La Trinité, navire français du XVIe, gît bien au large de Cap Canaveral

La justice américaine a tranché. L’épave découverte en 2016 au large de Cap Canaveral en Floride est bien celle de La Trinité, le vaisseau du capitaine Jean Ribaut disparu en mer en 1565. La décision rendue le 29 juin dernier par la cour fédérale d’Orlando reconnaît ainsi la propriété de la France sur ce navire et sa cargaison, après deux ans d’intense bataille juridique.
Retour en arrière. En mai 2016, une équipe de Global Marine Exploration (GME), une société spécialisée dans la recherche sous-marine découvre un inestimable trésor, gisant dans l’océan Atlantique à une profondeur de 5 à 8 mètres. A quelques miles marins de la base de la Nasa, la compagnie met au jour, au milieu de décombres d’engins spatiaux, les restes d’un navire du XVIè siècle et de ses canons. Parmi ces pièces d’artillerie, trois d’entre-elles, en bronze, sont ornées d’une fleur de lys, l'emblème du Royaume de France. Ces armoiries sont également présentes sur une autre pièce de la cargaison, une stèle en bronze. Ainsi, la localisation du navire exhumé des flots et la nature des objets découverts sur le site, ont laissé penser qu'il s'agissait bien de La Trinité.
Sur la piste de la Trinité
Rapidement, aux vues de ces éléments, les services consulaires français ont réclamé la propriété de l’épave, aidés en cela par les conclusions du “Sunken Military Act”, un texte voté en 2004 par le congrès américain, qui reconnaît la souveraineté des pays sur les épaves de leurs anciens navires de guerre trouvées dans les eaux territoriales des Etats-Unis. A l’inverse, pour GME, la thèse est tout autre : il pourrait s’agir d’un navire marchand espagnol, qui avait embarqué la cargaison de La Trinité après l’avoir pilée.
Un bras de fer de deux années
La cour d’Orlando a donc donné raison à la France, qui était appuyée dans sa démarche par l’Etat de Floride. Pour GME, cette décision est lourde d’importance puisque la valeur des objets retrouvés en mer, s’ils sont inestimables d’un point de vue patrimonial, est évaluée à plusieurs millions d'euros.
A l’issue du jugement, Robert Pritchett, le président de la société d’exploration, nous a déclaré qu’”_il y avait de bons juges et de mauvais juges. Je ne peux pas faire de commentaire sur une affaire en cours_”. Il n'a pas indiqué s’il comptait faire appel, ce qui est possible jusqu’au début du mois d'août.
L’homme à la tête de GME a, en outre, soulevé une question : “**Que va faire la France du site ?” La réponse à cette interrogation nous a été fournie par l’ambassade de France aux Etats-Unis que nous avons également contactée : “Notre objectif, avec l'Etat de Floride, est de permettre une étude rigoureuse du site, et la présentation au grand public des résultats et des pièces qui pourront être retrouvées. Celles-ci ont une importante valeur historique.**”
La Trinité, un graal de l’archéologie maritime
Pour les historiens et les archéologues, La Trinité revêt une importance considérable puisqu’il s’agit de la plus vieille épave française découverte dans l’ancien “Nouveau Monde”. De plus, ce sont les vestiges du premier navire embarquant des Européens venus chercher la liberté religieuse, à l’image des protestants anglais, qui ont quelques décennies plus tard, en 1620, rallié les futurs Etats-Unis à bord du Mayflower.