Un juge fédéral a temporairement empêché le président américain Donald Trump de limoger la gouverneure de la Réserve fédérale Lisa Cook.
PUBLICITÉ
Un tribunal fédéral a statué mardi que la gouverneure de la Réserve fédérale, Lisa Cook, pouvait rester à son poste pendant qu'elle conteste la décision du président américain Donald Trump de la licencier.
Cette décision, qui fera très certainement l'objet d'un appel, porte un coup aux tentatives de l'administration Trump d'étendre son contrôle sur la Fed.
Cette institution - qui bénéficie depuis sa création d'une indépendance vis-à-vis du gouvernement américain - est chargée de fixer les taux d'intérêt à court terme pour atteindre les objectifs de stabilité des prix et d'emploi qui lui sont assignés par le Congrès.
"Pas de cause légalement admissible pour la révocation de Lisa Cook", selon le tribunal
La juge de district Jia Cobb a accédé, mardi en fin de journée, à la demande de Lisa Cook de bénéficier d'une injonction préliminaire bloquant son licenciement pendant que le litige suit son cours devant les tribunaux.
Le 25 août, Donald Trump avait annoncé qu'il renvoyait Lisa Cook à la suite d'allégations de fraude hypothécaire concernant deux propriétés qu'elle avait achetées en 2021, avant d'entrer à la Fed.
La gouverneure est accusée d'avoir déclaré que deux propriétés étaient des "résidences principales" pour obtenir des taux hypothécaires moins élevés que si l'une d'entre elles avait été désignée comme une résidence secondaire ou un bien d'investissement.
Jia Cobb a estimé que ces allégations ne constituaient pas un motif légal suffisant pour licencier Lisa Cook. En vertu de la loi régissant la Fed, les gouverneurs ne peuvent être révoqués que "pour un motif valable", ce qui, selon la juge, se limite aux actions entreprises pendant la durée du mandat d'un gouverneur.
"La révocation d'un gouverneur de la Réserve fédérale ne s'applique qu'aux préoccupations concernant la capacité du membre du conseil d'administration à exécuter efficacement et fidèlement ses fonctions statutaires, à la lumière des événements qui se sont produits pendant son mandat", a déclaré Jia Cobb.
"Le président Trump n'a pas énoncé de cause légalement admissible pour la révocation de Lisa Cook", ajoute la décision de justice.
Les taux directeurs de la Fed au cœur du litige
Cette décision permettra à Lisa Cook de participer à la réunion de la Fed des 16 et 17 septembre, au cours de laquelle celle-ci devrait réduire son taux directeur à court terme d'un quart de point pour le ramener entre 4 % et 4,25 %.
Les gouverneurs de la Réserve fédérale ne sont pas des secrétaires de cabinet et la loi n'autorise pas un président à les renvoyer en cas de désaccord sur la politique à mener ou parce qu'il souhaite simplement les remplacer.
"Permettre au président de révoquer illégalement le gouverneur Cook sur la base d'allégations vagues et sans fondement mettrait en danger la stabilité de notre système financier et porterait atteinte à l'État de droit", estime l'avocat de Lisa Cook, Abbe Lowell.
La Maison Blanche n'a pas réagi dans l'immédiat.
Le tribunal a également ordonné au conseil des gouverneurs de la Fed et à son président, Jerome Powell, "de permettre à Cook de continuer à fonctionner en tant que membre du conseil pendant la durée de ce litige".
L'indépendance de la Réserve fédérale en jeu
Cette affaire pourrait constituer un tournant pour la Réserve fédérale, vieille de 112 ans, car aucun président n'a jamais cherché à limoger un gouverneur de la Fed auparavant.
Si Donald Trump parvient à remplacer Lisa Cook, il pourrait obtenir une majorité de 4-3 au sein du conseil d'administration de la Fed. Le président américain a déclaré qu'il ne nommerait à la Fed que des personnes favorables à une baisse des taux d'intérêt.
De nombreux économistes craignent que si la Réserve passe sous le contrôle de la Maison Blanche, elle maintienne son taux d'intérêt directeur à un niveau plus bas que ne le justifient les fondamentaux économiques, afin de satisfaire les exigences de Donald Trump.
Cela pourrait accélérer l'inflation et faire grimper les taux d'intérêt à long terme, tels que ceux des prêts hypothécaires et des prêts automobiles.
Les investisseurs pourraient alors exiger un rendement plus élevé pour leurs propres obligations afin de compenser une inflation plus importante à l'avenir, ce qui augmenterait les coûts d'emprunt pour le gouvernement américain et l'ensemble de l'économie.