Les groupes de consommateurs et les représentants de l'industrie exercent une pression croissante sur les députés européens concernant la proposition de législation sur les droits des passagers aériens.
La réforme européenne des droits des passagers aériens semble aller de mal en pis.Après un premier round de négociations, les groupes de protection des consommateurs, l'industrie européenne du transport aérien et les États membres de l'UE ne sont pas parvenus à se mettre d'accord sur les nouvelles protections proposées pour les passagers aériens.
Le mécontentement à l'égard du projet de texte a atteint un tel niveau que l'industrie a demandé que les négociations soient suspendues. "Nous demandons d'urgence une pause de six mois dans les délibérations jusqu'à ce qu'une évaluation approfondie de l'impact des mesures proposées ait été réalisée", peut-on lire dans une lettre envoyée ce mardi 25 novembre, aux ministres des Transports de l'Union européenne au nom de l'industrie du transport aérien opérant en Europe.
La présidence du Conseil a prévenu que si aucune avancée n'était réalisée, le dossier pourrait aboutir à une conciliation.
Selon une estimation réalisée conjointement par Airlines for Europe, l'Association européenne des compagnies d'aviation des régions d'Europe et l'Association internationale du transport aérien, le projet de texte actuellement examiné pourrait faire grimper les coûts annuels totaux du secteur d'au moins 40 %.
Les conséquences, selon ces organisations, seraient "brutales", car le secteur serait contraint de recouvrer ses coûts croissants en augmentant les tarifs. Dans le même temps, certaines liaisons pourraient devenir non viables sur le plan économique.
Les indemnisations en débat
La principale préoccupation du secteur est une proposition visant à relever le seuil d'indemnisation des passagers en cas de retard.
Actuellement, les voyageurs aériens européens ont droit à une indemnisation comprise entre 250 et 600 euros si un vol est annulé ou retardé de plus de trois heures. Selon la proposition en cours de discussion, les compagnies aériennes devraient payer entre 300 et 600 euros, en fonction de la distance.
Toutefois, les compagnies aériennes font pression pour que le seuil soit porté à cinq heures, tandis que le Conseil étudie la possibilité de le maintenir à trois heures, mais en réduisant le montant de l'indemnisation due aux passagers, ce qui ne fait pas l'unanimité parmi les ministres des Transports de l'UE.
Les associations de consommateurs estiment qu'un relèvement de ce seuil priverait la majorité des passagers de toute indemnisation. "La durée moyenne d'un retard se situe entre deux et quatre heures", a expliqué Steven Berger, juriste principal au Bureau européen des unions de consommateurs (BEUC), à Euronews.
"Les premières discussions au Conseil portaient sur un palier de cinq heures et neuf heures, ce qui aurait enlevé 90 % des droits des passagers. Donc là, pour nous, c'était inacceptable. Le deal final s'est retrouvé à 4 heures et 6 heures, ce qui va impacter plus de 60 % des passages. Ça veut dire que six personnes sur dix n'auraient plus le droit à aucune compensation. Pour nous, ce n'est pas acceptable, bien sûr", a-t-il assuré.
Pour que ces nouvelles protections entrent en vigueur, elles doivent être approuvées par les États membres (représentés au Conseil), le Parlement européen et la Commission européenne.
Cependant, bien que les députés européens soient étroitement alignés sur les demandes des groupes de protection des consommateurs, une majorité est toujours nécessaire pour que le Conseil puisse négocier avec les deux autres institutions.
À l'heure actuelle, les États membres ne se sont pas encore mis d'accord sur la portée et le seuil de certaines protections des consommateurs, telles que l'indemnisation en cas de retard de vol et l'inclusion d'un bagage à main dans le prix de base du billet.
Des négociations difficiles
Le BEUC fait également campagne pour une interdiction totale des clauses de non-présentation et pour des formulaires de remboursement et d'indemnisation pré-remplis en cas d'interruption de voyage.
"Actuellement, seul un tiers environ des consommateurs éligibles reçoivent effectivement ce à quoi ils ont droit. Ces mesures amélioreraient considérablement l'application de la législation et contribueraient à freiner les modèles commerciaux préjudiciables des agences d'indemnisation et de certaines compagnies aériennes", a souligné Steven Berger.
Les négociations interinstitutionnelles entre le Conseil, le Parlement et la Commission reprendront ce lundi 1er décembre.
Le Danemark, qui assure actuellement la présidence tournante du Conseil, a demandé aux États membres de faire preuve de "pragmatisme". La révision des règles de l'UE est actuellement en deuxième lecture et l'absence de position commune ne ferait que faire dérailler les négociations avec les deux autres institutions.
Un diplomate de l'UE a déclaré à Euronews que les discussions de lundi devraient être "difficiles" étant donné la forte opposition de "toutes les parties". "Ces négociations n'ont plus pour but de permettre au Parlement européen et au Conseil de trouver un terrain d'entente", a-t-il également assuré.