Tunisie : le président dissout le controversé Conseil Supérieur de la Magistrature

Le président tunisien Kaïs Saïed, le 20 septembre 2021 à Sidi Bouzid, Tunisie
Le président tunisien Kaïs Saïed, le 20 septembre 2021 à Sidi Bouzid, Tunisie Tous droits réservés Slim Abid/AP
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Par Stephane HamalianEuronews avec AFP
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Tunisie | Selon les observateurs, en dissolvant le Conseil supérieur de la magistrature, Kaïs Saïed vise le parti d'inspiration islamiste Ennahdha.

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Le président tunisien Kaïs Saïed a annoncé samedi soir la dissolution du Conseil supérieur de la magistrature (CSM), un organe créé en 2016 pour garantir l'indépendance de la justice.

L'homme fort de Tunis dénonce une instance corrompue et partiale, qui aurait notamment ralenti l'enquête sur l'assassinat, en 2013, du militant de gauche Chokri Belaïd.

"Malheureusement, certains juges dans les tribunaux ont manipulé l'affaire. [...] Ce n'est pas le premier procès où ils ont essayé de cacher la vérité pendant des années" a-t-il dénoncé dans une vidéo diffusée dans la nuit de samedi à dimanche.

"Le CSM appartient au passé", a-t-il ajouté.

Ennahdha, bête noire de Kaïs Saïed

Ce dimanche marquait justement le neuvième anniversaire de la mort de Chokri Belaid. Plusieurs centaines de personnes s'étaient rassemblées à Tunis pour lui rendre hommage, beaucoup saluant la décision de Kaïs Saïed.

Présent à la manifestation, le frère de Chokri Belaïd, Abdelmajid, a applaudi la dissolution du CSM, accusant auprès de l'AFP, le parti Ennahdha d'avoir "manipulé et ralenti depuis neuf ans" l'enquête "pour dissimuler les preuves de l'implication des dirigeants d'Ennahdha."

Des islamistes extrémistes avaient revendiqué le meurtre, ainsi que celui de Mohamed Brahmi, ce qui avait provoqué une crise politique et débouché sur le retrait provisoire du pouvoir du parti d'inspiration islamiste Ennahdha puis la formation d'un gouvernement de technocrates entre 2013 et 2014.

Selon les observateurs, en démantelant le CSM, le président tunisien vise surtout, sans le citer, le parti Ennahdha, sa bête noire, qui a contrôlé le Parlement et les gouvernements ces dix dernières années après la chute de Ben Ali, et qui aurait une forte influence sur ce Conseil.

Kaïs Saïed concentre tous les pouvoirs

Dénonçant auprès de l'AFP une "décision (qui) touche à l'indépendance de la justice", le porte-parole d'Ennahdha, Imed Khemiri, a déploré "un précédent grave que la Tunisie n'a jamais eu à subir y compris du temps de la dictature" de Zine El Abidine Ben Ali (1987-2011).

Pour le politologue Abdellatif Hannachi, "la justice, qui n'a pas été capable de se réformer ni de trancher dans les grands dossiers, a fourni une occasion idéale" au président Saied pour taper du poing sur la table "comme il l'a fait le 25 juillet" quand il avait justifié son coup de force par des blocages socio-économiques et politiques. Il concentre, depuis cette date, tous les pouvoirs.

La dissolution du CSM a été critiquée par la Commission internationale des juristes (ICJ), qui dit craindre pour la séparation des pouvoirs en Tunisie.

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