Guerre en Ukraine: en Norvège, les bénéfices issus des énergies fossiles ont triplé en 2022

Plateforme d'utilisation de gaz au large des côtés norvégiennes
Plateforme d'utilisation de gaz au large des côtés norvégiennes Tous droits réservés Haekon Mosvold Larsen/AP
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Par Hans van der Brelie
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Plusieurs pays, notamment la Pologne, ont reproché à la Norvège de faire des bénéfices "sur le dos des Ukrainiens".

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"Le malheur des uns fait le bonheur des autres" : cette expression de Voltaire est particulièrement adéquate pour décrire la situation économique actuelle de la Norvège. Depuis le début de l'invasion russe de l'Ukraine, le 24 février 2022, les exportations de gaz et de pétrole ont triplé... et avec elles, les bénéfices du pays. 

Des bénéfices qui posent problème

Cette année, les revenus issus des exportations de pétrole et de gaz norvégien ont atteint des records: 97 milliards de dollars en six mois – 3 fois plus que l’année dernière. Les profits du géant pétrolier Equinor, détenu à 67% par l'état norvégien, sont passés d'un 1,9 milliard de dollars fin 2021 à 6.8 milliards de dollars au second semestre de 2022. 

La majorité de ces bénéfices sera placé dans le Fond Souverain Norvégien, qui doit permettre au pays de diversifier son économie, tout en sortant progressivement du secteur des énergies fossiles.

Mais plusieurs pays pointent du doigt ces profits, qui posent selon eux des problèmes éthiques. Le Premier Ministre polonais Mateusz Morawiecki accuse Oslo de profiter de la guerre en Ukraine, et demande au gouvernement norvégien de soutenir davantage l'effort de guerre ukrainien: "devrions-nous payer à la Norvège des sommes gigantesques pour du gaz qui coûtait quatre à cinq fois moins il y a un an? C'est de la folie... Les Norvégiens devraient partager ces profits. Ce n’est pas normal, c’est injuste. C'est profiter indirectement de cette guerre commencée par Poutine."

Un point de vue partagé par l'antenne norvégien de l'organisation du Comité d'Oslo. Sa secrétaire générale, Berit Lindeman, explique: "la Norvège réalise 60 milliards de profits supplémentaires sur le gaz et le pétrole en seulement quelques jours… mais Oslo n’a augmenté son soutien à l’Ukraine que d’un milliard d’Euros. Nous pensons qu’avec ces revenus énormes, nous devons faire plus d’efforts, et donner beaucoup plus."

La Norvège réalise 60 milliards de profits supplémentaires sur le gaz et le pétrole en seulement quelques jours… mais Oslo n’a augmenté son soutien à l’Ukraine que d’un milliard d’Euros. Nous pensons qu’avec ces revenus énormes, nous devons faire plus d’efforts
Berit Lindeman
Secrétaire générale de l'antenne norvégienne du Comité d'Helsinki

Cette semaine, le quotidient Dagbladet prenait aussi position: "la Norvège ne peut échapper au fait désagréable: c’est une forme de profit de guerre. (...) Alors que l’Ukraine est en train d’être détruite et que la plupart des autres pays ressentent principalement les effets négatifs de la guerre, comme que la hausse des prix de l’énergie, la hausse des prix des denrées alimentaires et l’inflation générale, nous faisons du profit. Nous devons réfléchir à la façon dont nous dépenserons cet argent."

Cette question divise aussi la société norvégienne: si certains considèrent qu’aider l’Ukraine est un juste retour des choses, d’autres préfèreraient que cet argent soit investi à l’intérieur le pays.

Le Parti vert norvégien a appelé à ce que les milliards de pétrodollars supplémentaires soient placés dans un "fonds de solidarité", à la manière d'un plan Marshall. Il pourrait être utilisé pour financer à la fois l’aide humanitaire et la reconstruction de l’Ukraine, mais aussi aider l’Europe à réduire sa dépendance au gaz russe.

Le gouvernement de centre-gauche a jusqu’à présent promis "jusqu’à" 2 milliards de couronnes (200 millions d’Euros) d’aide humanitaire à l’Ukraine.

Accélération de construction de gazoducs avec plusieurs pays d'Europe

Depuis le mois d'avril, la construction du gazoduc Baltic Pipe, reliant la Norvège à la Pologne en passant par le Danemark a repris. Varsovie espère ainsi commencer importer 10 milliards de m³ de gaz par an via la mer Baltique dès cet automne, avant une mise en service officielle en janvier 2023.

Oslo va également délivrer plus de permis d’exploitation à ses fournisseurs, et en accélérer d’autres constructions de gazoducs vers d’autres pays européens. Un coup de pouce qui peut cependant avoir des conséquences néfastes… et accélérer le changement climatique.

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