'exterminer des personnes", pour Benoît Monchotte.

D'après un rapport sur les pratiques de thérapies de conversion, publié par le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l'homme (OHCHR) en 2020, quatre personnes sur cinq ayant subi une thérapie de conversion avaient 24 ans ou moins. La moitié concernait des mineurs.

"Un message juridique que l'on attendait depuis longtemps"

Les thérapies de conversion entraînent un rejet de la part du clan familial, du clan social et du clan sociétal. "Ça déclenche un isolement mortifère, violent, car les survivants de ces pratiques n'ont plus personne du jour au lendemain et cela peut les pousser au suicide", exprime le psychopraticien avec émotion. Il résulte des thérapies de conversion "une stratégie d'acculturation par exclusion", comme le qualifie Benoît Monchotte, "c'est une forme de double peine chez les personnes LGBTI+, car on leur fait croire qu'elles ne peuvent être ni acceptées, ni aimées".

La loi contre les thérapies de conversion était en attente d'adoption définitive depuis son dépôt au Parlement en mars 2021. Pour Benoît Monchotte, "c'est un message juridique que l'on attendait depuis longtemps (...) c'est une première étape de dire que les thérapies de conversion ne sont officiellement plus acceptables".

Ces thérapies sont nées dans les années 1970 aux États-Unis par le biais de mouvements chrétiens radicaux, qui avaient pour ambition de convertir les personnes homosexuelles à l'hétérosexualité. L'OHCHR explique dans son rapport que les thérapies de réorientation sexuelle existent aujourd'hui dans plusieurs pays et sous diverses formes : psychothérapeutique, médicale et confessionnelle.

L’approche psychothérapeutique implique des thérapies comportementales et cognitives, comme des thérapies par aversion. L’approche médicale suppose que la diversité sexuelle et de genre est un "dysfonctionnement biologique inhérent". Des prises de médicaments, tels que des hormones ou des stéroïdes, sont prescrites. Quant à l’approche confessionnelle, elle considère que la diversité sexuelle et de genre est "fondamentalement mauvaise". Des cas d'exorcisme sont liés aux thérapies de conversion, prônés par des mouvances religieuses.

Chacune de ces pratiques implique des violences physiques et mentales qui déshumanisent les individus concernés. En Europe, seules Malte, l'Allemagne et certaines provinces espagnoles ont interdit à ce jour les thérapies de conversion.

Partager cet articleDiscussion

À découvrir également

Gay Pride à Berlin : se rassembler pour défendre les droits LGBT+

Bruxelles passe à l'offensive pour défendre les droits LGBT

"Thérapies de conversion" des LGBT : le Royaume-Uni veut les interdire, l'UE reste à la traîne