"En l'état actuel, non je ne peux pas condamner" l'attaque du Hamas

Le premier conseiller de la Mission de Palestine auprès de l'UE, Hassan Albalawi, répond aux questions d'Euronews
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Par Grégoire LoryMared Gwyn Jones
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Le premier conseiller de la Mission de Palestine auprès de l’UE refuse de condamner l'agression brutale du Hamas contre l’Etat hébreu tant qu’il n’y aura pas d’"État palestinien indépendant, souverain".

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Dans une interview exclusive accordée à Euronews mardi, Hassan Albalawi, premier conseiller de la Mission de Palestine auprès de l'UE, a jugé que le conflit en cours est le résultat de la persécution systémique des Palestiniens depuis leur déplacement massif pendant la guerre israélo-arabe de 1948.

"Je veux bien les (le Hamas) condamner un jour. Le jour où l'État d'Israël reste dans ses propres frontières, à savoir qu'elles sont les frontières, et le jour où il y a un État palestinien indépendant, souverain, le jour où les Palestiniens ont le minimum de leurs droits, si un jour, ce jour-là, s'il y a une attaque à ce moment-là, je condamne. Mais là, en l'état actuel, non, je ne peux pas condamner", répond-il.

"J'ai aucune difficulté à dire que toute vie humaine, qu'elle soit palestinienne ou israélienne, est une vie à sauver et que toute perte d'une vie humaine palestinienne, israélienne, c'est une perte de trop", ajoute le premier conseiller tout en insistant sur le fait que le problème dépasse le Hamas, le mouvement islamiste palestinien qui a pris le pouvoir en 2007 dans la bande de Gaza .

L'UE, comme les États-Unis, considère le Hamas comme une organisation terroriste.

Hassan Albalawi critique également le soutien sans équivoque des dirigeants européens au droit d'Israël à la "légitime défense", affirmé pour la première fois par la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, quelques heures après l’assaut samedi matin du Hamas contre Israël.

"Dire qu'Israël a le droit de se défendre. C'est donner une garantie, c'est donner une justification aux crimes que commet Israël contre la population civile palestinienne", insiste Hassan Albalawi.

"Mais lorsque Israël attaque, lorsqu'Israël occupe, lorsqu'Israël colonise (…) après, vous allez dire qu’Israël est en train de se défendre ?"

Un porte-parole de la Commission européenne a réitéré lundi la position de l'UE. Il a rappelé qu'Israël avait "le droit de se défendre, de défendre son territoire et son peuple conformément au droit international".

Déçu par la réponse de l'UE

Hassan Albalawi se dit "déçu" par l'annonce initiale de la Commission lundi, qui suggérait qu'elle suspendrait toute aide aux Palestiniens. L'UE est le premier donateur d'aide humanitaire aux Palestiniens à Gaza, contrôlée par le Hamas, et en Cisjordanie, gouvernée par l'Autorité palestinienne du président Mahmoud Abbas.

L’institution a ensuite fait marche arrière en confirmant qu'elle lançait un examen urgent de son aide financière afin de s'assurer "qu'aucun financement de l'UE ne permette indirectement à une organisation terroriste de mener des attaques contre Israël".

L'hésitation européenne montre que la décision est "politique", estime Hassan Alawi.

"Si elle (l’UE) a continué cette décision, ça veut dire qu'elle se met directement et ouvertement avec les Israéliens".

"Et c'est très grave parce que l'Union européenne, si elle avait continué dans cette décision, ça veut dire qu'elle perd. Elle perd son rôle dans cette question au Proche-Orient, un rôle de médiateur, un rôle qui essaie d'instaurer le droit international", poursuit-il.

Cette déclaration intervient alors que le chef de la diplomatie européenne, Josep Borrell, a invité les ministres des Affaires étrangères israélien et palestinien à se joindre à une réunion extraordinaire de leurs 27 homologues mardi après-midi.

L'invasion de l'Ukraine a montré ce que l'Europe est capable de faire lorsqu'il y a une volonté politique, constate Hassan Albalawi, qui s'est demandé pourquoi l'Union n'avait pas voulu sanctionner Israël pour ses incursions en territoire palestinien.

"Elle peut imposer des sanctions. Elle peut au moins interdire, par exemple, le commerce des produits venant des colonies israéliennes. Elle peut interdire l'entrée des colons. Elle peut interdire des sociétés européennes qui commercialisent avec la colonisation israélienne puisque l'Union européenne dit clairement que la colonisation israélienne est interdite, elle est interdite au regard du droit international".

"Je ne demande pas à l'Union européenne de donner des armes aux Palestiniens comme ils le font avec l'Ukraine. Je ne dis pas ça, mais au moins prendre des positions qui font comprendre à Israël que sa politique sur le terrain va lui coûter cher, cher politiquement, cher économiquement, sur tous les plans", explique Hassan Albalawi.

L'enfant gâté de l'Europe

Tout en reconnaissant le rôle central de l'Europe dans l'aide apportée aux Palestiniens, le premier conseiller estime que l'Europe a une responsabilité historique plus profonde à l'égard du peuple palestinien. La résolution des Nations unies de 1947, qui visait à partager le territoire palestinien en deux États, l'un juif et l'autre arabe, n'a pas permis de créer un État palestinien.

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"Si on revient à l'origine de la question palestinienne, la question palestinienne est le résultat de l'histoire européenne, la question palestinienne a été créée par l'Europe", rappelle-t-il.

"On sent effectivement qu'Israël reste jusqu'à aujourd'hui l'enfant chéri, l'enfant gâté de l'Europe. Lorsque vous avez un enfant, lorsqu'il fait des bêtises, vous lui dites : c'est pas gentil, vous le blâmez, vous ne lui donnez pas de l'argent, etc, mais jamais vous ne prendrez aucune sanction concrète, jamais vous n'acceptez que quiconque le touche parce que c'est votre enfant", ajoute Hassan Albalawi.

"L'histoire de l'Europe est fondée sur les droits de l'Homme, sur la démocratie, sur le droit des peuples (…) Pourquoi dans le cas israélien, Israël doit être une exception. Non l'Europe doit assumer sa propre histoire, ses propres valeurs et aussi le droit international, mais aussi sa responsabilité historique, juridique, morale dans le drame palestinien".

Hassan Albalawi a également appelé l'Europe à peser de tout son poids diplomatique sur les efforts déployés pour parvenir à une résolution pacifique du conflit, conformément au projet à deux États.

"La solution ne peut pas être militaire ni sécuritaire", prévient-il. "L'armée israélienne empêche réellement la création d'un Etat palestinien. S'il n'y a pas des sanctions c'est uniquement une intervention extérieure qui peut sauver la situation".

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