L'année dernière, les feux de forêt avaient été particulièrement nombreux dans la cette zone non loin du pôle nord. Mais, ils sont encore plus fréquents cette année.
L'été 2020 s'annonce sous de très mauvais auspices pour les forêts et la toundra dans le cercle arctique. En effet, la région fait déjà face à de nombreux incendies, comme l'attestent les dernières données sur les émissions de carbone recueillies par les satellites du réseau européen Copernicus. La quantité de carbone rejetée dans l'atmosphère en juin 2020 dépasse même de loin celui enregistré l'année dernière à la même période. Un constat d'autant plus inquiétant, car en juin 2019, ces émissions avaient été les plus importantes jamais enregistrées, notamment en Sibérie.
Les experts du programme européen de surveillance de la Terre ont réalisé des graphiques illustrant cette augmentation de ces émissions. Ainsi en juin 2020, ce sont plus de 15 mégatonnes de carbone ont été émises, ce qui équivaut à quelque 59 mégatonnes de CO2. Pour saisir l'importance de la chose, ces données correspondent peu ou prou aux émissions annuelles de pays comme le Pérou, la Libye, et bien plus que celles du Portugal, selon le classement effectué par le Global Carbon Project, une initiative portée par de nombreuses organisations environnementales internationales.
Dans cette zone arctique, la journée où les incendies ont été le plus nombreux a été le 30 juin. Ou plus exactement, c'est durant ce jour que les foyers actifs ont généré le plus de rayonnement thermique mesuré par les satellites.
Localement, le situation a été la pire en Sibérie. Mais il y a eu aussi d'importants incendies au Canada ou en Alaska. Les mois de juin 2019 et 2020 sont tellement hors-norme qu'un des spécialistes de Copernicus, Mark Parrington, a réalisé une animation où apparaissent tous les foyers qui ont été répertoriés depuis le début des mesures par satellite, en 2003.
"Cette carte montre bien qu'en juin 2020, l'activité des feux a été plus intense dans l'est de l'Arctique sibérien qu'en 2019" explique M.Parrington, en ajoutant que "les feux ont été également plus répandus dans les zones non arctiques de la Sibérie orientale".
"Il est très surprenant de constater à quel point la tendance quotidienne de l'activité des incendies est similaire à celle de 2019. Ces deux années sont vraiment inhabituelles par rapport aux données précédentes", conclue ce chercheur.
De plus, un autre triste record est tombé cette semaine, celui de l'incendie le plus au nord jamais détecté depuis que les satellites sont en service. Un record même battu à plusieurs reprises, comme l'a montré la spécialiste Annamaria Luongo. La dernière mesure recensée concerne un foyer détecté presque sur le 80e parallèle, pratiquement sur les rives de la mer des Laptev, bordant l'océan Arctique.
Les incendies sont tout à fait naturel en Sibérie en été et la différence de température entre la saison chaude et l'hiver à toujours été importante. Cependant, le nombre et l'intensité des incendies dénombrés cette année et l'année dernière sont une source de préoccupation pour les scientifiques.
La lutte contre ces incendies est ardue. Il est très compliqué, voire presque impossibles, de les éteindre dans ces régions aussi éloignées. La surveillance des foyers n'est de plus possible que par satellite.
La prolifération de feux qualifiés de "zombies", capables de rester allumés – en sommeil – dans le permafrost pendant l'hiver et qui se réactivent ensuite au retour des conditions estivales est également préoccupante.
Cette année, la région a connu une succession de mois avec des températures plus élevées que la normale, ce qui favorise les incendies. Des températures supérieures aux moyennes ont été enregistrées pour pratiquement tous les mois depuis décembre 2019.
La semaine dernière, le thermomètre a même atteint les 38°C dans la ville russe de Verkhoyansk en Sibérie.
Selon toutes vraisemblances, la récente catastrophe dans la région de Norilsk, où 20 000 tonnes de diesel se sont déversées dans la nature, serait liées à ces températures. La fonte du permafrost aurait en effet déstabilisé le sol sur lequel reposait le réservoir dans lequel le carburant été stocké.