Eva Kaili est un "trophée ou un symbole" pour la justice belge

L'eurodéputée Eva Kaili
L'eurodéputée Eva Kaili Tous droits réservés European Union, 2022.
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Par Maria PsaraJorge Liboreiro
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Sven Mary, l'avocat de l'ancienne vice-présidente du Parlement européen, plaide pour la libération d'Eva Kaili.

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Eva Kaili, l'eurodéputée grecque au centre du scandale de corruption qui secoue le Parlement européen, n'avouera pas pour sortir de prison. Son avocat, Sven Mary, insiste sur son innocence et accuse les autorités belges de la garder derrière les barreaux comme un "trophée".

"Il est grand temps que Mme Kaili soit libérée et que sa présomption d'innocence soit respectée", déclare Sven Mary à Euronews lors d'une interview exclusive.

"Il n'y a plus aucune raison de maintenir Mme Kaili en prison", affirme-t-il.

Eva Kaili est en détention provisoire depuis son arrestation le 9 décembre. Elle aurait été prise sur le fait et son immunité parlementaire a été immédiatement levée.

L’élue de 44 ans a par la suite été mise en examen pour participation à une organisation criminelle, corruption et blanchiment d'argent.

Son arrestation a provoqué une onde de choc à Bruxelles et a mis en lumière une vaste enquête sur un système d'échange en espèces qui impliquerait de "grosses sommes d'argent" qui auraient été versées par le Qatar et le Maroc afin d'influencer l'élaboration de la politique européenne.

Les deux pays nient toute malversation.

Eva Kaili a été démise de ses fonctions de vice-présidente du Parlement européen et son adhésion au groupe social-démocrate a été suspendue.

"Des cas comme celui de Mme Kaili sont considérés comme un trophée ou un symbole et sont présentés comme la Coupe du monde", souligne son avocat.

La parlementaire est brandie pour dire : "Même si vous occupez de hautes fonctions, vous resterez en prison (...) Ne commettez pas de corruption car vous irez en prison pour une longue période", estime l’avocat.

Dans le cadre de l'enquête en cours, cinq personnes ont été arrêtées et restent mises en examen : Eva Kaili, son compagnon Francesco Giorgi, l'ancien député européen Pier Antonio Panzeri, le directeur d’une ONG Niccolò Figà-Talamanca et l'eurodéputé belge Marc Tarabella.

Tous ont été ou seront libérés de prison, sauf Eva Kaili.

"Je ne comprends plus aujourd'hui la raison de la détention préventive, surtout lorsque deux personnes sont libérées : Panzeri, le chef de l'organisation criminelle, et son bras droit, Francesco Giorgi. Ces deux personnes ont avoué avoir commis des crimes de corruption", précise Sven Mary.

"Cette détention préventive est un moyen de pression pour obtenir des aveux. Et je le dis clairement : il n'y aura pas d'aveux de la part de Mme Kaili. Il n'y en aura pas puisqu'elle n'a commis aucun acte répréhensible".

Le parquet fédéral belge a refusé de commenter les accusations de l'avocat.

"Nous allons faire valoir notre point de vue devant le tribunal", a déclaré un porte-parole.

Une "vision tunnel"

Dans l'entretien qu'il a accordé à Euronews mardi à son bureau de Bruxelles, Me Mary a défendu à plusieurs reprises l'innocence de sa cliente et a affirmé que l'enquête n'avait pas apporté de nouvelles preuves justifiant le maintien en prison d’Eva Kaili.

Selon l'avocat, l’eurodéputée a passé les deux dernières semaines à répondre pendant près de 15h à "toutes les questions" posées par les enquêteurs.

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"Ils veulent entendre certaines réponses, mais ce ne sont pas celles que donne Mme Kaili. Et quand Mme Kaili ne donne pas les réponses qu'ils veulent entendre, eh bien, ce n'est pas bon", explique Sven Mary qui accuse les autorités belges de souffrir d'une "vision tunnel".

Sven Mary s'est montré particulièrement critique à l'égard de Pier Antonio Panzeri, le cerveau présumé du système de corruption, qui a conclu un accord avec le procureur dans lequel il admet sa participation criminelle à des actes de corruption et accepte de partager des détails "révélateurs".

"J'ai de gros doutes sur le fait que M. Panzeri dise vraiment la vérité. Il dit sa propre vérité. C'est toute une différence", juge l’avocat.

Selon Sven Mary, la détention d’Eva Kaili ne repose que sur deux éléments : les aveux de Pier Antonio Panzeri et l'appel téléphonique qu’elle a passé à son père, Alexandros Kailis, le 9 décembre, lorsqu'elle lui aurait demandé de retirer les sacs d'argent qu'elle venait de trouver dans son appartement.

Le père a été surpris à l'hôtel Sofitel en train de transporter une valise contenant 150 000 euros en liquide, mais il a été libéré plus tard sans mise en examen.

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Depuis son arrestation, Eva Kaili a fait l'objet de plusieurs audiences devant le tribunal de Bruxelles, mais sa libération n'a jamais été accordée, malgré les appels de son équipe d'avocats: Sven Mary et Michalis Dimitrakopoulos.

L’ancienne vice-présidente du Parlement sera de nouveau entendue jeudi. Sven Mary prévoit de demander sa libération sous conditions, mais pas nécessairement sous surveillance électronique.

Francesco Giorgi, le compagnon d’Eva Kaili, avec qui elle a une fille de deux ans, a été libéré fin février avec un bracelet électronique.

Francesco Giorgi a travaillé comme assistant parlementaire, d'abord pour Pier Antonio Panzeri, puis pour Andrea Cozzolino, un député européen socialiste qui est également soupçonné d'avoir participé au système d'échange d'argent contre des faveurs et qui s’oppose actuellement à son extradition de l'Italie vers la Belgique.

"Va-t-elle vivre sous le même toit que Francesco Giorgi ? Il est son partenaire, le père de son enfant et ils sont tous les deux propriétaires de la maison. Je suppose donc qu'ils vivront dans la même maison", estime Sven Mary à propos de la libération hypothétique de la parlementaire.

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"Il ne l'a jamais accusée de quoi que ce soit, contrairement à M. Panzeri."

Interrogé sur les sentiments d’Eva Kaili à l'égard de son compagnon après tous les rebondissements du scandale, Sven Mary répond par un dicton : "On ne lave jamais son linge sale en public".

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