A 52 ans, la figure montante de l'opposition a écopé de plus de deux ans de prison et d'inéligibilité pour "insulte à des responsables"
A 52 ans, le charismatique maire d'Istanbul s'est hissé au rang de principal rival au président Recep Tayyip Erdogan à six mois de l'élection présidentielle.
Né en 1970 à Akçaabat près de Trabzon, sur les bords de la mer Noire, dans une famille conservatrice et pieuse, Ekrem Imamoglu partage avec le président Erdogan une passion pour le football, qu'il a pratiqué au niveau amateur avant d'intégrer la direction du club de sa ville natale, Trabzonspor.
Homme d'affaires et habile communicant, il a fait fortune dans le bâtiment avant de se lancer en politique. Membre du CHP, formation laïque fondée par Mustafa Kemal "Atatürk", Ekrem Imamoglu a su séduire et rassembler au-delà de son parti. Il séduit l'électorat kémaliste et nationaliste mais aussi les Kurdes.
Inconnu du grand public, sa carrière et sa notoriété décollent en 2019. Soutenu par le leader du CHP, Kemal Kilicdaroglu, il réussit un coup d'éclat aux municipales d'Istanbul en infligeant sa plus humiliante défaite à l'AKP de Recep Tayyip Erdogan.
"Celui qui tient Istanbul, tient la Turquie"
En mars 2019, il remporte la mairie d'Istanbul, aux mains du parti au pouvoir depuis 2004. Cette victoire est dans un premier temps annulée par le haut conseil électoral. Mais le régime est contraint de s'incliner trois mois plus tard face à la mobilisation de l'électorat qui offre une plus large victoire à l'opposant lors d'un nouveau scrutin.
"Celui qui tient Istanbul, tient la Turquie", a souvent répété l'omnipotent chef de l'Etat, Erdogan dont la métropole a aussi servi de tremplin vers les plus hautes fonctions.
En vue de la présidentielle de juin 2023, Ekrem Imamoglu s'est présenté comme "le soldat le plus apte à représenter la coalition de l’opposition", six partis (CHP, Iyi Parti, DEVA, Gelecek, Saadet, Parti démocrate) bien décidés à mettre un terme au système autocratique d’Erdogan, en présentant un candidat unique.
On ignore encore le nom de celui qui sera désigné comme le candidat unique de l'opposition. Mais le maire d'Istanbul compte parmi une poignée de dirigeants d'opposition que les sondages donnent gagnants face à Recep Tayyip Erdogan, confronté à une grave crise économique et à une inflation exponentielle.
Mercredi, la justice l'a condamné à plus de deux ans de prison pour "insulte à des responsables" et à une interdiction de mandat politique de même durée. Ce dernier a aussitôt décidé de faire appel, suspendant la condamnation. "Ce procès résume la situation de la Turquie", a-t-il réagi, juché sur le toit d'un bus, face à des milliers de personnes rassemblées devant la mairie scandant "Vive la liberté, Mort à la tyrannie !".
Dans un tweet, sa femme Dilek Kaya Imamoglu lui apporte son soutien en citant ses paroles : "J'ai encore la jeunesse avec moi, ma jeunesse. Nous avons encore de grands espoirs. Comme moi, il y a des millions de Turcs qui vont retrousser leurs manches. Il y a une nation turque qui a soif de justice."
A la veille de son procès, il déclarait que ses "épaules sont capables de porter toutes sortes de responsabilité". Reste à savoir quel sera l'épilogue judiciaire après cette nouvelle condamnation.