Pauvreté, manque de soins : aux Etats-Unis, les Noirs sont décimés par le coronavirus

Le nouveau coronavirus porte des coups de plus en plus rudes aux Américains, et ses victimes "préférées" appartiennent à la communauté noire. Les statistiques qui commencent à remonter de plusieurs Etats sont très parlantes, le pourcentage de Noirs décimés par la pandémie est particulièrement alarmant dans le sud du pays et dans la grande ville de Chicago. Cette large morbidité s'explique par la pauvreté qui frappe cette partie de la population, dont découlent de gros problèmes de santé et un manque d'accès aux soins.
Le pire bilan mondial de morts deux jours de suite
Les Etats-Unis dans leur globalité, fortement malmenés par le Covid-19, ont franchi des caps extrêmes : près de 2 000 morts deux jours consécutifs - 1 939 le 8 avril, 1 973 le 9 avril -, c'est la pire mortalité quotidienne dans le monde depuis le début de l'offensive épidémique, et plus d'un quart des cas de contamination officiellement déclarés sur la planète, précisément 429 052, selon le dernier décompte effectué par l'Université Johns Hopkins.
Au total, 14 695 décès sont recensés à ce jour, 9 avril 2020, sur l'ensemble du territoire américain.
Donald Trump, qui a mis un temps fou à comprendre l'intérêt du confinement pourtant vivement conseillé par son équipe d'experts scientifiques, a trouvé une explication à ces différents tristes records :
Les Noirs, plus pauvres, frappés en majorité
L'Etat de New York reste le plus éprouvé par la pandémie, et de loin; son record à lui est de 779 nouveaux morts en un jour - le 9 avril -, ce qui fait monter le bilan à 6 268 habitants décédés en tout. Cet Etat n'a pas l'habitude de publier des statistiques ethniques, bien que ce soit le cas pour de nombreuses autres juridictions.
Les chiffres déjà fournis montrent clairement que les Noirs sont donc les plus douloureusement touchés et sont sur-représentés au niveau des décès. Dans l'Illinois, 42% de ceux qui ont succombé aux assauts du Covid-19 sont membres de la communauté afro-américaine, communauté qui ne représente pourtant que 14% de la population de l'Etat.
Dans le sud, les données sont également catastrophiques : en Caroline du Nord, si les Noirs constituent 22% de la population, ils subissent 31% des décès provoqués par le coronavirus. En Louisiane, si les Afro-Américains représentent 33% des habitants de l'Etat, ils atteignent jusqu'à 70% des victimes de la maladie.
A Chicago - la troisième ville la plus peuplée des Etats-Unis, au nord-est de l'Illinois -, moins d'un tiers des habitants sont noirs, mais tragique paradoxe, ils constituent 72% des morts du Covid-19 dans la métropole. "C'est à couper le souffle !", s'est inquiétée la maire, Lori Lightfoot (ci-dessous).
Plus de comorbidité, moins d'accès aux soins
Les explications sont relativement faciles : des inégalités socio-économiques, historiques aux Etats-Unis, aggravent l'impact de la pandémie sur les Afro-Américains, beaucoup n'ont qu'un accès limité aux soins et par conséquent sont moins dépistés. Les médecins s'accordent aussi à dire qu'ils ont plus de diabète, d'hypertension et de maladies cardiovasculaires, qui sont des facteurs aggravants.
Le médecin en chef des Etats-Unis, Jerome Adams (ici photographié), est le premier à pouvoir en témoigner.
Jerome Adams a livré publiquement ses propres problèmes de santé pour expliquer les conditions inégales dont sa communauté est victime, face aux ravages provoqués par le nouveau coronavirus :
Des emplois de service qui "tuent"
Des études montrent également que les couvertures médicales des emplois de service, majoritairement assurés par des travailleurs noirs, sont bien inférieures à celles d'autres postes mieux payés. Pourtant, ces petits boulots exposent bien plus au danger du Covid-19.
Georges Benjamin, le président de l'Association américaine de santé publique, l'a expliqué à l'Agence France-Presse :
L'organisation américaine de défense des minorités Lawyers' Committee for Civil Rights Under Law vient d'adresser un courrier au secrétariat américain à la Santé, qui peut se résumer en une petite phrase : "Beaucoup d'Américains noirs (...) n'ont pas le privilège de pouvoir se confiner à la maison".
Edit : des corrections ont été apportées aux statistiques présentées dans les 5e et 6e paragraphes de cet article.