Bélarus - UE : une "attaque hybride" pas si inédite que cela

Bélarus - UE : une "attaque hybride" pas si inédite que cela
Tous droits réservés Leonid Shcheglov
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Par Pablo RamiroEuronews
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Ce n'est pas la première fois que l'Europe est confrontée à un chantage sur les flux migratoires. La Turquie ou le Maroc ont déjà essayé d'en tirer profit.

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"Attaque hybride", c'est ainsi que l'Union européenne a qualifié la tactique employée par le Belarus à sa frontière avec la Pologne.

De quoi s'agit-il ? Ce terme décrit une forme d'offensive utilisant tout type d'éléments - excepté la violence directe - pour déstabiliser ou affaiblir un rival. Dans ce cas, des milliers de personnes (environ 4000 selon le gouvernement polonais) sont utilisées comme arme politique. Un moyen pour mettre l'Europe face à ses contradictions et dissensions internes.

"Je me suis entretenu avec le ministre des affaires étrangères bélarus, M. Makei, pour évoquer la situation humanitaire précaire à la frontière avec l'UE. La vie des gens doit être protégée et les agences humanitaires doivent être autorisées à y accéder. __La situation actuelle est inacceptable et doit être arrêtée. Les gens ne doivent pas être utilisés comme des armes", a posté sur Twitter le chef de la diplomatie européenne Josep Borrell.

Un tweet qui reflète la position adoptée sur le dossier par Bruxelles. L'Union européenne a reproché au président biélorusse Alexandre Loukachenko de "mettre délibérément en danger la vie et le bien-être des gens et d'attiser la crise aux frontières extérieures de l'UE" et, lundi, le Conseil européen a annoncé de nouvelles sanctions contre le Belarus.

Cependant, ce n'est pas la première fois que cela se produit. Bien qu'en d'autres occasions, le terme "attaque hybride" n'a pas été utilisé, et aucune sanction n'a été imposée.

Le cas très délicat du Maroc

Lorsque le président du Front Polisario, Brahim Galhi, a été soigné en Espagne contre le Covid-19, le Maroc a opté pour une action similaire.

Environ 8 000 personnes sont arrivées en Espagne en traversant Ceuta à la nage en seulement 48 heures et en l'absence de contrôles de la police marocaine. L'Union européenne a, par la suite, dénoncé le "chantage" du Maroc mais n'a pas pour autant annoncé de sanctions.

Ce n'est pas la première fois que le royaume menace d'ouvrir le robinet migratoire. En 2018, plusieurs experts avaient mis en garde contre l'utilisation de la migration comme outil de négociation dans des dossiers telles que l'aide à l'immigration ou la pêche.

Car depuis 2013, plusieurs des centaines de million d'euros ont été versés au Maroc pour assurer l'imperméabilité des frontières européennes. En 2019, Bruxelles s'est ainsi engagé à verser 101 millions d'euros "en soutien à la gestion des frontières et la lutte contre le trafic d'êtres humains".

"Le programme contribuera à (...) aider le Maroc à poursuivre la modernisation de ses moyens, y compris par le recours à de nouvelles technologies et par l'échange de bonnes pratiques avec les agences de l'UE, Frontex et Europol. Le respect des droits de l'homme et la protection des migrants vulnérables seront au cœur du programme, qui comprend des formations liées à ces aspects", précise le texte d'accord.

Selon le journal espagnol El País qui a révélé en avril 2021 les dessous de l'entente, le Maroc exigerait désormais davantage d'argent de l'Union, sans quoi il fermerait les yeux sur les flux migratoires.

La Turquie et la guerre en Syrie

Une situation qui ressemble fortement à celle que connait l'UE à sa frontière avec la Turquie. Le 18 mars 2016 un accord migratoire est signé avec ce pays. Le texte prévoit que l'Union européenne verse 3 milliards d'euros à Ankara en échange de l'"externalisation" du problème migratoire en dehors de ses frontières.

Une situation dont le président turc, Recep Tayyip Erdogan, n'a pas hésité à tirer avantage. Il a menacé à plusieurs reprises l'UE d'" ouvrir les frontières ", comme lorsque le Parlement européen avait décidé de geler les négociations d'adhésion à l'UE de la Turquie.

"Lorsque 50 000 immigrants sont arrivés dans la ville frontalière de Kapikule, vous avez commencé à vous lamenter en disant : "Que ferons-nous si la Turquie ouvre les portes de la frontière ? ". Si vous allez plus loin, vous devez savoir que les portes de la frontière seront ouvertes", avait alors menacé le dirigeant turc.

Amnesty International estime que "cet accord a entaché le bilan de l'UE en matière de droits de l'homme et a montré sa volonté de conclure des accords pour limiter les migrations sur la base de simples raisons d'opportunité politique et avec peu de considération pour le coût humain inévitable".

Les gardes-côtes libyens

Le 30 janvier 2019 l'UE a renouvelé l'accord migratoire entre l'Italie et la Libye. Un pacte qui a été unanimement critiqué par les ONG, mais aussi par le Comité des droits de l'homme du Conseil de l'Europe.

Il prévoit qu'en échange de l'interception par les garde-côtes libyens des bateaux de migrants et leur "prise en charge", l'Italie et l'UE leur apportent un soutien logistique et économique.

L'Union européenne soutient cet accord depuis au moins trois ans, en formant les garde-côtes libyens dans des ports comme celui de Cadix, en Espagne.

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Un programme de formation qui, visiblement ne suffit pas. Comme le 1er juillet dernier, les garde-côtes libyens ont tiré sur un bateau de personnes qui tentaient de rejoindre un port européen.

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