En Colombie, la guerre se fait discrète... en apparence

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Par Euronews
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Dans la région de Tolima, fief des Farc, on ne parle pas des guérilleros, on ne prononce jamais leur nom. “Ces gens-là” font peser sur la population le poids du silence, et pourtant le conflit est à leurs portes.

“Devant chez moi, on entend tout le temps des coups de feu”, raconte Kelly Jhoanna, 18 ans. “Une balle perdue peut arriver dans notre direction et dans ces cas-là, on se dit : est-ce que quelque chose va m’arriver ? Mon grand-père… mes ancêtres sont morts à cause de ce conflit. Mon frère a eu des problèmes avec “ces gens-là” parce que l’armée l’avait forcé à travailler au marché. Il y avait une base pour les militaires près d’ici et mon frère les aidait. Un jour, il est passé de l’autre côté… Alors, les soldats l’ont arrêté et, apparemment, maintenant il va être jugé pour avoir collaboré avec “ces gens-là”, explique la jeune fille.

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Pour sa mère, Maria Graciela Paya, “c’est comme s’ils l’avaient kidnappé” parce qu’ils ne lui ont pas permis de parler à son fils. “Ils ne m’ont jamais laissé lui poser cette question : pourquoi as-tu pris cette décision ? Qu’est-ce qui t’a fait aller de l’autre côté ?”, indique-t-elle.

Les enfants ont-ils une autre alternative que de rejoindre la guérilla ou l’armée ?

“Malgré le processus de paix engagé avec la guérilla, cette province reste en proie à une guerre silencieuse. La population est piégée entre les groupes armés et les soldats. Les enfants, plus vulnérables, sont en première ligne”, explique Monica Pinna, l’envoyée spéciale d’euronews sur place.

L’enrôlement de force est le principal danger auquel sont confrontés les enfants. Kelly Jhoanna appartient, comme sa famille, à l’ethnie indigène nasawe’sx, et vit dans une réserve. Il y règne un calme… apparent.

A 12 ans, les garçons sont enrôlés de force

Ici, une trêve a été négociée avec “ces gens-là”, avec la guérilla et les groupes armés que personne n’ose nommer, mais, de l’autre côté de la vallée, les fermiers colombiens sont, eux, au milieu du champ de bataille. Deux personnes ont été tuées quelques jours avant notre arrivée.

“Les enfants des fermiers viennent, eux aussi, à l‘école. Ils me racontent souvent : “ce garçon-ci ou ce garçon-là a été pris”. Quand “ces gens-là” apprennent que certains enfants viennent d’avoir douze ans, ils les emmènent. Ils ne les laissent pas étudier ou sortir. Si les enfants ne sont pas recrutés par l’armée, ils sont emmenés par “ces gens-là”“, rapporte Kelly Jhoanna.

Des enfants qui vivent donc au quotidien dans l’insécurité et l’instabilité. Nombre d’entre eux ont été contraints d’abandonner leur village d’origine pour trouver refuge dans cette région. Mais ici, ils sont un peu coupés du monde.

Protéger les enfants via l‘éducation

L‘école bénéficie de l’aide de l’Agence des Nations unies pour les réfugiés et, cette année, des fonds alloués par l’Union européenne. Les 28 financent l’initiative “Les Enfants de la Paix”, suite à leur prix Nobel obtenu l’an dernier.

130 élèves de 11 à 21 ans sont donc pris en charge. Le but : leur offrir une meilleure éducation et leur ouvrir des portes sur l’avenir.

“Parfois, cela peut avoir des résultats contradictoires. Les enfants partent étudier et ne reviennent pas dans leur communauté. Ils ne reviennent pas sur leurs terres. Donc, nous, on fait le pari qu’en rénovant les bâtiments, les toilettes de l‘école, on leur donne un bon environnement, dans lequel ils se sentent protégés et dans lequel ils peuvent grandir et apprendre à aimer les institutions et leur communauté”, déclare Gustavo Torres de l’UNHCR.

Et pour les aider à ne pas devenir des enfants soldats, l‘école tente de les impliquer davantage dans leur environnement. L’idée est de développer leur sentiment d’appartenance à leur culture indigène via un éventail d’apprentissages et d’activités ludiques.

“Je veux continuer à étudier pour aider les miens, pour leur enseigner ce que j’ai appris en classe et pour aider ma communauté. Nous avons besoin d’une meilleure éducation. Nous, les étudiants et les enfants, nous devons améliorer nos connaissances et notre manière de penser”, conclut Kelly Jhoanna.

Un pourcent seulement de ces élèves fait des études supérieures. Ici, on rêve donc d’ouvrir, un jour, une université.

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