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L'Allemagne veut récupérer les munitions toxiques dans la Baltique avant qu'il ne soit trop tard

Un agent d'un service de récupération de munitions montre une grenade d'artillerie de 78 millimètres lors d'une visite de presse pour montrer la récupération de munitions
Un agent d'un service de récupération de munitions montre une grenade d'artillerie de 78 millimètres lors d'une visite de presse pour montrer la récupération de munitions Tous droits réservés  AP Photo/Markus Schreiber
Tous droits réservés AP Photo/Markus Schreiber
Par Kirsten Grieshaber avec AP
Publié le
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Environ 1,6 million de tonnes de munitions de la Seconde Guerre mondiale reposent au fond de la Baltique, laissant échapper des composés toxiques qui contaminent la vie marine et menacent l'écosystème local.

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Lentement, Dirk Schoenen plonge vers un énorme tas de munitions de la Seconde Guerre mondiale qui repose au fond de la mer Baltique.

Il en retire quelques pièces et les met soigneusement dans un panier, tandis qu'une équipe d'ingénieurs, de plongeurs et de marins surveille chacun de ses mouvements sur des écrans diffusant une vidéo filmée par une caméra fixée sur sa tête.

Au bout d'une heure, les hommes remontent Dirk Schoenen sur le Baltic Lift, une plate-forme mobile située à 6 kilomètres au large de la petite ville de Boltenhagen, sur la côte allemande. Le plongeur a récupéré plusieurs obus de 12,8 centimètres, des fragments de grenades plus petites et plusieurs projectiles de 2 centimètres.

Sa récolte a été fructueuse, mais modeste par rapport à ce qui reste au fond de la mer.

Environ 1,6 million de tonnes de vieilles munitions gisent au fond de la mer du Nord et de la mer Baltique. Le risque environnemental est considérable : en rouillant, leurs douilles diffusent dans l'eau des substances toxiques telles que des composés de TNT.

Nettoyer les vestiges des deux Guerres mondiales

Alors que les tensions entre la Russie et l'OTAN s'exacerbent en mer Baltique, l'Europe est toujours confrontée à l'énorme tâche de nettoyer les déchets que la Seconde Guerre mondiale et, dans une moindre mesure, la Première Guerre mondiale, ont laissés dans l'océan.

La plupart des munitions ont été délibérément jetées à l'eau après la guerre, car les Alliés craignaient une reprise des hostilités à l'avenir, et ils ont ordonné à l'Allemagne de détruire toutes ses munitions.

En 1946, des trains provenant de toute l'Allemagne ont été envoyés sur les côtes, et des pêcheurs ont été chargés de transporter le matériel vers des zones d'élimination désignées dans la mer Baltique et dans la mer du Nord.

Les forts courants marins, en particulier en mer du Nord, ont cependant répandu ensuite les munitions sur tout le fond marin.

Sur cette photo prise à partir d'un moniteur de surveillance, un plongeur travaille sur une grenade d'artillerie de 128 millimètres
Sur cette photo prise à partir d'un moniteur de surveillance, un plongeur travaille sur une grenade d'artillerie de 128 millimètres AP Photo/Markus Schreiber

Afin de nettoyer les fonds marins des vestiges de la guerre, le gouvernement allemand a alloué 100 millions d'euros à des équipes de plongeurs pour déterminer la meilleure façon de récupérer les munitions, et à des ingénieurs pour élaborer des plans de nettoyage à long terme.

Le projet pilote actuel, d'une durée de quatre semaines, a débuté le mois dernier sur la plate-forme Baltic Lift, à proximité de laquelle des experts ont découvert un vaste champ contenant environ 900 tonnes de vieilles munitions.

Deux équipes de plongeurs se relaient 24 heures sur 24, à raison de 12 heures par jour. Comme il est trop dangereux de remonter les pièces en décomposition sur la plate-forme, elles sont d'abord triées et stockées dans des paniers sous l'eau avant qu'un navire spécial ne les ramène à terre. Ce n'est qu'ensuite qu'elles sont acheminées vers des installations spécialisées dans l'élimination des vieilles munitions.

Risques d'explosion spontanée et de contamination

"Ce n'est pas un travail de routine", explique Dirk Schoenen, 60 ans, qui plonge depuis 1986 et s'est porté volontaire pour faire partie de l'équipe de plongée Baltic Taucher.

"Le défi, bien sûr, c'est qu'on ne sait jamais ce qu'on va trouver", ajoute-t-il en retirant son équipement de plongée, qui comprend trois paires de gants superposées pour s'assurer que sa peau n'entre pas en contact direct avec les munitions.

"La plupart de ces objets peuvent être manipulés, mais il ne faut pas négliger la prudence et se contenter de frapper ou de jeter quelque chose au hasard".

Un plongeur vérifie son équipement de récupération de munitions datant de la Seconde Guerre mondiale dans la mer Baltique, près de Boltenhagen, en Allemagne
Un plongeur vérifie son équipement de récupération de munitions datant de la Seconde Guerre mondiale dans la mer Baltique, près de Boltenhagen, en Allemagne AP Photo/Markus Schreiber

Les munitions en décomposition sont toujours susceptibles d'exploser, car les détonateurs des mines marines et des bombes aériennes non explosées deviennent de plus en plus sensibles au fil du temps.

Pire encore, ces munitions vieilles de 80 ans commencent à empoisonner l'environnement marin. Des fragments d'explosifs TNT en décomposition, considérés comme cancérigènes, ont été découverts dans l'eau à proximité de vieilles munitions reposant sur le fond marin.

Selon le ministère allemand de l'Environnement, qui dirige les opérations de nettoyage, des substances dérivées de ces explosifs se sont accumulées dans les organismes marins tels que les moules et les poissons.

Bien que les niveaux de substances toxiques détectés soient bien inférieurs aux seuils de sécurité pour l'eau potable ou pour les organismes marins, dans certains cas, "les concentrations approchent les niveaux critiques", a alerté le GEOMAR Helmholtz Centre for Ocean Research Kiel dans une étude publiée en février.

L'institut de recherche souligne "le besoin urgent de dépolluer les munitions pour minimiser les risques à long terme".

Le problème est particulièrement pressant dans la mer Baltique en raison de l'étroitesse du chenal qui la relie à la mer du Nord voisine et à l'Atlantique, ce qui signifie que l'eau polluée peut rester dans la zone pendant des décennies.

D'autres pays sont confrontés à des problèmes similaires

Le projet de l'Allemagne ne se concentre pas uniquement sur le nettoyage des fonds marins.

Son objectif à long terme est de trouver des moyens sûrs de récupérer et de détruire immédiatement les munitions, idéalement par des moyens automatisés sans l'aide de plongeurs, et en brûlant les matériaux toxiques dans une installation industrielle flottante en mer.

Le projet actuel et trois projets connexes parrainés par le gouvernement allemand l'année dernière, qui ont utilisé des robots sous-marins pour examiner les fonds marins, aideront à déterminer comment concevoir de telles installations offshore, a déclaré Volker Hesse, un ingénieur maritime qui coordonne le programme.

Le plongeur Dirk Schoenen se prépare à plonger à bord du navire polyvalent Baltic Lift, en mer Baltique, près de Boltenhagen, en Allemagne, le 1er septembre 2025
Le plongeur Dirk Schoenen se prépare à plonger à bord du navire polyvalent Baltic Lift, en mer Baltique, près de Boltenhagen, en Allemagne, le 1er septembre 2025 AP Photo/Markus Schreiber

Ce dernier souligne que les résultats ne sont pas seulement importants pour l'Allemagne, mais qu'ils présentent également un grand intérêt pour d'autres pays, car les vieilles munitions coulées en mer constituent un problème croissant dans le monde entier.

Il fait remarquer que la mer Noire est également confrontée au nouveau problème de la contamination par les munitions provenant de la guerre menée par la Russie en Ukraine.

"Il s'agit sans aucun doute d'un problème mondial, il suffit de penser aux crises au Vietnam ou au Cambodge, mais aussi ici, dans les pays voisins, dans la mer Baltique, au Danemark, en Pologne", explique Volker Hesse.

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