La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a mis en garde les 27 avant le sommet qui doit se ternir ce jeudi et vendredi à Bruxelles. Selon elle, les décisions auront un impact sur la position et la crédibilité du bloc à l'international.
L'Europe devra faire face à ses responsabilités et se prononcer sur deux sujets qui pourraient avoir un impact sur sa position à l'internationale : l'Ukraine et le Mercosur. Ce sommet, qui réunira les 27 dirigeants de l'Union européenne à Bruxelles ce jeudi 18 et vendredi 19 décembre, est "crucial" pour la sécurité et l'indépendance du bloc, a assuré Ursula von der Leyen, présidente de la Commission européenne.
"La paix d'hier n'existe plus. Nous n'avons pas le temps de nous laisser aller à la nostalgie. Ce qui compte, c'est la façon dont nous affrontons le présent", a-t-elle déclaré dans l'hémicycle de Strasbourg, ce mercredi matin. "Nous connaissons l'urgence. Elle est aiguë. Nous la ressentons tous. Nous la voyons tous."
Effort de guerre
Premièrement, l'UE doit décider de la manière dont elle peut maintenir l'Ukraine à flot sur le plan économique et s'assurer que Kyiv reste capable de résister à l'agression russe.
Ursula von der Leyen est favorable à un plan sans précédent visant à puiser dans les actifs gelés de l'État russe pour accorder un prêt de réparation. Mais cette approche a divisé les dirigeants de l'UE. La Belgique, qui détient majeure partie de ces actifs, soit environ 185 milliards d'euros via Euroclear, un dépositaire central de titres, continue d'exiger que les risques soient répartis équitablement entre les pays de l'UE.
Le Fonds monétaire international estime que l'Ukraine est au bord de la faillite et que le pays aura besoin de 137 milliards de dollars en 2026 et 2027. "Une chose est très, très claire", a déclaré la présidente de la Commission européenne. "Nous devons prendre la décision de financer l’Ukraine pour les deux prochaines années au sein de ce Conseil européen."
Cette option suscite des controverses. Selon la Banque centrale européenne, la confiance internationale dans l'euro pourrait être impactée en cas de recours aux avoirs russes.
La Commission a proposé une alternative, qui consiste à lever des fonds sur les marchés internationaux. Une option que privilégie la Belgique. Mais ce plan B nécessite l’accord des 27, et la Hongrie refuse de financer l’effort de guerre ukrainien. Le Premier ministre hongrois Viktor Orbán se considère comme un artisan de paix. Il est aussi l’allié le plus proche du président russe Vladimir Poutine en Europe.
Commerce international
Autre dossier important de ce sommet : sceller, ou non, l'accord de libre-échange avec le bloc sud-américain Mercosur (Brésil, Argentine, Uruguay, Paraguay et Bolivie).
Le projet doit être soutenu par une majorité qualifiée d'États membres, c'est-à-dire quinze pays représentant au moins 65 % de la population de l'UE.
Plusieurs grands pays, dont la France, s'opposent à l'accord. Ce mercredi, Emmanuel Macron a assuré qu'il s'opposerait "de manière très ferme" s'il y avait "une volonté de passage en force de la part des instances européennes". Pour lui, il n'y avait pas suffisamment de visibilité sur "les trois conditions demandées : les mesures miroir, la clause de sauvegarde et les contrôles".
Paris cherche également à obtenir un soutien pour reporter le vote à l'année prochaine, ce qui, selon les partisans de l'accord, pourrait le faire échouer et compromettre gravement la position de l'Union européenne en Amérique du Sud et dans le reste du monde.
De son côté, l'Italie s'est imposée comme le faiseur de roi, la France ayant besoin de son soutien pour constituer une majorité de blocage et faire échouer le projet. Ce mercredi, la cheffe du gouvernement italien Giorgia Meloni a estimé que la signature de l'accord est "prématurée". "Il est nécessaire d'attendre que le paquet de mesures supplémentaires visant à protéger le secteur agricole soit finalisé, expliqué et discuté avec nos agriculteurs", a-t-elle assuré.
Crédibilité de l'UE
La crédibilité de l'UE à façonner sa politique étrangère est en jeu dans ces deux dossiers, alors que le bloc est confronté à une administration Trump plus agressive qui poursuit une politique commerciale et étrangère "America first" (l'Amérique d'abord).
Dans son discours, Ursula von der Leyen a abordé le récent pivot des États-Unis sur son approche de l'Europe. "Nous, Européens, ne pouvons pas nous permettre de laisser les visions du monde des autres nous définir. Aucun d'entre nous ne devrait être choqué par ce que les autres disent de l'Europe. Mais permettez-moi de dire que ce ne serait pas la première fois que des hypothèses sur l'Europe se révèlent obsolètes", a-t-elle assuré.
"Et ce ne serait pas la première fois que l'on se rendrait compte que l'ordre mondial de l'après-guerre est en train de changer au point d'en être méconnaissable", a-t-elle ajouté.
Cette déclaration fait suite à la publication d’une stratégie de sécurité nationale américaine particulièrement sévère, qui met en garde contre un "déclin civilisationnel" imminent de l’Europe. Peu après, le président Donald Trump a qualifié le continent d’ensemble de "nations en déliquescence", dirigées par des responsables politiques "faibles".
Mardi dernier, le représentant de Donald Trump pour le commerce, Jamieson Greer, a lancé une nouvelle attaque contre les réglementations numériques de l'UE, accusant l'Union et ses États membres d'imposer "des poursuites judiciaires, des taxes, des amendes et des directives discriminatoires et harcelantes contre les fournisseurs de services américains".
Un porte-parole de l'UE a répondu que les règles européennes "s'appliquent de manière égale et équitable à toutes les entreprises opérant dans l'UE". "Ces règles garantissent des conditions de concurrence sûres, justes et équitables dans l'UE, conformément aux attentes de nos citoyens", a ajouté le porte-parole.