Pêche : l'Etat français condamné pour la capture accidentelle de dauphins

Carcasses de dauphins communs évacuées des plages de Vendée
Carcasses de dauphins communs évacuées des plages de Vendée Tous droits réservés Observatoire PELAGIS/G.Doremus
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Par Vincent Coste avec AFP
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Chaque année, des centaines de cétacés meurent, victimes de la pêche au chalut pélagique. La justice française a enjoint Paris de mettre en "œuvre des mesures visant à assurer le maintien ou le rétablissement des espèces protégées". La France fait aussi l'objet d'une procédure au niveau européen.

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C'est une victoire pour Sea Shepherd. L'ONG, spécialisée dans la préservation des océans, a en effet fait condamner l'Etat français pour manque de protection des dauphins face aux activités de pêche en Atlantique, considérées comme responsables de la mort de centaines de ces mammifères marins protégés, pris chaque année accidentellement dans les filets.

Dans un jugement du 2 juillet, le tribunal administratif de Paris a ainsi estimé que l'Etat avait "tardé à mettre en œuvre des actions concrètes au regard du constat d'épisodes récurrents, depuis les années 1990, accentués depuis 2016, de surmortalité de cétacés sur la façade atlantique, en particulier dans le golfe de Gascogne", manquant ainsi à ses obligations face à la législation européenne.

Le tribunal a notamment relevé que "les épisodes d'échouage de plus d’une centaine de cétacés (...) très supérieurs à la norme saisonnière et concentrés sur la période hivernale, sont régulièrement constatés depuis les années 1990, sur la façade atlantique, soit en moyenne plus de 900 par an, et en forte augmentation depuis 2016" et que "certains de ces animaux portent des traces laissant suggérer des captures par engins de pêche".

Mais les cétacés échoués sur le littoral français dans son ensemble (1 642 en 2017, 1 383 en 2018) ne représentent qu'une partie des pertes : entre 3 500 et 4 000 dauphins communs seraient morts en mer par capture accidentelle dans le golfe de Gascogne lors des hivers 2017 et 2018, voire jusqu'à jusqu’à 10 000 selon les estimations hautes de l’observatoire scientifique Pelagis, note le tribunal.

Crédit : Observatoire PELAGIS/C.Dars
Carcasses de dauphins communs évacuées des plages de VendéeCrédit : Observatoire PELAGIS/C.Dars

Bien que le ministère français de la Transition écologique ait fait valoir qu'aucune donnée scientifique à ce jour "ne permet d’établir un lien avéré entre les mortalités des cétacés et un type de pêcherie en particulier", il reconnaît qu’il existe au moins "une corrélation spatiale entre les activités de certaines pêcheries et la population de dauphins communs", ajoute la décision du tribunal.

"Nous souhaitons attirer l'attention de la nouvelle ministre de la Transition écologique Barbara Pompili sur l'aspect fondamental de la préservation des dauphins en France et sur la nécessité de mettre en place des mesures urgentes et efficaces pour stopper l'hécatombe", a commenté dans un communiqué la présidente de Sea Shepherd France, Lamya Essemlali.

L'ONG qui, chaque hiver, patrouille dans le golfe de Gascogne pour filmer les dauphins piégés dans les chaluts, estime notamment que les répulsifs acoustiques installés sur certains navires pour éloigner les cétacés sont un "leurre" et réclame purement et simplement l'interdiction de la pêche dans la zone Natura 2000 de la région.

Mais le tribunal administratif a rejeté cette requête. Il a estimé que le plan de protection des cétacés adopté par le gouvernement fin 2019, qui prévoit notamment l'installation de répulsifs acoustiques sur les engins de pêche, était de nature à pallier la "carence" constatée.

Sea Shepherd a, en outre, rappelé avoir lancé avec d'autres ONG une procédure au niveau européen contre la France et d'autres pays. Une démarche qui a porté ses fruits puisque la Commission européenne a demandé "instamment", le 2 juillet dernier, à la France, à l'Espagne et à la Suède "de prendre des mesures pour réduire les prises accessoires" de dauphins.

Observatoire PELAGIS
Dauphin commun échoué à Talmont Saint Hilaire, département de la Vendée, avec fracture d'une mandibuleObservatoire PELAGIS

Bruxelles a donc ouvert une procédure d'infraction dans ce dossier. Paris, Madrid et Stockholm ont trois mois pour remédier aux problèmes identifiés, sous peine d'un deuxième avertissement. In fine, la procédure peut déboucher sur la saisine de la Cour de justice de l'UE.

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