Kristalina Georgieva : "J’appelle tout un chacun à participer aux mesures d'économie d'énergie"

Kristalina Georgieva
Kristalina Georgieva Tous droits réservés euronews
Par Oleksandra Vakulina
Partager cet articleDiscussion
Partager cet articleClose Button
Copier/coller le lien embed de la vidéo de l'article :Copy to clipboardLien copié

Dans ce nouvel épisode de The Global Conversation, la directrice générale du Fonds monétaire international (FMI), Kristalina Georgieva, est l’invitée de Sasha Vakulina.

Dans ce nouvel épisode de The Global Conversation, la directrice générale du Fonds monétaire international (FMI), Kristalina Georgieva, est l’invitée de Sasha Vakulina.

Sasha Vakulina, euronews :

Madame Georgieva, peu de temps après les réunions annuelles, où en sommes-nous aujourd'hui en ce qui concerne l'économie mondiale ?

Kristalina Georgieva, directrice générale du Fonds monétaire international (FMI) :

L'horizon s'est considérablement assombri au cours de l'année dernière. Il y a un an, nous nous remettions du COVID-19 et nous avions terminé avec une croissance mondiale de plus de 6 %. Et puis il y a eu ces deux chocs : le virus Omicron et la guerre Ukraine qui n’ont pas seulement interrompu la reprise économique, mais ont inversé la tendance. La pression sur les économies européennes est telle que nous prévoyons que la moitié des pays de la zone euro connaîtront au moins deux trimestres de croissance négative. En d'autres termes, une récession. Pour vous donner une idée de l'importance de l'impact sur l'Europe, nos projections avant la pandémie et nos projections actuelles diffèrent d'un demi-billion d'euros.

En d'autres termes, la perte pour le peuple européen est assez dramatique par rapport au reste du monde. La Chine ralentit surtout à cause de sa politique zéro Covid. Les termes de l’échange n’impactent pas les Etats-Unis de la même façon que l’Europe qui, en comparaison, se trouve dans une position plus difficile. Mais l’Europe n'est pas seule face à une année 2023 qui s’annonce très difficile.

L'année 2023 s’annonce très difficile,
mais l'Europe n'est pas seule.
Kristalina Georgieva
Directrice générale du Fonds monétaire international (FMI)

Sasha Vakulina, euronews :

Lorsque la prétendue question de l'inflation a émergé, on a beaucoup parlé du fait que cela était temporaire. Mais nous sommes ici et ce n'est finalement pas si passager. Nous nous posons toujours cette question : à quel point cette croissance négative est-elle temporaire ?

Kristalina Georgieva :

Pourquoi avons-nous dit que c'était temporaire ? Parce qu'aucun d'entre nous ne pouvait prédire la guerre menée par la Russie. Quand elle a éclaté, les conditions ont radicalement changé et cela a fait pression sur l'énergie. L’inflation des prix alimentaires est encore assez dramatique, assez significative. Quand nous regardons vers l'avenir, je ne vais pas l'édulcorer, 2023 pourrait être plus difficile que 2022. L'hiver prochain pour l'Europe pourrait être encore plus dur que cet hiver. Pourquoi ? Parce que les responsables politiques européens ont agi très rapidement pour remplir leurs stocks de gaz. Mais si la situation perdure - la Russie ne fournissant pas de gaz à l'Europe - comment ces stocks de gaz seront ils assurés l'année prochaine ?

La question clé aujourd'hui en Europe est de savoir si cette dernière peut rester unie et si le public peut être impliqué dans cette période difficile. Et j’appelle tout un chacun à participer aux mesures d'économie d'énergie. Nous pouvons tous faire notre part cet hiver. Ainsi, nous pourrons arriver au printemps sans dommage dramatique, c'est-à-dire sans avoir à nous rationner.

Mais je suis plus optimiste quant à l'avenir de l'Europe, car cette crise a permis d'accélérer la transition vers une énergie verte, qui génère de la croissance et des opportunités, de la même manière que le Covid-19 a accéléré la transition numérique, cette crise va stimuler la transition verte.

euronews / The Global Conversation
La directrice générale du Fonds monétaire international (FMI), Kristalina Georgieva (à droite), est l’invitée de Sasha Vakulina.euronews / The Global Conversation

Sasha Vakulina, euronews :

Vous avez dit que nous devions soutenir le passage en cours de l'Ukraine d'une phase d'urgence de gestion économique à une phase de reprise. Mais quelles sont certaines des étapes clés que vous avez constatées dans les mesures mises en œuvre par Kyiv, en collaboration avec le FMI, qui ont contribué à maintenir le cap ? Car aujourd’hui nous parlons de l’économie d’un pays qui est toujours en guerre.

Kristalina Georgieva :

Tout d'abord, l'admiration pour le gouvernement et le peuple de l'Ukraine. L'unité dont ils font preuve est une unité que nous chérissons au sein de l'Union européenne. Et c'est pourquoi l'Ukraine est maintenant sur la voie de l'adhésion à l'UE. La qualité du gouvernement ukrainien est très impressionnante. Je ne peux qu’admirer et louer la discipline dont il fait preuve et la clarté de ses objectifs. Qu'avons-nous fait avec les autorités ukrainiennes immédiatement après le début de la guerre ? Nous nous sommes concentrés sur les mesures à prendre pour protéger l'économie de l'effondrement. Et bien qu'elle se contracte probablement de 30 à 35 %, elle est très loin de s'effondrer. Au contraire, une partie de l'économie européenne et de l'économie ukrainienne renoue avec la croissance.

Sasha Vakulina, euronews :

Vous avez mentionné que l'Ukraine était sur la voie d’une adhésion à l’Union européenne avec une intégration progressive de l'économie ukrainienne et de certains secteurs. Pensez-vous que ce processus d'intégration s'accélère actuellement davantage qu'il n'aurait pu le faire ?

Kristalina Georgieva :

Bien sûr. L’Ukraine fait face à une guerre terrible, une tragédie. Mais elle a rendu la nation ukrainienne plus forte et le pays beaucoup plus déterminé à prendre les mesures nécessaires pour son propre peuple et pour l'entrée dans l'Union européenne. Je pense notamment à l'attention portée aux Ukrainiens au maintien du moral de la population ukrainienne, à la fourniture de pensions et de services sociaux. Je vous livre une petite anecdote. J'ai de la famille à Kharkiv. Au mois de mai, traditionnellement, on plante des fleurs et des arbres. Et cela a été fait pendant la guerre, alors que les bombardements se poursuivaient dans la région. Donc ce renforcement de l'unité de la nation va aussi dans le sens de l'entrée dans l'Union européenne. Si j'ai un message pour l'Ukraine, c'est ce dicton que nous avons en Bulgarie : hâtez-vous lentement. Faites ce qui doit être fait. Mais soyez prudents, soyez attentifs. Pour que ce soit bien fait, afin que ce ne soit pas à refaire dans le futur.

Sasha Vakulina, euronews :

Mme Georgieva, pour terminer, l'invasion de la Russie ne montre aucun signe d'apaisement. Nous avons discuté de l'avenir de l'économie ukrainienne, mais qu’en est-il de l'avenir de l'économie russe ?

Kristalina Georgieva :

L'économie russe s'est contractée cette année et elle se contractera l'année prochaine. Les conséquences pour la Russie vont être plus graves à moyen et long terme. L'exode des Russes en raison de la guerre et en particulier des Russes hautement qualifiés, nuit à la Russie. Le pays perd son rôle dans l'économie mondiale. La transition accélérée vers les alternatives au pétrole et au gaz va rétrécir un marché pour la Russie. Et au fil du temps, l'industrie sur laquelle elle s'appuie fortement va ébrécher son rôle.

Partager cet articleDiscussion

À découvrir également

En Géorgie, les prix de l'immobilier explosent avec l'arrivée des émigrés russes

Pacte de stabilité: la Commission européenne propose de nouvelles règles budgétaires

La grève des travailleurs belges, conséquence du "choc" des factures d'énergie