Haut-Karabakh : les eurodéputés demandent des sanctions contre l'Azerbaïdjan et estiment que la condamnation ne suffit plus

La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, assise à côté du président de l'Azerbaïdjan, Ilham Aliyev, à Sofia, le 1er octobre 2022\.
La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, assise à côté du président de l'Azerbaïdjan, Ilham Aliyev, à Sofia, le 1er octobre 2022\. Tous droits réservés AP Photo/Valentina Petrova
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Par Mared Gwyn JonesSandor Zsiros
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Cet article a été initialement publié en anglais

Les membres du Parlement européen ont dénoncé l'inaction de l'UE face à la crise du Haut-Karabakh. Ils appellent l'Union à imposer des sanctions économiques à l'Azerbaïdjan.

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"L'UE devrait agir, imposer des sanctions, y compris l'arrêt des importations de gaz", insiste l’eurodéputé écologiste Reinhard Bütikofer.

Bakou a lancé mardi une opération "antiterroriste" dans le Haut-Karabakh, une enclave séparatiste arménienne, mais reconnue internationalement comme faisant partie de l'Azerbaïdjan.

L'attaque fait suite à des mois de tensions croissantes dans la région, réveillant les craintes d'un retour aux hostilités de la guerre de 2020, où des milliers de personnes ont perdu la vie.

L'Union européenne a condamné l'agression, mais n'a pas pris de mesures de rétorsion. Les tentatives de l'UE pour désamorcer le conflit vieux de plusieurs décennies entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan ont également été infructueuses.

Lors d'un débat mercredi au Parlement européen , des députés de tous rangs politiques ont affirmé que l'UE avait été lente à réagir aux appels à l'aide de l'Arménie depuis que les forces azéries ont bloqué il y a neuf mois le corridor de Lachin. Ce blocus empêche le passage de biens essentiels tels que les denrées alimentaires, les médicaments et le carburant.

Les eurodéputés demandent des sanctions économiques et commerciales ainsi que la suspension de toutes les relations bilatérales avec Bakou.

Le débat a eu lieu quelques heures avant que la région séparatiste n'accepte un cessez-le-feu proposé par les forces de maintien de la paix russes, qui sont présentes dans le Haut-Karabakh depuis la trêve conclu sous l'égide de Moscou en 2020. Mais le Premier ministre arménien, Nikol Pachinian, s'est récemment tourné vers l'Occident pour obtenir son soutien, frustré par l'absence d'implication de la Russie.

"Nous n'avons pas été en mesure d'empêcher un assaut que nous avions vu venir", dénonce la parlementaire Nathalie Loiseau.

"La médiation a été un échec total. Nous n'avons jamais nommé l'agresseur. Nous avons ignoré le Premier ministre arménien lorsqu'il nous a appelés à l'aide", ajoute-t-elle.

Nathalie Loiseau a également fait écho aux affirmations arméniennes selon lesquelles Bakou poursuit sa politique de nettoyage ethnique. "Notre faiblesse et notre passivité nous ont rendus complices de cette politique", poursuit-elle.

Bakou n'est pas un partenaire "digne de confiance"

Les parlementaires ont également critiqué les accords conclus entre l'UE et le Premier ministre azéri, Ilham Aliyev.

Ursula von der Leyen a signé en 2022 un texte qui doit permettre de doubler les importations européennes de gaz azéri d'ici 2027, afin de réduire la dépendance vis-à-vis des hydrocarbures russes. La présidente de la Commission européenne avait alors qualifié Bakou de partenaire "digne de confiance".

Le Commissaire européen en charge de l'Elargissement, Olivier Várhelyi, a également rencontré au début du mois à Budapest le ministre azéri des Affaires étrangères pour discuter de projets stratégiques en matière de transport et d'énergie.

Un porte-parole de la Commission européenne a rappelé mercredi que les sanctions ne pouvaient être imposées que par les États membres, mais que les dirigeants de l'UE discuteraient d'éventuelles mesures lors de l'Assemblée générale des Nations Unies à New York.

Les députés ont affirmé que la facture de gaz de l'UE en provenance de Bakou finançait directement l'agression et la campagne de nettoyage ethnique de l'Azerbaïdjan.

Les 27 ont importé l'année dernière 15,6 milliards d'euros de gaz naturel d'Azerbaïdjan, soit quatre fois plus qu'en 2021. La Bulgarie, la Roumanie, la Hongrie et la Slovaquie se sont également engagées à augmenter leurs importations de gaz en provenance de ce pays riche en pétrole.

Les députés ont aussi exprimé leur inquiétude sur le fait que le gaz arrivant en Europe depuis l'Azerbaïdjan était "de facto du gaz russe" et ont demandé des enquêtes urgentes sur l'origine des importations.

Un porte-parole de la Commission a rejeté cette affirmation assure que "le gaz que nous recevons d'Azerbaïdjan est du gaz de la Caspienne".

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Intérêts géopolitiques

Les députés ont également affirmé que la Russie et l'Azerbaïdjan avaient intérêt à installer un régime fantoche en Arménie car le Kremlin cherche à renforcer son influence dans le Caucase du sud.

"L'objectif de la Russie est clairement de destituer le Premier ministre arménien Pachinian", a souligné Raphaël Glucksmann, eurodéputé français du groupe social-démocrate. "Ils veulent se débarrasser d'un gouvernement démocratique en Arménie, qui a choisi la liberté et l'émancipation".

"Comment espérer que l'Union européenne s'affirme comme une puissance géopolitique si nous sommes prêts à sacrifier ainsi des alliés aussi importants que les Arméniens ? "

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