Comment Sonya Yoncheva repousse les limites dans ses nouveaux rôles

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Par Katharina Rabillon
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Elle est l'une des plus grandes sopranos de notre époque et n'a de cesse de relever de nouveaux défis. Sonya Yoncheva fait ses débuts dans deux rôles exigeants à Milan et Vienne et elle a invité Musica à la suivre en coulisses.

Superstar de l'opéra, elle incarne tous ses rôles avec passion. Comment Sonya Yoncheva s'approprie-t-elle un nouveau personnage ? La soprano bulgare nous a permis de la suivre dans ce parcours empreint d'engagement et d'émotion.

À Milan, la chanteuse confie "apprendre ses partitions quasiment toute seule". Elle les étudie en les jouant elle-même au piano. "Cela m'aide beaucoup," dit-elle. "C'est un moment très intime parce que je peux essayer différentes couleurs," explique-t-elle.

Dans la ville italienne, Sonya Yoncheva s'apprête à donner vie, une nouvelle fois, à une héroïne tragique, Maddalena dans l'opéra "Andrea Chénier", une prise de rôle qu'elle prépare au sein de la légendaire Scala.

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Sonya Yoncheva prépare ses rôles en jouant la partition au pianoEuronews

Une répétition pour créer "ce merveilleux amalgame de la magie de l'opéra"

Deux semaines avant la première, la célèbre soprano se plonge dans un programme de répétitions intensif.

Nous assistons à la "Sitzprobe", un terme allemand qui veut dire la répétition assise. Il s'agit d'une pièce importante du puzzle. "C'est la première occasion pour les chanteurs d'entendre comment l'orchestre joue et d'entrer dans ce merveilleux amalgame qu'est la magie de l'opéra," décrit le chef d'orchestre Marco Armiliato qui dirige cette version d'"Andrea Chénier".

"Lorsqu'un orchestre joue en direct et que les chanteurs se produisent en direct, on crée cette magie," affirme-t-il avant d'ajouter, enthousiaste : "Dès la Sitzprobe, on peut plus ou moins savoir comment la représentation va se dérouler."

Sonya Yoncheva estime aussi qu'il s'agit d'un moment crucial. "C'est très important pour nous tous parce que, quand vous êtes sur scène et que vous voyez en dessous, l'orchestre avec le maestro, vous ne pouvez jamais avoir le même contact que si vous alliez en studio et que vous créiez les différentes couleurs et façons de respirer ensemble," fait-elle remarquer.

"On est en quelque sorte, dans un endroit sûr, où l'on peut se permettre de se tromper parfois et de ne pas être parfaits : c'est une répétition très importante," insiste-t-elle.

"L'amour pur" de Maddalena

L'étape suivante est celle des répétitions sur scène au cours desquelles les chanteurs apprennent à connaître le décor et s'entraînent à entrer et sortir.

Ce grand drame raconte l'histoire du poète révolutionnaire Andrea Chénier qui tombe amoureux de Maddalena.

"Actuellement, je travaille encore le personnage car il s'agit d'une toute nouvelle œuvre pour moi," reconnaît Sonya Yoncheva. "Mais ce que je peux vous dire, c'est que je suis vraiment impressionnée par sa façon d'aimer, par cet amour pur qu'elle donne totalement à cet homme, elle l'aime de tout son cœur," décrit-elle. "À la fin de l'opéra, on verra qu'elle choisit de ne pas vivre sans lui, donc elle meurt avec lui, même si ce n'était pas ce qu'elle était censée faire," indique-t-elle.

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Sonya Yoncheva incarnant Maddalena sur la scène de la Scala de MilanEuronews

"Il faut que ce soit nouveau, brillant et beau"

En 1896, le compositeur italien Umberto Giordano a rencontré un vif succès lors de la première de son chef-d'œuvre à la Scala, l'une des plus prestigieuses maisons d'opéra du monde. Une institution où les plus grands chanteurs ont laissé leur empreinte.

La Scala occupe également une place particulière dans le cœur de Sonya Yoncheva. C'est là qu'elle a remporté le célèbre concours de chant Operalia qui l'a propulsée au rang de star en 2010. Aujourd'hui, elle figure parmi les sopranos les plus renommées de notre époque et interprète un vaste répertoire.

Nous la retrouvons dans sa loge, le soir de la première d'"Andréa Chénier". "Je suis très impatiente," reconnaît la soprano. "Depuis ce matin, je veux monter sur scène, chanter, arriver au bout et ensuite, avoir du temps libre parce que c'est une grande pression de construire un personnage et de l'interpréter pour la première fois, surtout dans des endroits comme la Scala," dit-elle. "Je pense que tout le monde a déjà entendu toutes les versions de cet opéra interprétées par tant d'autres chanteurs. Il faut donc que ce soit nouveau, brillant et beau," estime-t-elle.

Les partitions autographes de Puccini, une source d'inspiration

Quelques semaines plus tard, alors qu'elle se produit toujours à Milan, Sonya Yoncheva prépare sa prochaine aventure : l'un des rôles les impressionnants du répertoire pour soprano, Madame Butterfly de Puccini. Pour s'imprégner de l'histoire de ce rôle difficile et trouver l'inspiration, elle se rend aux Archives Ricordi, fondées en 1808. Celles-ci regroupent l'héritage historique de la maison d'édition Ricordi, rachetée en 1994 par le groupe de médias allemand Bertelsmann qui en assure désormais, la préservation et le développement culturel. Cette vaste collection, considérée comme la plus importante de l'histoire de l'opéra italien, réunit 200 ans de musique, de Verdi à Rossini et Puccini.

"La collection de Puccini est probablement la plus riche et la plus complète," précise Pierluigi Ledda, directeur général des "Archivio Storico Ricordi". "Nous disposons des partitions autographes, mais aussi des dessins des costumes et des scénographies, souvent pour les premières mondiales de ses propres opéras, donc nous sommes vraiment en mesure de reconstruire le processus de création de ces chefs-d'œuvre," se réjouit-il.

L'archiviste Maria Pia Ferraris qui accueille Sonya Yoncheva ce jour-là lui présente la partition autographe de la première partie de l'Acte 2 de "Madame Butterfly". Devant le manuscrit, la soprano ne peut cacher son émotion. "J'en ai des frissons," avoue-t-elle. "C'est justement ce que j'étudiais ce matin," fait-elle remarquer, dans un sourire.

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Sonya Yoncheva en compagnie de l'archiviste Maria Pia Ferraris, au sein des Archives Ricordi à MilanEuronews

"Tous les documents sont fascinants, chacun d'eux peut nous parler," explique Maria Pia Ferraris. "Puccini écrivait sur la partition tout ce qui se passait sur scène : c'est quelque chose qu'il a appris de Verdi," précise-t-elle.

Sonya Yoncheva reconnaît sa chance de pouvoir examiner ces partitions de l'auteur. "C'est très intéressant pour moi de voir les remarques du compositeur qui explique comment je dois être sur scène," se réjouit-elle avant d'ajouter, en souriant : "Maintenant, j'ai un argument de poids face aux metteurs en scène pour pouvoir leur dire : Non, Pucchini a dit qu'il fallait faire comme cela."

En parcourant la partition, Sonya Yoncheva s'arrête sur un passage de l'air "Un bel dì, vedremo". "Il a écrit Legatissimo jusqu'ici, d'accord, merci, Puccini," dit-elle, constatant l'ampleur de la difficulté.

Une quête d'émotions et de nouvelles couleurs

De Milan à Vienne, Sonya Yoncheva rejoint le personnage icônique de la geisha Cio-Cio-San dans cette tragédie dévastatrice, une histoire d'amour non réciproque qui résonne à toutes les époques.

"C'est très difficile pour moi, de cacher mes larmes quand je lis et étudie cette œuvre," confie la soprano. "J'ai essayé de la chanter de nombreuses fois à la maison et c'était vraiment impressionnant de voir à quel point il y a de l'émotion," assure-t-elle.

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Sonya Yoncheva sous les traits de la geisha Cio-Cio-San au Wiener StaatsoperEuronews

Cio-Cio san est "extrêmement fragile sur le plan émotionnel, mais en même temps, incroyablement forte," estime la chanteuse. "Ce que j'adore chez elle, c'est que, quand elle dit quelque chose, elle le fait vraiment et que, quand elle croit en quelque chose, c'est pour de vrai," souligne-t-elle. Un rôle emblématique qui lui permet de toucher du doigt, ce qui fait l'essence de son métier, selon elle. "Pour un artiste, c'est toujours important de repousser les limites et de constamment chercher de nouveaux rôles : ils me donnent de nouvelles couleurs, c'est formidable," conclut-elle, enthousiaste.

Journaliste • Katharina Rabillon

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