La Chine veut imposer une loi anti-dissidence à Hong Kong

Des élus pro-démocratie protestant contre la tentative de Pékin de restreindre les libertés dans l'ancienne colonie britannique, Hong Kong le 22 mai 2020.
Des élus pro-démocratie protestant contre la tentative de Pékin de restreindre les libertés dans l'ancienne colonie britannique, Hong Kong le 22 mai 2020. Tous droits réservés ANTHONY WALLACE/AFP
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Par Vincent Coste avec AFP
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Un projet de loi visant à restreindre les libertés dans l'ancienne colonie britannique à été déposé lors de la session annuelle de l'Assemblée nationale populaire. A Hong Kong, les partisans de la démocratie ont rapidement dénoncé un nouveau "tour de vis" de Pékin.

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Pékin reprend la main, alors que les tentatives du pouvoir local ont échoué pour faire adopter une législation pour restreindre l'autonomie et les libertés dont jouissent les habitants de Hong Kong en vertu du principe "Un pays, deux systèmes". Dans l'ancienne colonie britannique, les partisans pro-démocratie ont dénoncé l'une des pires attaques menée contre l'autonomie du territoire.

La Chine hausse donc le ton face au courant anti-Pékin à Hong Kong. Une proposition de loi sur la "sécurité nationale" destinée au territoire semi-autonome a été déposé ce vendredi matin à l'ouverture de la session annuelle de l'Assemblée nationale populaire (ANP), le Parlement chinois.

Ce texte, qui vise à interdire "la trahison, la sécession, la sédition (et) la subversion" dans l'ancienne colonie britannique, a suscité une vague d'indignation à Hong-Kong. De nombreux appels à la manifestation ont rapidement été lancés.

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Des manifestants à Hong Kong déconnant le projet de loi de Pekin, le 22 mai 2020.ANTHONY WALLACE/AFP

Et déjà ce vendredi, de nombreux manifestants se sont retrouvés dans les rues de Hong Kong pour dénoncer le "tour de vis" voulu par Pékin. Des élus pro-démocratie ont également vivement réagi dans l'enceinte du parlement local (cf. photo d'illustration de l'article) en brandissant des pancartes pour protester contre la volonté chinoise de restreindre l'autonomie du territoire .

Ce texte intervient après des mises en garde répétées du pouvoir communiste chinois contre toute dissidence à Hong Kong, secouée l'an dernier par sept mois de manifestations monstres en faveur de la démocratie. D'abord dirigées contre la mainmise jugée grandissante de Pékin sur le territoire, elles s'étaient muées en demande d'autonomie supplémentaire.

Le mouvement a donné lieu à des affrontements violents entre policiers et radicaux, ainsi qu'à de nombreux actes de vandalisme. Il a également stimulé un courant militant pour l'auto-détermination voire l'indépendance de la région.

"La fin de Hong Kong"

Cette annonce de Pékin pourrait raviver la colère des Hongkongais après des mois de calme, en raison notamment des mesures prises pour endiguer l'épidémie de coronavirus.

"Je veux juste dire à la communauté internationale que ceci est la fin de Hong Kong", a réagi jeudi soir depuis le territoire semi-autonome le député pro-démocratie Dennis Kwok, accusant Pékin d'avoir "rompu sa promesse".

Pour le militant Joshua Wong, figure du Mouvement des parapluies en 2014, le message envoyé par la Chine aux manifestants pro-démocratie ne laisse aucune place au doute. "Pékin essaie de faire taire par la force et la peur les voix des Hongkongais qui critiquent", a déclaré M. Wong sur Twitter.

Selon Joshua Wong et d'autres militants, la décision de Pékin de faire adopter ce texte par le Parlement chinois est un moyen de contourner le Parlement hongkongais.

Très vite, sur les forums de discussions et sur les messageries utilisées par le mouvement pro-démocratie, les appels à manifester se sont multipliés. "Les habitants de Hong Kong devront faire face à un choix concernant leur avenir", soulignait un message appelant, sur l'application Telegram, les Hongkongais à se rassembler dimanche.

Une application de la loi "dès que possible"

Peu de temps après le dépôt du projet de loi à Pékin, la cheffe de l'exécutif de Hong Kong, Carrie Lam, s'est dite prête vendredi à "coopérer pleinement" avec la Chine afin d'appliquer "dès que possible" la loi sur la sécurité nationale que le régime chinois entend imposer au territoire autonome.

"Un pays, un système"

Une ligne rouge pour Pékin, depuis longtemps frustré de l'incapacité du gouvernement hongkongais à faire adopter une loi anti-subversion au niveau local.

"Hong Kong est une partie inséparable de la République populaire de Chine", a encore martelé jeudi le porte-parole de l'Assemblée nationale populaire, Zhang Yesui, alors qu'il était en train d'annoncer à la presse le projet de loi sur la "sécurité nationale".

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Conférence de presse virtuelle du porte-parole de l'Assemblée nationale populaire, à Pékin le 21 mai 2020.LEO RAMIREZ/AFP

Hong Kong jouit d'une très large autonomie par rapport au reste du pays dirigé par le Parti communiste Chinois. Ses habitants bénéficient ainsi de la liberté d'expression, de la liberté de la presse et d'une justice indépendante. Des droits inconnus en Chine continentale.

Ce nouveau projet de loi "me donne le sentiment que c'est le concept 'Un pays, un système' qui est désormais officiellement mis en place à Hong Kong", a ironisé la député pro-démocratie hongkongaise Tanya Chan.

De précédentes tentatives avortées

Ce n'est pas la première fois que les autorités centrales tentent d'imposer une telle législation à Hong Kong, qui doit théoriquement jouir de son régime de semi-autonomie 50 ans après le transfert de souveraineté du Royaume-Uni à la République populaire de Chine, soit jusqu'à au moins en 2047.

Hong Kong, depuis son passage sous la bannière chinoise, est encadré par sa "Loi fondamentale", qui sert de facto de constitution au territoire. Ce texte fête cette année les 30 ans de son adoption et est entré en vigueur dès la rétrocession du territoire à la Chine le 1er juillet 1997.

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L'article 23 du texte prévoit que la région se dote d'une loi interdisant "la trahison, la sécession, la sédition et la subversion". Mais la clause n'a jamais été appliquée. Car une grande partie de la population hongkongaise y voit une menace pour ses libertés.

La dernière tentative de mise en oeuvre de l'article 23, en 2003, avait échoué face à des manifestations monstres dans les rues hongkongaises.

Le projet de loi controversé a été remis sur la table ces dernières années à mesure que les mouvements "localiste" (demandant la préservation de l'autonomie et de l'identité locale hongkongaise) et indépendantiste ont gagné du terrain.

Lors des dernières élections locales en novembre 2019, les candidats pro-démocratie ont décroché une large victoire, véritable camouflet pour la cheffe de l'exécutif local, Carrie Lam, et pour les autorités chinoises.

Forte baisse de la bourse de Hong Kong

La bourse de Hong Kong a plongé ce vendredi de plus de 4% lors de la première séance après que la Chine a annoncé son projet d'introduire une loi sur la "sécurité nationale" dans le territoire semi-autonome.

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