Suisse : inauguration du tunnel ferroviaire du Ceneri, dernier maillon d'un chantier pharaonique

Un train circulant dans l'un des "tubes" du tunnel du Ceneri photographié le 2 septembre 2020
Un train circulant dans l'un des "tubes" du tunnel du Ceneri photographié le 2 septembre 2020 Tous droits réservés Ti-Press Alessandro Crinari/Keystone via AP
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Par Vincent Coste avec AFP
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Après le Lötschberg et le Saint-Gothard, cet ouvrage situé dans le canton du Tessin, va permettre de fluidifier le transport de marchandises et voyageurs à travers les Alpes entre le Nord et le Sud de l'Europe

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C'est un un jour à marquer d'une pierre blanche, ou plutôt à la percer, pour les amateurs de "superstructures". La Suisse va en effet inaugurer ce vendredi le dernier maillon d'un ensemble de tunnels destiné à faciliter le trafic ferroviaire entre le Nord et le Sud du continent européen. Les montagnes qui se dressent sur la confédération Helvétique ont longtemps été un obstacle. Grâce au nouveau tunnel du Ceneri, troisième et dernier grand ouvrage à travers les Alpes, les trains de voyageurs et de fret pourront bientôt circuler sans entrave.

Un chantier titanesque

L’inauguration du tunnel de Ceneri, ce 4 septembre fait suite à l'ouverture de celui du Lötschberg en 2007, puis de celui du Saint-Gothard en 2016 qui est le plus long tunnel ferroviaire du monde avec 57 km de long.
Comme les deux autres structures, le Ceneri est un tunnel dit "de base", caractérisant un ouvrage uniquement dédié à la circulation des trains, où les travaux de creusement sont entrepris pratiquement à la base des montagnes, en plaine, pour permettre la mise en place d'une ligne avec le moins de dénivelé possible. Là aussi comme le Lötschberg et le Saint-Gothard, le Ceneri est en fait composé de deux tunnels, ou "tubes", long chacun de plus de 15 km. Ces deux tubes sont reliés tous les 325 mètres par des galeries.

Les travaux du tunnel ont débuté en 2003. Son percement, achevé en janvier 2016, a nécessité l'excavation de pas moins de 2 203 500 m3 de roches. La majeure partie du chantier, 94% du volume, a été réalisée grâce à l'emploi d'explosif, le reste étant dû à l'usage d'un tunnelier. Derniers chiffres, au niveau des câblages, le Ceneri a nécessité 900 km de cuivre et 10 500 km de connecteurs pour fibres optiques.

Le fret en point d'orgue

L'un des grands objectifs du Ceneri, situé dans le canton du Tessin, au sud du pays, sera donc de fluidifier le transport des marchandises sur un axe ferroviaire reliant Rotterdam au Pays-Bas à Gênes, en Italie. Ce tunnel permettra ainsi de limiter le nombre de camions qui traversent les Alpes en faisant transiter les marchandises par ce couloir ferroviaire.

En Suisse, le transport des marchandises a longtemps nécessité de puissantes locomotives pour passer les cols mais aussi de lourdes opérations de manutention pour charger à la frontière les semi-remorques sur des trains avant de traverser le pays.

FABRICE COFFRINI/AFP
Le PDG d'Alptransit (société qui a réalisé les travaux) Dieter Schwank et le directeur des chemins de fer fédéraux suisses (CFF) Vincent Ducrot à Camorino dans le canton suissFABRICE COFFRINI/AFP

"C'est le dernier verrou qui nous permet d'avoir une ligne plate à travers les Alpes", a affirmé à Vincent Ducrot, le directeur des chemins de fer fédéraux suisses (CFF), en marge d'une présentation du tunnel à la presse à la veille de son inauguration.

C'est le dernier verrou qui nous permet d'avoir une ligne plate à travers les Alpes.
Vincent Ducrot
Directeur des chemins de fer fédéraux suisses (CFF)

"A l'avenir on pourra avoir des trains de fret de 750 mètres de long pouvant transporter jusqu'à 2 100 tonnes de marchandises (par convoi)", s'est-il enthousiasmé, tout en mettant en avant ses avantages environnementaux.

Avec ce tunnel, c'est l'équivalent de quelque 3 000 semi-remorques qui pourra emprunter ce nouvel axe ferroviaire à travers les Alpes, ce qui doit permettre de réduire les émissions de Co2 de "900 tonnes par jour", a-t-il quantifié.

En outre, l'ouvrage, qui doit entrer en service en décembre, permettra aussi de réduire encore le temps de trajet pour les passagers, sur différentes connexions, car comme sur la ligne dans le Saint-Gothard, les trains pourront circuler jusqu'à 250 km/h dans le Ceneri.

Par exemple, la liaison entre Zurich et Milan, qui avait déjà été raccourcie avec le Saint-Gothard, sera ramenée dans un premier temps à 3h17, puis 3h ultérieurement, contre 3h40 actuellement

Le projet du siècle en Suisse

Ce tunnel qui culmine à 329 mètres au-dessus du niveau de la mer doit pouvoir accueillir jusqu'à 170 trains de marchandises et 180 trains de voyageurs par jour.

Cette dernière étape d'un chantier "pharaonique" selon l'expression du directeur des CFF, sera inaugurée à son entrée sur le versant Nord, au son du cor des Alpes avec des musiciens du Tessin et de Suisse alémanique pour marquer symboliquement le trait d'union que ce tunnel va poser entre le Nord et le Sud du pays.

La présidente de la Confédération, Simonetta Sommaruga, doit couper le ruban au moment même où le premier train de marchandises empruntera officiellement le tunnel.

"Cette nouvelle ligne de train à travers les Alpes, c'est l'oeuvre du siècle pour notre pays", a confié la présidente de la Confédération.

"Le tunnel du Ceneri fait avancer la Suisse - et fait avancer la politique européenne des transports."

"C'est le plus grand investissement qu'on ait jamais eu dans notre pays", a-t-elle expliqué, estimant qu'il s'agit également "d'un signal fort pour une politique de transport intelligente".

Approuvée dans les urnes par les citoyens suisses en 1992 puis 1994, cette nouvelle ligne ferroviaire à travers les Alpes, ou NLFA, a coûté quelque 24 milliards de francs suisses (22,7 milliards d'euros).

Financé en partie par les redevances sur les poids lourds, le projet a donc englobé trois tunnels. Le plus coûteux à été celui du Saint-Gothard, pour lequel les frais ont atteint 12,2 milliards de francs suisses, loin devant les 3,6 milliards de francs investis dans le tunnel du Ceneri.

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