Volodymyr Zelensky participe à un sommet à Bruxelles, en présence de dirigeants européens et de Kaja Kallas. Selon la cheffe de la diplomatie de l'UE, forcer l'Ukraine à entamer des négociations précipitées avec la Russie pour mettre fin à la guerre, pourrait aboutir à un "mauvais accord" pour Kyiv.
Réunis à Bruxelles, les dirigeants européens ont plusieurs sujets à aborder. À commencer par l’Ukraine.
Après une rencontre, mercredi, avec le chef de l’OTAN, Mark Rutte, et le président français Emmanuel Macron, Volodymyr Zelensky a participé à ce sommet ce jeudi.
Alors que Bruxelles et Kyiv redoutent l’arrivée de Donald Trump à la Maison Blanche, le président ukrainien appelle l’Europe et les États-Unis à l’unité.
"Nous avons besoin d'une grande unité entre les États-Unis et l'UE et les pays d'Europe. Nous avons besoin de cette unité pour parvenir à la paix. Et je pense que ce n'est qu'ensemble, les États-Unis et l'Europe peuvent vraiment arrêter Poutine et sauver l'Ukraine", a déclaré le président ukrainien.
Une unité parfois mise à mal par certaines voix discordantes au sein des 27, comme celles de la Hongrie ou de la Slovaquie, ou des actes unilatéraux, comme le récent entretien téléphonique entre le chancelier allemand et Vladimir Poutine.
Et alors que de nombreuses voix s’élèvent pour appeller l’Ukraine à accepter des négociations de paix, également encouragées par Donald Trump, Kaja Kallas appelle à la retenue.
"Toute tentative de négociation trop tôt sera en fait une mauvaise affaire pour l'Ukraine. Tous les autres acteurs dans le monde observent attentivement comment nous agissons dans cette affaire et c'est pourquoi nous devons vraiment être forts. La Syrie nous montre que la Russie n'est pas convaincue et que nous ne devons pas sous-estimer notre propre puissance", a déclaré la cheffe de la diplomatie européenne.
Le président lituanien Gitanas Nausėda, fervent défenseur de Kyiv, a exprimé un point de vue similaire, estimant que "la Russie ne montre aucune volonté de négocier" et que, par conséquent, toute ouverture à la discussion est contre-productive.
"J'entends des rumeurs sur d'éventuelles négociations de paix et mon opinion est qu'il est probablement trop tôt parce que la Russie est actuellement en mode offensif", a déclaré Nausėda.
"Si nous essayons de tirer quelque chose de cette situation, il ne s'agira pas d'une paix juste et durable. Ce sera une paix injuste et non durable."
Selon Nausėda, l'UE devrait aller au-delà des promesses "rhétoriques" et se concentrer sur le renforcement de son soutien militaire et financier à l'Ukraine afin de placer le pays dans la position la plus forte possible avant d'entamer toute négociation.
"Malheureusement, nous ne tenons pas nos promesses", a-t-il déploré. "Nous avons fait beaucoup de promesses, mais nous n'avons pas pu les tenir".
"La situation est vraiment compliquée et nous devons être honnêtes avec nous-mêmes", a-t-il poursuivi. "Nous devons vraiment être un acteur stratégique mondial. Et nous ne pourrons devenir un tel acteur que si nous nous engageons à prendre des décisions au lieu de parler, parler et parler".
La perspective de négociations entre l'Ukraine et la Russie a gagné du terrain ces derniers mois, notamment après la victoire de Donald Trump aux États-Unis. Pendant la campagne, Trump a promis de conclure un accord pour mettre fin à la guerre "en 24 heures", sans préciser comment. Son équipe a, depuis lors, évoque des pistes, comme la menace que les États-Unis cesseraient leur soutien militaire si l'Ukraine n'acceptait pas d'entamer des pourparlers avec la Russie. À l'inverse, l'Amérique renforcerait son aide si la Russie refusait de s'engager.
Autre initiative, qui n'est pas encore officielle : la possibilité d'établir une mission de maintien de la paix à l'intérieur de l'Ukraine afin de préserver le futur accord. Le président français Emmanuel Macron a clairement indiqué que l'Europe devrait envisager d'envoyer des troupes sur le terrain, ce qui, pour d'autres pays, reste très controversé.
"La priorité est que les Ukrainiens gagnent la guerre et repoussent les Russes. Ensuite, nous pourrons parler de paix", a déclaré le Premier ministre belge Alexander De Croo, interrogé sur l'initiative de Trump et sur une éventuelle mission de maintien de la paix.
"Nous devons être très ouverts si, à un moment donné, la guerre est gagnée et que l'Ukraine a pu repousser les Russes. Chacun devra jouer son rôle pour maintenir la paix et fournir des garanties de sécurité tangibles", a ajouté De Croo.
Son homologue irlandais, Simon Harris, n'a pas exclu la mise en place d'une mission de maintien de la paix, mais a déclaré que le débat était "un peu prématuré" et qu'il s'agissait plutôt d'une question "pour l'avenir".
"Pour l'instant, nous ne voyons aucune indication de la part de la Russie qu'elle souhaite avancer d'une manière ou d'une autre vers la paix", a déclaré Harris à son arrivée à Bruxelles. "Alors que vous me posez cette question à juste titre, la Russie continue de bombarder l'Ukraine".
Le sommet de jeudi intervient à un moment périlleux pour Kyiv, les forces russes gagnant du terrain dans l'est du pays et les soldats nord-coréens se battant dans la région de Koursk, certains d'entre eux auraient déjà été tués, selon des responsables américains et ukrainiens. La participation de la Corée du Nord, estimée à environ 11 000 hommes, a élargi l'ampleur de la guerre et offert à la Russie une bouée de sauvetage essentielle pour compenser ses lourdes pertes sur le terrain.