Vaccins : pourquoi le Royaume-Uni a pris de l'avance et l'UE est-elle à la traîne ?

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Tous droits réservés Dominic Lipinski/AP
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Par Euronews avec AP
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Vaccins : pourquoi le Royaume-Uni a pris de l'avance et l'UE est-elle à la traîne ?

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L'envoyé spécial de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) pour le Covid-19 a demandé au Royaume-Uni de partager ses doses de vaccin avec d'autres pays une fois que les groupes prioritaires du pays auront été vaccinés.

"Je pense que nous devrions le faire", a déclaré ce dimanche le Dr David Nabarro, lui-même britannique, interrogé sur ce qui devrait se passer après la vaccination des personnes les plus à risque et des plus de 50 ans au Royaume-Uni.

"C'est vraiment une question de savoir ce qui est logique sur le plan économique, ce qui est logique pour la société et comment nous voulons qu'on se souvienne de nous dans 10 ou 20 ans", a-t-il déclaré à Sky News .

Les chiffres du gouvernement britannique mis à jour lundi ont montré que plus de 12,2 millions de personnes au Royaume-Uni ont reçu une première dose de vaccin, tandis que plus d'un demi-million ont également reçu une deuxième dose.

Le ministre en charge du déploiement des vaccins, Nadhim Zahawi, a déclaré qu'à un moment donné ce samedi 6 février, les soignants du pays administraient des injections à un rythme de près de 1 000 par minute.

Le Royaume-Uni a pour objectif d'injecter une première dose du vaccin à toutes les personnes âgées de plus de 70 ans ainsi qu'à tous les soignants en première ligne d'ici le 15 février.

Les États membres de l'UE reçoivent leurs premières doses d'AstraZeneca

Alors que le Royaume-Uni envisage un éventuel surplus de vaccins, de nombreuses personnes en Europe se demandent quand elles vont recevoir leurs premières doses.

Dimanche, l'Espagne est devenue le dernier pays à confirmer qu'elle avait reçu ses premières doses du vaccin anti-Covid-19 AstraZeneca-Oxford, qui seront distribuées à partir de lundi.

Les Bulgares ont commencé à recevoir leurs premières injections après que le pays a reçu 28 800 doses samedi. Ce pays des Balkans, qui compte sept millions d'habitants, a beaucoup misé sur le vaccin AstraZeneca, qui est relativement bon marché et facile à stocker et à utiliser.

Plusieurs autres États membres de l'UE , la France, l'Italie, l'Autriche, la Hongrie et la République tchèque, ont eux aussi reçu les premières livraisons de ce vaccin ce samedi 6 février.

Cette livraison permet à la France de disposer d'un troisième vaccin, après les vaccins Pfizer-BionTech et Moderna, et contribue à renforcer la promesse faite par le président Macron de vacciner tous les Français qui le souhaitent d'ici la fin de l'été. À ce jour, environ 1,8 million de personnes ont été vaccinées dans l'Hexagone.

En Allemagne, où 2,1 millions de personnes ont été vaccinées, les premiers lots du vaccin AstraZeneca nouvellement autorisé devaient être livrés aux 16 Länder du pays ce vendredi.

Le ministre de la Santé, Jens Spahn, a déclaré que l'ajout d'un troisième vaccin "ferait une réelle différence" dans la campagne de vaccination de l'Allemagne, qui, comme partout ailleurs en Europe, a jusqu'à présent été lente par rapport aux États-Unis ou à la Grande-Bretagne.

Comment le Royaume-Uni a pris de l'avance...

Le Royaume-Uni a réussi à éviter certains des problèmes d'approvisionnement en vaccins auxquels l'UE a été confrontée, comme lorsque AstraZeneca a déclaré avoir rencontré un problème de production.

Alors que le gouvernement britannique a investi de manière agressive et précoce dans la vaccination contre le coronavirus, les 27 ont adopté une approche plus prudente et plus lente.

Pour les vaccins d'Oxford-AstraZeneca et de Pfizer-BionTech, le Royaume-Uni a annoncé des accords plus de trois mois avant que l'UE ne fasse de même. Et c'est le cas aussi pour les autres vaccins : l'UE a soit commandé après le Royaume-Uni, soit est toujours en négociation.

Lorsque l'UE a eu un différend majeur avec AstraZeneca le mois dernier au sujet d'une énorme retard dans les livraisons prévues, le PDG Pascal Soriot a souligné que "le contrat britannique a été signé trois mois avant l'accord européen sur les vaccins. Nous avons donc eu trois mois de plus avec le Royaume-Uni pour régler tous les problèmes".

En septembre, le Royaume-Uni a également commandé des millions de doses d'un autre vaccin candidat, à la société pharmaceutique française Valneva. Une autre commande a été passée ce mois-ci.

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Malgré les discussions exploratoires, aucun contrat avec l'UE n'a été signé à ce jour entre les 27 et cette entreprise. Le président de Valneva, Franck Grimaud, a déclaré à l'agence AP que le Royaume-Uni recevra des doses de vaccin plus tôt parce qu'elle a signé la première

...Et pourquoi l'UE a été plus lente

La Commission européenne, qui a pris en charge l'achat de vaccins pour l'ensemble des Etats-membres, a obtenu des prix compétitifs pour ses commandes. Mais cela a pris du temps — et la différence de quelques mois a coûté cher.

L'UE a également été plus lente à approuver les vaccins, optant pour un processus plus long qui a permis à l'Agence européenne des médicaments (EMA) d'examiner les vaccins de manière plus approfondie, plutôt que pour une autorisation d'urgence. L'objectif : obtenir une plus grande confiance du public envers les injections, une décision qu'elle défend toujours.

En conséquence, le Royaume-Uni a commencé à vacciner le 8 décembre, alors que l'UE n'a commencé que le 27 décembre. Elle n'a pas rattrapé son retard depuis.

Toutefois, l'approche réfléchie de l'UE a peut-être permis d'éviter d'autres problèmes. Sans une stratégie commune, les pays européens les plus petits comme les plus pauvres auraient pu avoir du mal à obtenir et à payer les vaccins. Exacerbées par le marché unique, les divergences entre les approches nationales auraient pu conduire au chaos.

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Malgré cette lenteur au démarrage, l'engagement pris par la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, de faire vacciner 70 % des adultes de l'UE avant la fin de l'été, tient toujours.

Certains pays de l'UE restent prudents à l'égard du vaccin AstraZeneca

La France, l'Allemagne et la Suède ont décidé, pour l'instant, de ne réserver l'injection du vaccin d'AstraZeneca qu'aux personnes âgées de 18 à 64 ans, en raison du manque de données sur son effet sur les groupes d'âge plus âgés. La Belgique est allée plus loin en limitant l'utilisation aux personnes de moins de 55 ans, même si cela signifie que les plans de vaccination soigneusement établis devront être modifiés.

Et ce, même si l'Agence européenne des médicaments, qui a fait preuve de prudence, a approuvé l'utilisation du vaccin AstraZeneca dans l'UE pour tous les adultes.

David Nabarro, de l'OMS, a également salué le "courage" dont a fait preuve le Royaume-Uni en prolongeant les intervalles entre les doses de vaccin, ce qui, selon lui, "semble être associé à une protection encore plus grande".

La semaine dernière, le chef de la santé britannique a salué une nouvelle étude suggérant qu'une seule dose du vaccin AstraZeneca offre une forte protection contre le virus pendant 12 semaines, affirmant que cela confirmait la stratégie très controversée du gouvernement qui consiste à retarder la deuxième injection du vaccin.

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Certains pays européens ont conservé des doses en stock pour être absolument sûrs que chaque personne puisse recevoir une seconde injection dans le délai plus court initialement recommandé, refusant ainsi une première injection à d'autres.

S'il fait figure de bon élève au niveau vaccinal, le Royaume-Uni reste mal classé selon d'autres critères relatifs à la pandémie : le pays, avec une population de 67 millions d'habitants, a enregistré 112 000 décès imputables au coronavirus, soit le nombre le plus élevé d'Europe.

Les autorités sanitaires britanniques tentent aussi de contenir la propagation du variant identifié pour la première fois en Afrique du Sud, car on craint qu'il soit plus contagieux ou plus résistant aux vaccins existants.

L'OMS met en garde contre le nationalisme en matière de vaccins

L'envoyé spécial de l'OMS pour le Covid-19 a également déclaré dimanche que le monde doit avoir un accès égal aux vaccins contre le coronavirus et a exhorté les pays riches à abandonner le nationalisme vaccinal.

Le Dr Nabarro a en effet déclaré à Sky News que la priorité est de vacciner en premier lieu tous ceux qui sont vulnérables au virus, en particulier les soignants et les personnes âgées dans le monde entier, au lieu de chercher à vacciner des nations prises individuellement.

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Selon lui, "le monde devrait avoir un accès égal à ces vaccins", et d'ajouter que c'est la seule façon de faire face à une pandémie mondiale.

"J'espère vraiment que les dirigeants du monde entier réaliseront dans les semaines à venir que le fait que quelques pays vaccinent beaucoup de gens, et que les pays les plus pauvres aient des vaccins très limités, n'est pas vraiment la voie à suivre — économiquement, socialement, écologiquement et même moralement".

Sources additionnelles • Traduction et adaptation : Thomas Seymat

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