"Il est devenu trop dangereux de sortir". De plus en plus d'Ukrainiens cherchent à échapper à la mobilisation. Euronews a tendu un micro à certains d'entre eux.
Alors que l'Ukraine entre dans sa quatrième année de guerre totale suite à l'invasion russe, ses forces armées sont confrontées à une crise croissante. La vague initiale de volontaires désireux de défendre leur pays s'est affaiblie, laissant l'armée en proie à des difficultés pour reconstituer ses rangs. Les troupes épuisées sur les lignes de front ont un besoin urgent de renforts, mais un nombre croissant d'Ukrainiens cherchent par tous les moyens à éviter la conscription.
Dans la capitale, Kyiv, des panneaux d'affichage et des campagnes en ligne exhortent les citoyens à s'enrôler. Les brigades de l'armée ont reçu l'autorité directe de recruter, ce qui a intensifié les efforts de mobilisation. Cependant, l'enthousiasme pour l'engagement volontaire a diminué, laissant place à une réticence croissante de la part de nombreux Ukrainiens à répondre à l'appel aux armes.
Parmi eux, Aslan (le nom a été changé), qui se décrit comme réfractaire à l'armée. Craignant d'être recruté de force, il a adapté sa routine quotidienne pour échapper aux autorités.
"Il est devenu trop dangereux de sortir", explique-t-il. "Les gens sont attrapés et envoyés à l'armée et au front. Je soutiens la mobilisation parce que nous devons protéger notre terre, mais pas de cette manière. Ce n'est pas démocratique. Elle devrait être basée sur de bonnes conditions et des contrats. Il faut être formé à une spécialité militaire. Quand on est mobilisé de force, on n'a pas d'autre choix que d'être en première ligne".
Les autorités ukrainiennes ont tenté d'améliorer les processus de mobilisation, mais les méthodes controversées de recrutement des soldats et les scandales de corruption n'ont fait qu'accroître la résistance à l'enrôlement. Beaucoup craignent d'être renvoyés et de ne jamais revenir.
Nazar, agent immobilier, travaille la plupart du temps à domicile pour éviter d'être confronté aux patrouilles. Selon lui, être envoyé de force au front pourrait être un aller simple.
"Un tiers de mes amis ont déjà fui à l'étranger, moyennant des pots-de-vin ou de faux papiers d'exemption de recrutement", dit-il. "Un autre tiers est revenu du front dans des cercueils. Le dernier tiers est encore en vie et se bat".
Nazar partage ses inquiétudes quant à son propre avenir. "Je veux juste vivre", conclue-t-il.
Comme le montrent les nombreux drapeaux sur la Place Maïdan à Kyiv, en hommage aux morts pour la patrie, l'Ukraine a payé un lourd tribut à la guerre et continuera probablement à le faire. Cette année, le gouvernement veut recruter 200 000 soldats supplémentaires. Une tâche qui risque de devenir de plus en plus difficile.