Selon le procureur général ukrainien Andriy Kostin, neuf prisonniers de guerre ukrainiens sur dix sont soumis à des tortures physiques et morales,
Des tortures physiques et morales, des violences sexuelles, des condamnations illégales et des exécutions violentes. Selon le procureur général ukrainien Andriy Kostin, jusqu'à 90 % des prisonniers de guerre de retour en Ukraine ont déclaré avoir été torturés dans les prisons russes, ce qui constitue une violation flagrante de la troisième convention de Genève dont Moscou est signataire.
Des conditions de détentions inhumaines
Serhii Rotchuk était officier de la brigade ukrainienne d'Azov, qui en mai 2022 a défendu l'usine sidérurgique d'Azovstal à Marioupol. Après l'assaut, près de 2 500 soldats ukrainiens se soient rendus à la Russie sur ordre du président Volodymyr Zelenskyy.
Cet infirmier de combat qui a passé un an en prison en Russie, où il a été soumis à de la torture physique et mentale, témoigne de l'état très dégradé de ses compagnons de captivité : "Presque tous ont manifestement des problèmes de santé. Détenus dans des conditions difficiles, sans soutien médical approprié , ils sont constamment soumis à de la torture, aux brimades et à de la violence physique ou morale." témoigne t-il.
900 soldats de la brigade d'Azov toujours en captivité
Environ 900 soldats de la brigade d'Azov sont toujours en captivité en Russie. Une centaine d'entre eux ont été condamnés à des peines de prison pour ce que les procureurs russes qualifient de "participation à une organisation terroriste".
En raison de liens présumés avec des groupes néonazies et ultra-nationalistes, cette brigade a été privée d'armes et de formation venant de l'occident. Les États-Unis ont levé cette interdiction en juin dernier, déclarant qu'un processus de vérification n'avait pas permis de trouver des preuves de violations flagrantes des droits de l'homme.
"Qui sait ? Si cette interdiction n'avait pas existé pendant dix ans, peut-être que la bataille pour Marioupol aurait été différente ? Peut-être que la carte de la guerre serait différente aujourd'hui ? s'interroge Nestor Barchuk, conseiller juridique de la brigade.
Moscou ne donnant aucun espoir de changer de politique à l'égard des prisonniers de guerre ukrainiens, Nestor Barchuk estime que l'Ukraine doit se battre pour libérer les hommes et les femmes emprisonnés. "Le seul moyen pour l'Ukraine de ramener tous ses défenseurs chez eux est de gagner la guerre", argue t-il.
Violation de la 3ème Convention de Genève
Sur les quatre Conventions de Genève, la troisième définit les règles spécifiques au traitement des prisonniers de guerre. Elle stipule que ceux-ci doivent être traités avec humanité, logés de manière adéquate et recevoir suffisamment de nourriture, de vêtements et de soins médicaux.
Toujours selon ce texte, les activités humanitaires, y compris celles de la Croix-Rouge internationale (CICR) ou de toute autre organisation humanitaire impartiale pouvant protéger et soulager les prisonniers de guerre, ne doivent pas être entravées.
Si la CICR affirme avoir rendu visite à près de 3 500 prisonniers de guerre en Ukraine et en Russie, il admet qu'"à ce jour, elle n'a pas accès à tous les prisonniers de guerre".
L'attente du retour des prisonniers de guerre
Les soldats ukrainiens revenus de leur captivité en Russie et les familles de ceux toujours détenus disent n'avoir aucun contact avec les prisonniers de guerre. Sans aucune information, ils ne savent pas même si ces derniers sont encore en vie et n'ont d'autres options que d'attendre qu'ait lieu un échange de prisonniers.
Yevheniia Synelnyk n'a pas eu de nouvelles de son frère Artem depuis deux ans. Celui-ci faisait partie des défenseurs de Marioupol. Les dernières informations lui ont été donné par des prisonniers de guerre rentrés en Ukraine et qui ont rencontré Artem pendant sa captivité. D'après eux, celui-ci a été transféré dans une prison à Taganrog, une ville de la région russe de Rostov, où les conditions de détention sont jugées épouvantables.
Yevheniia est membre de l'Association des familles des défenseurs d'Azovstal, créé en juin 2022, un mois après le siège d'Azovstal. La porte-parole de l'association, Marianna Khomeriki, déplore que les organisations internationales n'en fassent pas assez.
Le seul espoir des familles reste que les forces ukrainiennes "reconstituent un fonds" en faisant des prisonniers parmi les soldats russes pour pouvoir les échanger, explique t-elle : "Nous pouvons utiliser ce fonds pour sauver la vie et la santé de nos militaires capturés par les Russes".
Marianna Khomeriki ne se fait cependant pas trop d'illusions : "Poutine ne veut pas récupérer son peuple". Depuis le début de l'incursion à Koursk, seul un échange de prisonniers de guerre a eu lieu entre des soldats tchétchènes de Ramzan Kadyrov et ceux de Marioupol.
Des exécutions préméditées
Jeudi dernier, les forces russes ont exécuté neuf prisonniers de guerre ukrainiens près du village de Zeleny Shlyakh, dans la région de Koursk, selon des enquêtes ukrainiennes menées à partir de sources ouvertes.
Le groupe de réflexion américain Institute for the Study of War a analysé une image des suites de l'exécution, affirmant que "cela suggère que les forces russes ont désarmé, aligné, dépouillé et abattu les prisonniers de guerre ukrainiens, et indique clairement la nature préméditée des exécutions".
L'ISW déclare avoir récemment observé une augmentation des exécutions de prisonniers de guerre ukrainiens par les forces de Moscou, ajoutant que les officiers commandants russes tolèrent, encouragent ou ordonnent directement ces exécutions.
Selon Serhii Rotchuk, le soldat de la brigade Azoz, l'armée russe n'en fait pas mystère. "La propagande russe vise à inciter à la haine envers les Ukrainiens. La politique de l'État consiste à détruire tout ce qui n'est pas russe. Et si quelqu'un ne veut pas, si quelque chose ne veut pas être russe, ou si quelqu'un ne veut pas être russe, appartenir à la Russie, il doit mourir."