L'ancien président français s'est vu retirer la plus haute distinction nationale après avoir été condamné à un an de prison ferme pour corruption et trafic d'influence dans l'affaire aussi connue sous le nom "Paul Bismuth".
L'ancien président français Nicolas Sarkozy a été privé dimanche de sa Légion d'honneur, conformément au code de la plus haute distinction nationale, suite à sa condamnation à trois ans de prison, dont un ferme, dans l'affaire des écoutes.
Patrice Spinosi, l'avocat de Nicolas Sarkozy dans ce dossier, déclare que l'ancien président "prend acte de la décision prise par le Grand Chancelier", affirmant qu'"il n’a jamais fait de cette question une affaire personnelle".
Au mois de décembre, Nicolas Sarkozy a été reconnu coupable d'avoir, avec l'aide de son avocat Thierry Herzog, noué un "pacte de corruption" avec un magistrat de la Cour de cassation, Gilbert Azibert, pour obtenir des informations confidentielles, en échange d'un poste honorifique à Monaco.
Les trois hommes ont été condamnés à la même peine - trois ans de prison dont un ferme - et sont à ce titre tous exclus de la Légion d'honneur.
Nicolas Sarkozy espère toujours une annulation de sa condamnation par le CEDH
Le Grand chancelier de la Légion d'honneur, le général François Lecointre, explique que l'exclusion de la distinction est "de droit" en cas de condamnation définitive à un crime par la justice française ou d'une peine d'emprisonnement égale ou supérieure à un an ferme.
Nicolas Sarkozy avait reçu la Légion d'honneur de Jacques Chirac pour son rôle dans la prise d'otage de 1993 dans une école maternelle de Neuilly-sur-Seine, dont il était alors maire.
Par l'intermédiaire de son avocat, l'ancien président, qui s'est également vu retirer l'ordre national du Mérite, rappelle que la Cour européenne des droits de l'Homme (CEDH) doit encore se prononcer sur son recours dans l'affaire des écoutes.
Clamant toujours son innocence dans ce dossier, Nicolas Sarkozy espère une annulation de sa condamnation, qui entraînerait automatiquement la restitution de la Légion d'honneur.
"La condamnation de la France [par la CEDH] impliquera la révision de la condamnation pénale prononcée à l'encontre [de Nicolas Sarkozy] en même temps que l’exclusion de l’ordre de la Légion d’honneur, l’une n’étant que la conséquence de l’autre", assure Patrice Spinosi.
Un lien "indigne" avec le maréchal Pétain, selon le gouvernement
Certains observateurs n'ont pas manqué de souligner que Nicolas Sarkozy est le deuxième chef d'État français à se voir retirer la Légion d'honneur, après le maréchal Pétain, qui en avait été privé suite à sa condamnation en août 1945 pour haute trahison et intelligence avec l'Allemagne nazie.
Reconnaissant une décision "automatique qui fait partie du code de la Légion d’honneur", la porte-parole du gouvernement Sophie Primas a toutefois qualifié d'"indigne" ce lien avec le maréchal Pétain.
"Le président Sarkozy a été là pour la France à des moments extrêmement compliqués", affirme-t-elle, exprimant sa réserve "non pas sur la règle, mais sur ce qu'elle entraîne comme comparaison".
Le ministre français des Affaires étrangères a quant à lui adopté un ton prudent, rappelant que le recours de Nicolas Sarkozy devant la CEDH est toujours pendant.
"Je note qu'il y a un recours contre la décision de justice. Cette affaire n'est donc pas encore tout à fait terminée", a-t-il déclaré en réaction à la décision du Grand chancelier.
Interrogé sur cette affaire en avril, Emmanuel Macron s'était opposé à ce que l'ancien président soit déchu de la Légion d'honneur : "De mon point de vue, de là où je suis, je pense que ce ne serait pas une bonne décision".
Condamnation unanime de la gauche française
Le député écologiste Benjamin Lucas s'est en revanche félicité de la décision et appelle à ce que "la République prive de ses privilèges et de son influence institutionnelle celui qui a déshonoré sa fonction et trahi le serment sacré qui lie le peuple à ses élus, celui de la probité".
"Les Français ont beaucoup de mal à comprendre que la justice devrait s'appliquer de manière différente en fonction des gens", a par ailleurs déclaré le coordinateur national de La France insoumise (LFI), Manuel Bompard.