Accord-cadre entre l'UE et la Suisse : pourquoi ça bloque

L'accord cadre négocié par l'UE et la Suisse pour régir leurs relations bilatérales est-il au point mort ?
L'accord cadre négocié par l'UE et la Suisse pour régir leurs relations bilatérales est-il au point mort ? Tous droits réservés FRANCOIS WALSCHAERTS/AFP or licensors
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Par Guillaume Petiteuronews
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L'accord-cadre négocié par l'UE et la Suisse pour régir leurs relations bilatérales est-il au point mort ? Salaires, libre circulation... Quels sont les points de blocage ? On vous explique tout.

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Mise à jour : mercredi 26 mai la Suisse a finalement dit non à l'Union européenne ; Berne a renoncé à poursuivre les négociations en cours sur ses futures relations avec l'UE.

Cela faisait plusieurs mois que les deux parties bataillaient autour de cet accord censé prendre le relais des accords bilatéraux négociés au fil du temps. Ces derniers régissent les relations commerciales actuelles entre Berne et les Vingt-Sept dans des domaines économiques clés ainsi que la libre circulation des personnes.

Selon des médias suisses, le Conseil fédéral pourrait interrompre les négociations, qui patinent depuis plusieurs semaines voire mois. L'absence d'accord pourrait avoir des conséquences très concrètes pour certaines entreprises qui exportent des produits qui ne sont pas ou plus en ligne avec la réglementation européenne.

Il faut avoir en tête que les échanges entre l'UE et la Suisse représentent un enjeu important. 70% des importations suisses proviennent de l’UE et 52% des exportations du pays vont vers l'UE.

Que négocient exactement la Suisse et l'UE ?

Petit retour en arrière. Après le refus des Suisses de rejoindre l'Espace économique européen en 1992, le pays, qui ne pouvait pas vivre en autarcie, a alors négocié avec Bruxelles des accords sectoriels. Libre circulation des personnes, échanges de marchandises, transports, agriculture… : la Suisse s'est au final progressivement alignée sur le droit européen, tout en restant en dehors de l'UE et en conservant la possibilité de choisir à la carte.

Mais aujourd'hui, il y a une multitude d'accords et de traités, plus toujours totalement adaptés aux évolutions du droit européen. De plus, ce mille-feuille est devenu assez illisible, et certains accords sectoriels arrivent à expiration. L'UE veut donc en profiter pour remettre les choses à plat.

Les deux parties sont parvenues à un accord cadre en 2018. Et c'est là que ça bloque. Car le parti UDC, sorti renforcé aux dernières législatives suisses et représenté à la tête du Conseil fédéral, juge qu'avec cet accord la Suisse va devoir reprendre le droit européen de manière trop systématique, ce qui pourrait porter atteinte à sa souveraineté.

Quels sont les points de blocage ?

Premier point de blocage : la libre circulation des personnes, point cardinal pour l'UE. "Pour la Suisse il doit s'agir essentiellement de laisser circuler librement les employés et leur famille", expliquait fin avril le ministre suisse des Affaires étrangères Ignazio Cassis _"quand pour l'UE il s'agit de la libre circulation de tous les citoyens de l'Union européenne". _

Deuxième point d'achoppement : la Suisse craint que cet accord-cadre ouvre la voie à l'octroi de l'aide sociale à tous les citoyens de l'UE vivant en Suisse, qu'ils y soient actifs ou inactifs. Les adversaires de l'accord agitent le risque d'une "immigration vers l'aide sociale".

Le troisième principal point de blocage concerne le niveau de protection des salaires des Suisses, plus élevés qu'ailleurs en Europe. La Suisse exige que les entreprises étrangères qui envoient des salariés travailler en Suisse continuent de le notifier à l'avance aux autorités pour prévenir tout dumping salarial et ainsi protéger ainsi le niveau des salaires suisses.

D'autres points ont conduit à un blocage. C'est le cas des aides d'État, comme l'explique le site swissinfo.ch : "L'UE ne veut pas de subventions publiques. Les cantons suisses craignent que leurs banques ne soient plus autorisées à fonctionner avec les garanties de l'État."

Mais certains jugent qu'au fond, la Suisse craint surtout de devoir trop s'adapter au droit européen et que la Cour européenne de justice penche trop en faveur de l'UE en cas de litiges.

Que se passe-t-il s'il n'y a pas d'accord ?

L'UE fait de la signature de l'accord institutionnel la condition préalable à la conclusion de tout nouvel accord bilatéral d'accès à son marché.

Sans accord-cadre, les échanges seraient rendus plus compliqués dans les domaines qui ne sont plus couverts par des accords bilatéraux.

C'est le cas des matériaux médicaux par exemple, dont le cadre juridique bilatéral est établi par l'accord de reconnaissance mutuel (ARM). Signé en 2002, il supprimait des obstacles techniques pour l'exportation de nombreux biens : dispositifs médicaux donc, mais aussi machines, jouets, équipements électriques... Mais il expire ce mercredi, comme le rapporte RTS.

"Les certificats déjà délivrés pour des dispositifs médicaux existants dans le cadre de l'ARM" resteront en vigueur après le 26 mai, avait déclaré le 31 mars Natalie Sleeman, Première conseillère de la délégation de l'UE à Berne.

Mais la question d'un sur-coût à l'avenir pour les entreprises des secteurs concernés - "technologie médicale, industrie des machines et industrie chimico-pharmaceutique" - est réelle, selon ce think thank.

Pour pallier l'absence d'accord, le Conseil fédéral préparerait, selon le quotidien NZZ,un plan B "pour adapter ses lois au droit européen là où cela ne lui pose pas de problème", rapporte RTS.

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