"La peur est devenue omniprésente"

Un véhicule se rend sur le site de l'explosion d'un missile en Pologne
Un véhicule se rend sur le site de l'explosion d'un missile en Pologne Tous droits réservés AP Photo
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Par Stefan GrobeEuronews
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La chute d’un missile dans un village polonais situé à quelques kilomètres de la frontière ukrainienne a mis en état d’alerte le continent européen et les services diplomatiques internationaux.

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L’explosion d’un missile en Pologne a soufflé un vent de panique sur le continent européen. L’incident, qui a provoqué la mort de deux personnes, a fait craindre un élargissement de la guerre en Ukraine. Selon les premiers éléments de l’enquête il pourrait s’agir d’un missile de défense aérienne ukrainien.

Pour évoquer cette atmosphère de peur, Euronews a interrogé Franck Furedi, professeur émérite de sociologie à l'Université du Kent.

Euronews :

Comment la peur est devenue une question centrale en Europe ?

Franck Furedi :

Je pense que ce qui est intéressant, c'est que la peur est devenue omniprésente. Et beaucoup de gens pensent que seules certaines personnes sont craintives parce qu'elles vivent dans des circonstances difficiles. Beaucoup d'autres disent que les gens en Europe de l’Est, dans les Balkans ou dans les pays baltes ont peur à cause de la Russie. Mais ce que je trouve intéressant c'est que peu importe la classe à laquelle vous appartenez, même si vous êtes riche, même si vous êtes en haut de l'échelle économique, vous êtes tout aussi anxieux et, à bien des égards, souvent plus anxieux à propos de l'avenir que le reste de la société.

Euronews :

De quoi les gens ont-ils le plus peur ?

Franck Furedi :

Lorsque l'on interroge les personnes et lorsque nous regardons les sondages menés dans différents pays, le genre de chose qui les inquiète sont des questions quotidiennes. Vais-je avoir une bonne retraite ? Est-ce que mon enfant aura un emploi ? Ces questions ont trait à leur situation financière et, en fin de compte, à leur sécurité quotidienne de base. Et c'est vraiment ce qui inquiète les gens. Ce ne sont pas les titres de l'actualité. J'étais vraiment surpris parce que presque personne auprès de qui j'ai parlé se disait inquiet à propos du terrorisme par exemple.

Euronews :

Vous affirmez qu'il y a une crise de santé mentale en Europe et une désorientation généralisée des citoyens. Comment en est-on arrivé là ?

Franck Furedi :

Je pense que les questions de santé mentale sont souvent confuses parce que c'est un moyen par lequel nous exprimons d'autres problèmes. Et je pense que la grande difficulté en Europe en ce moment est ce que j'appellerais une crise de sens, où les gens ne sont pas vraiment sûrs des valeurs qu'ils veulent vivre et de celles qu'ils veulent transmettre à leurs enfants. Quand on n'est pas vraiment sûr, quand il n'y a pas de lignes directrices claires concernant l'avenir, on est très souvent désorienté. Et cela s'exprime par des formes d'anxiété qui peuvent aussi être médicalisées et considérées comme des problèmes de santé mentale. Mais je soutiens que le vrai problème est ce qui le sous-tend, à savoir une crise de sens.

Euronews :

Pour terminer sur une note optimiste. Y a-t-il quelque chose qui puisse nous donner de l'espoir pour sortir de cette crise ?

Franck Furedi :

Je pense que la chose essentielle pour la plupart d'entre nous est de faire l'expérience de la solidarité, de sentir qu'il y a des gens qui veillent sur nous. A bien des égards, nous apprenons de l'expérience de l'Ukraine, car quoi que vous pensiez de la guerre en Ukraine, il est intéressant de voir comment, presque du jour au lendemain, les Ukrainiens se sont rassemblés et ont démontré que malgré leurs différences, ils pouvaient agir comme une véritable communauté. Et pour moi, la grande leçon que l'Europe doit tirer de la guerre en Ukraine n'est pas seulement la guerre. Il s'agit du fait que vous et moi, là où nous vivons dans nos sociétés, devons commencer à nous appuyer sur cette expérience et à trouver nos propres moyens de communiquer l'idée de solidarité. Et ce sera la solution à beaucoup de nos problèmes.

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