Pêche illégale : l'UE salue les progrès de la Thaïlande

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Pêche illégale : l'UE salue les progrès de la Thaïlande
Par Denis LoctierStéphanie Lafourcatère
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L'Union européenne a retiré il y a quelques semaines le carton jaune qu'elle avait attribué à la Thaïlande pour ses pratiques de pêche nuisibles à l'environnement. Résultat des efforts d'ampleur menés par le pays depuis quelques mois. C'est le thème de cette édition d'Ocean.

La pêche illégale peut nuire à l'environnement et aux efforts de préservation et personne ne veut contribuer à cela en achetant du poisson. L'Union européenne importe de très grandes quantités de poissons et fruits de mer de pays comme la Thaïlande dont les pratiques de pêche étaient critiquées jusqu'à il y a peu. Aujourd'hui, ce pays a amélioré ses méthodes et Bruxelles lui a retiré son carton jaune. Cette édition d'Ocean nous montre comment la Thailande a réussi à renverser la situation.

Pendant des années, la surpêche généralisée dans le golfe de Thaïlande a décimé les espèces. Les pêcheurs ne respectaient ni les restrictions, ni les zones réglementées et leurs captures finissaient parfois dans les assiettes des consommateurs européens.

"Je patrouille en mer depuis 30 ans et avant, il n'y avait pas beaucoup de contrôles sur les bateaux de pêche," confirme Jaroonsak Petchsri, chef des patrouilles régionales thaïlandaises pour la pêche. "Les pêcheurs épuisaient la mer, ils capturaient tout - les gros et les petits poissons -, ils pêchaient même pendant les périodes de reproduction ; aujourd'hui, avec les nouvelles règles, les choses ont changé," explique-t-il.

Récemment, le pays a renforcé ses contrôles suite au carton jaune que l'Union européenne lui a attribué en 2015 pour ses mauvaises pratiques, préalable à une éventuelle interdiction d'importation en Europe.

Prasitchai Woraratyanont est capitaine d'un bateau de pêche qui fait l'objet d'un contrôle auquel nous assistons : "Ça me va qu'il y ait des inspections, je suis d'accord : on doit en finir avec toute cette pêche illégale," assure-t-il avant d'ajouter : "Aujourd'hui, on a une balise satellite à bord ; il y a des inspections dans les ports ; tous les jours, on note ce qu'on capture. Donc ça va être vraiment dur de faire de la pêche illégale maintenant !"

Surveillance systématique des comportements et des trajectoires

À 40 km au sud-ouest de Bangkok, Mahachai est l'un des premiers ports de pêche de Thaïlande. Sur place, l'activité tourne à plein pour fournir des produits de la mer essentiels à la cuisine thaïe, assurant ainsi de nombreux emplois à la population locale.

Aujourd'hui, tous les grands navires font un rapport aux autorités avant et après chaque sortie. Les agents utilisent un nouveau logiciel informatique qui intègre des informations détaillées sur tous les bateaux et leurs trajectoires en mer et qui en cas de situation douteuse, est capable de recommander une inspection.

"Pour nous, c'est très important de former les pêcheurs, de leur expliquer les règles qu'ils doivent suivre," insiste Sagultem Peera, responsable du centre d'entrée et de sortie du port de Samut Sakhon. "Ces inspections nous permettent de nous assurer que tout est en ordre en ce qui concerne le navire, l'équipage et les prises réalisées," dit-il.

Un inspecteur grimpe pour vérifier que la balise - le système de surveillance des navires par satellite désormais obligatoire sur tous les bateaux de pêche - n'a pas été trafiquée.

Grâce à ce système, le centre de contrôle du ministère de la pêche à Bangkok qui est opérationnel depuis quelques mois surveille environ 6000 bateaux 24 heures sur 24.

"On reçoit des données sur la vitesse et la direction de chaque bateau en temps réel : quand un chalutier ralentit et qu'il pêche dans une zone où il y a des restrictions, on lance la procédure pour l'intercepter," décrit Bundit Kullavanijaya, chef du groupe de travail dédié au système de surveillance des navires par satellite au ministère thaïlandais de la pêche.

Près de 20% des captures mondiales sont illégales

Les douanes ont aussi renforcé leurs contrôles : les containers de poisson congelé sont désormais inspectés aux rayons X et équipés de verrous électroniques sécurisés.

Auparavant, les captures illégales opérées dans d'autres pays pouvaient transiter par la Thaïlande avant d'être envoyées en Europe. Le carton jaune européen avait aussi pour but d'y mettre un terme.

"La Thaïlande sous la pression de l'Union européenne améliore la situation," fait remarquer notre journaliste Denis Loctier. "Mais il y a bien d'autres pays confrontés à de mauvaises pratiques de pêche : on estime que près 20% des captures mondiales sont illégales, non déclarées et non réglementées pour une valeur de 10 milliards d'euros par an," indique-t-il.

"Blanchiment" de poissons

Souvent, des cargos réfrigérés déchargeaient en Thaïlande, les captures réalisées dans les eaux d'autres pays par de petits bateaux illégaux.

Des usines thaïlandaises transformaient ces poissons avant de les envoyer à l'export. Ce qui revenait à faire du "blanchiment de poissons".

Aujourd'hui, en vertu d'un accord international signé par les autorités thaïlandaises, les navires battant pavillon étranger ne sont plus autorisés dans les ports du pays s'ils ne sont pas dûment certifiés.

"Maintenant que nos réglementations ont été modifiées, on peut inspecter les navires étrangers," déclare Jamaree Rakbangleam, inspectrice. "Le contrôle est très approfondi : on peut tracer chaque boîte de thon pour remonter au navire qui a pêché ce thon," affirme-t-elle.

Début janvier, l'Union européenne a reconnu les efforts de la Thaïlande en retirant son carton jaune.

Selon les responsables thaïlandais, cet avertissement les a aidés à mener ces réformes et à convaincre les pêcheurs de leur nécessité.

"L'Union européenne en tant que premier importateur mondial de poissons et de fruits de mer s'est servie de sa puissance pour résoudre le problème," souligne Adisorn Promthep, directeur général du ministère thaïlandais de la pêche, avant d'ajouter : "C'est pour cela qu'on ne se plaint pas de ce carton jaune : il a été pour nous, un signal d'alarme dans la mesure où on nous a dit : "OK, vous savez quel est le problème, maintenant, il faut vous réveiller et faire des changements importants."

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