C'était la baignade la plus attendue de l'année : la maire de Paris a emboîté le pas à Amélie Oudéa-Castéra, ministre française des sports, pour s'immerger dans la Seine. L'objectif : montrer que le fleuve est propre à la baignade... qui y est pourtant interdite depuis plus d'un siècle.
PUBLICITÉ"Chaque fois que je rencontre quelqu'un, il s'inquiète de savoir si je vais nager dans la Seine", déclare Léonie Périault, triathlète française qui a remporté la médaille de bronze aux Jeux olympiques de Tokyo, en 2020.
Paris a dépensé 1,4 milliard d'euros pour tenter d'apaiser ces craintes, en construisant un gigantesque bassin souterrain pour stocker les eaux usées afin qu'elles ne se déversent dans la Seine. Depuis plus d'un siècle, il est en effet interdit de se baigner dans le fleuve parisien, pour des raisons d'hygiène.
À moins de deux semaines des Jeux olympiques de Paris et des épreuves prévues dans le fleuve, une question se pose : La Seine sera-t-elle suffisamment propre, le moment venu, pour que les athlètes puissent s'y baigner ?
La Seine sera-t-elle propre à temps ?
Des épreuves de triathlon sont prévues dans la Seine, mais, malgré les efforts de la ville, l'eau a été jugée impropre à la consommation humaine ces dernières semaines, tout en étant parfois plus propre d'autres jours, alors que les Jeux se tiendront du 26 juillet au 11 août prochains.
La ministre française des sports, Amélie Oudéa-Castéra, tentant de rassurer les plus sceptiques, a plongé dans le fleuve le week-end dernier. La maire de Paris, Anne Hidalgo, s'est finalement jetée à l'eau, après avoir reporté plusieurs fois la séquence.
L'année dernière, Léonie Périault a participé à une épreuve test dans la Seine.
"Le cadre était incroyable avec la Tour Eiffel en toile de fond, et l'état de l'eau n'était pas pire qu'ailleurs", dit-elle.
Paris a dépensé 1,4 milliard d'euros pour assainir la Seine
Pour assainir le fleuve, Paris a investi 1,4 milliard d'euros dans la construction d'infrastructures destinées à recueillir davantage d'eaux pluviales, ces mêmes eaux qui contiennent des bactéries et qui se déversent dans le fleuve en cas de fortes pluies, le rendant impropre à la baignade.
En mai, les autorités parisiennes ont inauguré un gigantesque bassin de stockage souterrain à côté de la gare d'Austerlitz, destiné à recueillir l'excès d'eau de pluie et à empêcher les eaux usées de se déverser dans la Seine. Le bassin peut contenir l'équivalent de 20 piscines olympiques d'eaux sales, qui seront désormais traitées. Il s'agit de la clé de voûté des améliorations majeures des infrastructures, que la ville s'est empressée d'achever à temps pour les Jeux, mais aussi pour garantir aux Parisiens une Seine plus propre dans les années à venir.
Mais des épisodes de fortes pluies pourraient faire grimper les niveaux d'E. coli au-delà de du seuil de 900 unités pour 100 millilitres, que la Fédération mondiale de triathlon juge convenable pour les compétitions.
Les épreuves olympiques pourraient être annulées ou déplacées
Les organisateurs des Jeux olympiques de Paris ont déclaré que si de fortes pluies affectaient le débit de la Seine pendant les Jeux, la partie natation triathlon serait tronquée, et que le marathon de natation serait déplacé au stade nautique de Vaires-sur-Marne, en région parisienne.
"Ce n'est pas très courant, mais c'est arrivé quelques fois", a déclaré Ollala Cernuda, responsable de la communication du World Triathlon. "Et c'est toujours lié à des problèmes de qualité de l'eau".
Pourquoi la Seine est-elle si sale ?
Paris, comme de nombreuses autres villes historiques dans le monde, possède un réseau d'égouts unitaire, ce qui signifie que les eaux usées et les eaux pluviales de la ville s'écoulent dans les mêmes tuyaux. En cas de fortes pluies ou de pluies prolongées, la capacité des canalisations arrive à saturation, ce qui signifie que les eaux usées se déversent dans le fleuve au lieu de passer par une station d'épuration.
Le groupe de surveillance Eau de Paris a testé quotidiennement l'eau de la rivière. Les résultats ont montré des niveaux dangereux d'E. coli au cours des dernières semaines, puis une amélioration au début du mois de juillet.
Les organisateurs des Jeux olympiques restent optimistes
Les organisateurs restent toutefois optimistes et pensent qu'un temps plus sec et plus ensoleillé que celui qu'a connu la capitale française en juin permettra aux épreuves de se dérouler comme prévu, sous l'effet des améliorations apportées aux infrastructures.
PUBLICITÉLes rayons ultraviolets du soleil ont la capacité d'éliminer les bactéries comme l'E. coli dans l'eau.
Une analyse des données météorologiques réalisée par l'agence AP a montré que Paris avait connu le deuxième plus grand nombre de jours de pluie en 2024, au cours des 75 dernières années, à l'exception de 2016.
Paris n'a connu qu'une seule période de sécheresse, d'une semaine cette année, au début du mois de juin, alors qu'entre 1950 et 2020, il était habituel pour la ville de connaître au moins trois périodes de ce type avant la fin du mois de juin, selon l'analyse.
"Les prévisions en termes de précipitations deviennent bien plus précises, une semaine à l'avance", a déclaré Jennifer Francis, scientifique au Woodwell Climate Research Center. "Mais les modélisations des saisons des dernières décennies ne constituent plus une orientation fiable dans un monde exposé au réchauffement".
PUBLICITÉSelon les experts, impossible de faire des prévisions pour l'instant
Dan Angelescu, fondateur et PDG de Fluidion, une entreprise technologique de surveillance de l'eau basée à Paris et à Los Angeles, a déclaré que des améliorations avaient été observées dans le fleuve depuis la construction des nouvelles infrastructures de la ville, mais que la qualité de l'eau de la Seine restait fragile. Son entreprise mesure les niveaux de contamination de la Seine depuis plusieurs années.
Selon Dan Angelescu, il reste difficile de prédire, à partir des données des années précédentes, ce qui pourrait se produire dans le courant du mois, étant donné que le bassin de stockage de l'eau et les autres infrastructures ne sont opérationnels que depuis quelques mois.
"Il est difficile de dire ce qu'il en est", a déclaré M. Angelescu, début juillet, alors que l'eau de la Seine avait été jugée plus propre que plusieurs semaines auparavant.
"Le fait de constater une amélioration aussi radicale et aussi rapide pourrait être le signe que cela marche", conclut-il.
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