Procès des indépendantistes catalans à Madrid : historique mais explosif

Procès des indépendantistes catalans à Madrid : historique mais explosif
Par Joël Chatreau
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Le procès de 12 dirigeants indépendantistes catalans qui s'ouvre à Madrid divise une fois encore les Espagnols car il est controversé. Pour les partisans de l'indépendance, il est avant tout politique. Et pour les juristes, les accusations de "rébellion" et de "violence" seront difficiles à prouver.

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Le procès est historique, c'est le plus important et en même temps le plus controversé en Espagne depuis le rétablissement de la démocratie, après la mort du dictateur Franco en 1975. 12 dirigeants du mouvement indépendantiste en Catalogne sont assis sur le banc des accusés devant la Cour suprême à Madrid. Ils sont tous poursuivis pour "rébellion", et la moitié d'entre eux, également pour "détournement de fonds publics". L'Etat espagnol estime qu'en organisant un référendum d'autodétermination le 1er octobre 2017, puis en proclamant l'indépendance le 27 du même mois, ils ont enfreint gravement l'interdiction absolue de Madrid.

Vous pouvez suivre une partie de l'audience en direct grâce au journal espagnol El Pais :

Afin de mieux comprendre l'enjeu de ce procès, le mieux est de passer en revue les différents protagonistes et de décortiquer les chefs d'accusation :

L'ancien président du gouvernement régional catalan, Carles Puigdemont, échappe au jugement car il est exilé en Belgique, et les Espagnols ne jugent pas un accusé absent en cas de délit grave.

Du coup, c'est son ex-bras droit, qui était vice-président de l'exécutif à Barcelone, Oriol Junqueras, âgé de 49 ans, qui se retrouve au centre du procès. Il risque jusqu'à 25 ans de prison. Il est déjà en détention provisoire depuis 14 mois, comme huit autres des prévenus.

A ses côtés comparaît l'ancienne présidente du parlement catalan, Carme Forcadell, 63 ans. Il lui est notamment reproché d'avoir lu la proclamation d'indépendance. Les très influentes associations indépendantistes ANC et Omnium Cultural sont aussi particulièrement visées. Sont jugés Jordi Cuixart, 43 ans, l'ex-président de ces organisations, et Jordi Sanchez, 54 ans, l'ex-vice-président. Les trois accusés risquent jusqu'à 17 ans de détention.

Des peines de 16 ans de prison ont d'autre part été requises par le parquet espagnol contre cinq anciens ministres du gouvernement catalan, dont Joaquim Forn, qui avait autorité sur la police régionale accusée d'avoir laissé s'organiser le référendum sur l'indépendance. 7 ans de réclusion ont été requis contre trois autres ex-ministres.

Une première manifestation s'est déroulée aux abords du tribunal (ci-dessous) : des responsables indépendantistes criant "La liberté pour les prisonniers politiques !"

"Rébellion", "violences", difficile à prouver

La grande question qui va se poser devant la Cour suprême est : y-a-t-il eu des violences au cours de la proclamation de l'indépendance de la Catalogne ? C'est là que le bât blesse. Le chef d'accusation de "rébellion" caractérise, selon le Code pénal espagnol, le fait de se "soulever violemment et publiquement". Mais les indépendantistes catalans contestent vivement ce soulèvement présumé.  

Le parquet s'appuie sur les "violents incidents", selon lui, qui avaient émaillé la manifestation du 20 septembre 2017, et des "actes de violence et d'agression contre les forces de l'ordre" qui auraient eu lieu lors du référendum du 1er octobre. La seule violence, rétorquent les militants catalans, a été celle des policiers. La preuve, des images ont été vues dans le monde entier et ont choqué nombre de gens.

En tout cas, les juristes sont extrêmement divisés, tellement d'ailleurs que le représentant des intérêts de l'Etat espagnol a finalement décidé de n'accuser les prévenus que de "sédition". Il réclame des peines moins lourdes, de 12 ans de prison maximum.

Que l'on plaide en faveur du pouvoir espagnol ou au contraire du camp indépendantiste, une chose est certaine : la question catalane échauffe toujours autant les esprits et divise réellement le pays. Et cela n'est pas prêt de s'arrêter, le procès doit durer près de trois mois...

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