Virginijus Sinkevičius : "Les politiques environnementales, c'est un marathon"

Virginijus Sinkevičius : "Les politiques environnementales, c'est un marathon"
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Par Grégoire Lory
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Sur Euronews, le Commissaire européen chargé de l'Environnement Virginijus Sinkevičius répond à ceux qui appellent à une pause dans les politiques environnementales de l'UE. Selon lui, "le travail avance" sachant que l'urgence climatique n'attend pas.

La Green Week est le rendez-vous annuel de l'Union européenne pour faire le point sur la politique climatique. Cette semaine de rencontres et de débats programmée cette année du 3 au 11 juin 23 se déroule dans une atmosphère d'interrogation, voire de remise en cause des objectifs environnementaux.

Nous évoquons ces défis et tirons un bilan des actions de la Commission, avec le Commissaire européen en charge de l'Environnement, Virginijus Sinkevičius.

"Le Pacte vert ne peut être mis en œuvre sans l'adhésion de tous"

Grégoire Lory, Euronews :

"La priorité donnée à l'environnement semble passer au second plan quand on entend le président français ou le premier ministre belge parler d'une pause réglementaire ?"

Virginijus Sinkevičius, Commissaire européen en charge de l'Environnement :

"Je pense que le président français - si vous écoutez tout ce qu'il a dit- a tenu un très bon discours et il n'avait pas vraiment l'intention d'aller à l'encontre des propositions actuelles qui ont déjà été présentées. Il s'agit plutôt de maintenir une approche équilibrée et de veiller à ce que la compétitivité de nos entreprises soit une priorité et je ne peux que réaffirmer la position qui est celle de la Commission depuis le tout début, à savoir que le Pacte vert ne peut être mis en œuvre sans l'adhésion de tous. Mais nous ne devons pas oublier que conclure un traité de paix est impossible en ce qui concerne le changement climatique ou la perte de biodiversité. Ces crises et leurs conséquences pèsent déjà lourdement sur nos vies, au niveau de l'insécurité alimentaire, des inondations ou des sécheresses, qui non seulement, détruisent des moyens de subsistance pour les citoyens européens, mais coûtent aussi des vies humaines et bien sûr, nous devons empêcher que de telles catastrophes ne prennent de l'ampleur à travers l'Europe."

"On ne peut pas se contenter de sauter sur les sujets que la société met en avant"

Grégoire Lory :

"Cette pause n'est-elle pas ce que les gens veulent entendre parce qu'ils ne voient pas dans leur vie quotidienne, les effets de ces politiques vertes et qu'ils ont d'autres préoccupations ?"

Virginijus Sinkevičius :

"Il est toujours plus facile de repérer la crise immédiate. C'est le cas de la guerre qui se déroule en Ukraine depuis plus d'un an. Les choses sont flagrantes. La dégradation de nos sols, par exemple, est beaucoup plus difficile à percevoir. Les premiers à la voir et à la comprendre sont probablement nos agriculteurs qui doivent s'occuper des sols tous les jours et qui dépendent directement de leur fertilité. Mais en tant que politiciens, si nous sommes responsables, nous devons prendre des décisions orientées vers l'avenir. Nous ne pouvons pas nous contenter de sauter sur les sujets que la société met en avant en ce moment. Vous savez, si on revient à 2019, tous les partis politiques étaient alors dans la course du Pacte vert et tentaient d'être plus ambitieux que les autres. Aujourd'hui, ces prises de position se font plus discrètes.Mais la crise climatique, la perte de biodiversité ou les pressions de la pollution n'ont pas disparu. De telles politiques et le changement que nous sommes en train d'opérer concernant notre économie, notre transition énergétique, les transports, etc. c'est un marathon, malgré les pressions de l'extérieur."

"Le travail avance", y compris au Parlement européen

Grégoire Lory :

"Les États membres sont-ils toujours impliqués ? Et qu'en est-il du Parlement ? Parce que le centre-droit demande un moratoire sur plusieurs textes importants du Pacte vert. Existe-t-il encore une majorité en faveur de la politique environnementale ?"

Virginijus Sinkevičius :

"Tout d'abord, bien sûr, les États membres sont pleinement impliqués. Et je constate la même chose au niveau du Parlement. Certes, il y a toujours des opinions qui s'expriment, c'est la beauté de la démocratie et du Parlement. Mais dans l'ensemble, il faut regarder si le travail avance et je note que le travail avance. Je voudrais toujours que les choses aillent plus vite. Donc, nous devons nous assurer que nous sommes prêts, que nous sommes aptes à affronter des lendemains qui s'annoncent sombres et ils s'annoncent sombres tout d'abord pour les acteurs économiques qui dépendent directement des écosystèmes : nos agriculteurs, nos pêcheurs, nos exploitants forestiers. En réalité, 50% du PIB mondial est lié aux écosystèmes. Je sais que c'est quelque chose que nous tenons pour acquis, mais à un moment donné, si nous perdons cela, il n'y aura pas de technologie capable de le remplacer avec succès."

Guerre en Ukraine : "Tous nos objectifs en matière d'énergies renouvelables ont été adoptés avec une vitesse étonnante"

Grégoire Lory :

"La guerre en cours en Ukraine exerce-t-elle une pression sur les ambitions et les investissements en faveur des politiques vertes ?"

Virginijus Sinkevičius :

"Je dirais qu'il y a probablement deux aspects des choses. D'une part, la guerre a eu un effet très positif sur nos politiques énergétiques. Tous nos objectifs en matière d'énergies renouvelables - le plan REpowerEU avec le développement de projets d'énergies renouvelables - ont été adoptés à une vitesse étonnante. Cela a bien montré que l'incertitude et la hausse des prix de l'énergie nous ont poussés à chercher des alternatives nous permettant de ne pas dépendre de régimes incertains et non démocratiques. En ce qui concerne les politiques en matière de biodiversité, je veux rassurer : nous ne voulons pas que les exploitants forestiers quittent les forêts, que les pêcheurs ne soient plus en mer ou que les agriculteurs ne travaillent plus la terre. Au contraire. Nous voulons qu'ils continuent à le faire pendant de nombreuses années d'une manière qui soit profitable pour eux, qui soit rentable et qui ne nuise pas à l'écosystème, et ce pour que nous garantissions la durabilité à long terme."

Grégoire Lory :

"Tous les textes seront-ils conclus avant la fin du mandat ?"

Virginijus Sinkevičius :

"Quand vous regardez les dossiers dont j'ai la charge - l'économie circulaire, les dossiers environnementaux -, je suis optimiste car nous avançons rapidement et j'espère que nous pourrons les conclure avec succès. Comme je l'ai dit, nous en avons besoin. Nous en avons besoin pour maintenir notre position de leader au niveau mondial. Nous en avons besoin parce que nous avons été l'élément moteur des accords mondiaux et nous en avons besoin pour garantir un avenir réalisable aux générations à venir."

Paquet climat, économie circulaire, batteries : "Un certain nombre de grandes réalisations"

Grégoire Lory :

"Dans ce contexte difficile, quelles sont les réalisations qui sont gravées dans le marbre et qui auront des conséquences pour les citoyens ?"

Virginijus Sinkevičius :

"Je pense, tout d'abord, que nous avons accompli un travail considérable en ce qui concerne le paquet climat et le paquet "Ajustement à l'objectif 55" qui est presque terminé. C'est une grande réussite. Nous avons déjà présenté toutes les politiques essentielles pour l'économie circulaire, pour passer d'un modèle linéaire à un modèle plus circulaire et je suis content que les co-législateurs nous soutiennent. Et quand vous regardez la politique des produits, après ce mandat, elle sera méconnaissable, compte tenu de tous les changements que nous avons proposés et j'en suis très fier. Je suis content que nous ayons réussi à conclure rapidement notre dossier sur les batteries. On voit que la production de batteries sera multipliée par 14 d'ici à 2030. Il y a donc un certain nombre de grandes réalisations. Mais comme je l'ai dit, concernant le Pacte vert, il s'agit d'un changement horizontal complexe. Il ne s'agit pas d'une initiative unique que l'on peut qualifier de "Pacte vert" et il nous reste beaucoup de travail à accomplir."

Journaliste • Grégoire Lory

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