"L'élargissement est notre outil géostratégique le plus important"

Le ministre autrichien des Affaires étrangères Alexander Schallenberg
Le ministre autrichien des Affaires étrangères Alexander Schallenberg Tous droits réservés Virginia Mayo/Copyright 2023 The AP. All rights reserved
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Par Stefan Grobe
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La politique d’élargissement de l’UE anime le débat sur le Vieux continent. Les 27 et les pays candidats vantent les atouts de ce projet. Mais les dirigeants s’interrogent sur la procédure à suivre pour ne pas lasser plus encore les attentes et ce sans déséquilibrer le projet européen.

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Le soutien à l’Ukraine semble connaître des failles. Aux États-Unis, le Congrès a adopté un budget à court terme qui ne prévoit aucune aide à Kyiv. En Europe, les élections législatives en Slovaquie ont porté en tête des urnes le populiste pro-Poutine Robert Fico.

En réponse aux questions sur l’engagement européen, le chef de la diplomatie de l’UE, Josep Borrell, estime que la meilleure réponse pour "la sécurité de l’Ukraine" est une adhésion du pays au projet européen.

L'intégration de Kyiv, et d'autres candidats constituerait une expansion historique de l'UE mais cette perspective divise les 27. Pour évoquer cette question, Euronews a interrogé Alexander Schallenberg, ministre autrichien des Affaires étrangères.

Euronews :

Josep Borrell déclare que l'adhésion à l'UE serait l'engagement de sécurité le plus fort que l'UE puisse prendre à l'égard de l'Ukraine. Cela signifie-t-il que l'Ukraine est laissée pour compte et que les arguments de sécurité l'emportent sur d'autres aspects tels que l'État de droit ou la bonne gouvernance ?

Alexander Schallenberg :

L'élargissement est notre outil géostratégique le plus important. Il ne s'agit pas d'une entreprise bureaucratique. Nous l'avons prouvé en tant que communauté dans le passé. Pensez à l'adhésion de la Grèce, de l'Espagne ou du Portugal, nous avons préservé la jeune démocratie. Le même raisonnement devrait prévaloir aujourd'hui. Mais il ne faut pas que certains pays soient sur la voie rapide et d'autres sur la voie de garage. Je pense que ce serait une grave erreur géostratégique de la part de l'Union européenne. Elle doit rester fondée sur le mérite. Elle ne peut pas être un raccourci pour certains et pas pour d'autres.

Euronews :

Votre gouvernement soutient l'idée d'une intégration progressive des Balkans occidentaux en vue d'une adhésion à part entière ?

Alexander Schallenberg :

Ce n'est pas seulement pour les Balkans occidentaux. Nous pensons qu'une intégration progressive serait également la solution pour l'Ukraine. Le fait est que nous devons laisser derrière nous la pensée binaire : soit zéro, vous n'êtes pas membre, soit un, vous êtes un membre à part entière. Cette approche s'est avérée erronée dans les Balkans. 20 ans après [le sommet de] Thessalonique, nous sommes nulle part. Il faut donc reconnaître que l'élargissement est aussi une entreprise géostratégique. Et au lieu d'attendre que tout soit convenu, il faut penser à l'agriculture en Ukraine, à la politique de cohésion en Ukraine ou pour d'autres. Nous devrions les adopter. Nous devrions les intégrer.

Euronews :

Actuellement, la situation entre la Serbie et le Kosovo est tendue. Et l'idée que deux futurs membres de l'UE s'en prennent violemment l'un à l'autre est un peu déconcertante. Que pensez-vous de cette situation ?

Alexander Schallenberg :

Avons-nous perdu tout respect de nous-mêmes ? Quelle était l'idée de l'intégration européenne ? Qu'est-ce que c'était au début ? La Seconde Guerre mondiale avec pour ennemis la France et l'Allemagne. Le Haut-Adige, le Tyrol du Sud, était une pierre d'achoppement entre Vienne et Rome. Et que s'est-il passé ? La réponse a été l'intégration européenne. Alors, pourquoi doutons-nous de nous-mêmes aujourd'hui ? Je crois que nous avons les mêmes défauts, et je crois que ce qui s'est passé dans le nord du Kosovo devrait nous amener en Europe à dire que nous devons avancer plus vite. Ces gens sont frustrés, ils ont attendu, nous leur avons promis il y a 20 ans qu'ils pourraient faire partie de notre famille à part entière. Nous n'avons pas tenu notre promesse.

Euronews :

Les Balkans occidentaux frappent à la porte depuis longtemps. Quand, pensez-vous qu'ils rejoindront l'UE ?

Alexander Schallenberg :

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Les prédictions sont difficiles, surtout lorsqu'elles concernent l'avenir, comme on dit. Charles Michel a avancé la date de 2030. Je pense qu'il est bon d'avoir en tête un certain calendrier, au moins sur le plan politique. Le fait est que nous avons promis, lors du sommet de Thessalonique il y a exactement 20 ans, à tous les pays membres de la région qu'ils deviendraient membres à part entière de l'Union européenne. Alors, prenons les choses en main. Joignons l'acte à la parole et allons de l'avant, car je crois que la réponse est l'intégration européenne. Du moins, nous l'avons toujours pensé lorsqu'il s'agissait de conflits en Europe occidentale. Pourquoi n'en irait-il pas de même dans le Sud-Est de l'Europe ?

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