Mohammad Javad Zarif : "Trump peut s'attribuer le mérite de soutenir Daesh en Syrie"

Mohammad Javad Zarif : "Trump peut s'attribuer le mérite de soutenir Daesh en Syrie"
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Par Saeid Jafari
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Accord sur le nucléaire iranien, politique de Donald Trump... Le ministre iranien des Affaires étrangères Mohammad Javad Zarif aborde dans The Global Conversation, les sujets qui fâchent et affirme ironiquement que Donald Trump peut s'attribuer le mérite de soutenir Daesh en Syrie.

Accord sur le nucléaire iranien, politique de Donald Trump... Le ministre iranien des Affaires étrangères Mohammad Javad Zarif aborde dans cette édition de The Global Conversation, les sujets qui fâchent et affirme ironiquement que Donald Trump peut s'attribuer le mérite de soutenir Daesh en Syrie.

Personne n'aurait pensé qu'au troisième anniversaire de l'accord sur le nucléaire iranien, il serait si proche de son annulation. Alors que les Etats-Unis se sont retirés de l'accord sur décision de Donald Trump, l'Union européenne, la Chine et la Russie ont annoncé être déterminées à aboutir au maintien de l'Iran dans cet accord. Ces efforts réussiront-ils à garantir la survie de ce texte ? Nous interrogeons à Téhéran le ministre des Affaires étrangères Mohammad Javad Zarif.

Saeid Jafari, euronews :

"Après le retrait des Etats-Unis de l'accord sur le nucléaire, vous semblez ne pas voir d'un bon oeil, le processus de négociations avec l'Union européenne..."

Mohammad Javad Zarif, ministre iranien des Affaires étrangères :

"Le paquet de mesures qui nous a été proposé n'était pas satisfaisant. Aujourd'hui, nous travaillons avec les Européens. Les travaux sont en cours - pourrait-on dire - pour que nous puissions tester les possibilités qui s'offrent à nous. Nous avons laissé du temps à l'Union européenne. Nous avons constaté qu'il y a un engagement politique de son côté. Des mesures techniques ont été mises sur la table, mais elles ne sont pas suffisantes.

Il y a deux périodes prévues au calendrier : l'une concerne la première série de sanctions américaines qui seront en vigueur en août et l'autre, c'est la deuxième série de sanctions américaines instaurées en novembre. Et nous allons voir comment l'Europe gérera cela. Nous réagirons en conséquence et nous avons un plan très spécifique..."

_"_Les Européens sont-ils prêts à accepter que les intérêts américains dominent la prise de décision au niveau de l'économie mondiale ?"

Saeid Jafari :

"De quel type de garanties avez-vous besoin ?"

Mohammad Javad Zarif :

"On se rend compte que sous la pression des Etats-Unis, sous la pression psychologique que les Etats-Unis essaient de créer, des entreprises européennes ont déjà commencé à se retirer. Et les Européens doivent se confronter à cela s'ils ont effectivement un intérêt à préserver cet accord, s'ils en sont convaincus, si nos partenaires en Europe ont cette vision des choses, alors ils doivent être prêts à mener des efforts en ce sens. L'Iran ne devrait pas être la seule partie qui s'investit dans cet accord. Il faut qu'il y ait des banques, des ouvertures de compte, des PME qui viennent en Iran, qui s'impliquent avec leurs partenaires du secteur privé, etc..."

Saeid Jafari :

"Que peuvent faire l'Union européenne et les pays européens pour résoudre ce problème ?"

Mohammad Javad Zarif :

"Ils doivent se demander s'ils veulent désormais, vivre dans un système mondialisé, un nouveau système mondialisé dans lequel un pays en particulier prendrait la décision finale et où tous les autres devraient s'y conformer... - Et parfois, ce n'est même pas un pays, mais un individu ou un groupe d'individus qui prend des décisions pour servir des intérêts personnels et qui ensuite, s'attend à ce que tous les autres suivent...

Aujourd'hui, on voit en particulier après la rencontre entre le président Trump et le président Poutine qu'il y a des gens aux Etats-Unis qui s'inquiètent, qui disent que le président Trump n'agit pas nécessairement en fonction des intérêts nationaux américains. Et même s'il s'avère que c'est effectivement le cas, les Européens sont-ils d'accord pour que les intérêts américains dominent la prise de décision au niveau de l'économie mondiale ? Sont-ils prêts à accepter cela ? Ou prêts à s'y opposer ? C'est une question que les entreprises européennes doivent se poser tout comme les gouvernements européens. Et il existe différentes possibilités de coopération. En Europe, il n'y a pas que des entreprises avec des actionnaires américains. Il y a de nombreuses entreprises européennes, beaucoup ne sont pas tournées vers les Etats-Unis, beaucoup n'ont aucune relation commerciale avec ce pays."

"Si Donald Trump veut s'attribuer le mérite [de lutter contre le terrorisme en Syrie], il devrait plutôt s'attribuer le mérite de soutenir Daesh"

Saeid Jafari :

"Vladimir Poutine et Donald Trump viennent de se rencontrer en Finlande. Nous avons vu qu'ils partageaient d'une certaine manière, la même vision des choses sur ce qui se passe en Syrie. Est-ce que cela vous inquiète ?"

Mohammad Javad Zarif :

"L'Iran et la Russie ont aidé le peuple syrien et nos deux pays continueront de le faire tant que ce sera nécessaire. Mais au final, ce sont les Syriens qui prennent les décisions, nous avons une bonne communication et une bonne coordination avec la Russie et le gouvernement syrien et nous allons continuer d'agir de la sorte.

Notre objectif ici est très clair - c'est notre objectif, mais c'est aussi celui de la fédération de Russie, - : c'est de lutter contre le terrorisme et l'extrémisme.

Maintenant, si Donald Trump veut s'en attribuer le mérite, il devrait plutôt s'attribuer le mérite de soutenir Daesh car c'est ce que les Etats-Unis et leurs alliés ont fait depuis le début. Le fait que des armes américaines ont été retrouvées aux mains de l'organisation Etat islamique et d'autres organisations extrémistes a été prouvé par des sources occidentales."

Saeid Jafari :

"Nous avons entendu le Ministre russe de l'Energie dire que son pays était prêt à fournir d'autres produits aux Iraniens et pas simplement leur acheter du pétrole."

Mohammad Javad Zarif :

"Cela fait partie des nombreux aspects de la coopération russo-iranienne : cela passe par de nombreuses activités, des investissements de la Russie dans le secteur de l'énergie en Iran, la participation de la Russie aux activités liées aux infrastructures iraniennes, une implication commune de l'Iran et de la Russie sur le pétrole et le commerce...

Notre coopération avec la Russie prend de nombreuses formes. Mais je ne crois pas qu'elle prévoit en particulier que nous vendions du pétrole à la Russie et qu'en échange, nous recevions des produits et des biens de sa part. C'est un ensemble beaucoup plus vaste et il intègre beaucoup d'autres variables dont des opportunités de coopération entre l'Iran et la Russie dans le domaine de l'énergie et des opportunités pour l'Iran de générer des revenus."

"Le dialogue régional garantit la sécurité de tous"

Saeid Jafari :

"Plusieurs fois, l'Iran a averti que la suspension pure et simple de l'accord sur le nucléaire aurait des conséquences immenses et dangereuses sur la sécurité de la région."

Mohammad Javad Zarif :

"Plus que l'Iran, ce sont les Européens qui disent cela. Parce qu'ils pensent que cet accord est un texte très important sur la non-prolifération nucléaire et que sans lui, c'est la porte ouverte à une tension beaucoup plus grande dans la région.

Pour notre part, nous pensons que nous nous sommes toujours appuyés sur nous-mêmes pour assurer notre propre sécurité. Notre sécurité est assurée de l'intérieur, pas de l'extérieur. Mais nous avons aussi montré que notre population résistera à l'agression, n'acceptera pas que quiconque essaie d'intimider l'Iran, d'humilier l'Iran ou pire d'envahir l'Iran ou nuire à notre sécurité ou notre intégrité territoriale.

Nous avons porté assistance à tous ceux qui étaient menacés dans la région. Donc nos amis et voisins de la région ont toujours pu sentir qu'ils ne recevaient aucune menace de la part de l'Iran. Certains ont pu faire de la propagande autour de cela pour des questions de politique intérieure ou régionale et n'y ont pas gagné grand-chose.

Donc je crois que le meilleur moyen d'aborder ces points dans notre région du Golfe persique, c'est par le dialogue régional et c'est ce qui garantira la sécurité de tous dans notre voisinage immédiat."

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