Mégafeu, pangolin, déboulonnage... Quels sont les mots de l'année 2020 ?

Des gens regardent un panache de fumée se répandre sur Healdsburg, en Californie, alors que des feux de forêt brûlent à proximité, le 20 août 2020.
Des gens regardent un panache de fumée se répandre sur Healdsburg, en Californie, alors que des feux de forêt brûlent à proximité, le 20 août 2020. Tous droits réservés Noah Berger/AP
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Par Thomas Seymat
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"Pangolin", "mégafeu", "Apéro Zoom", etc. sont des mots qui font "fait" 2020. Quels sont selon vous les autres mots de l'année ?

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L'année 2020, marquée par la pandémie de Covid-19, a été sans pareille dans l'Histoire récente. La période et ses incertitudes ont été aussi marquées par des mots qui sont entrés dans notre vocabulaire quotidien pour décrire un air du temps si particulier. Sélection de huit de ces mots, qu'ils soient des néologismes ou non, qui ont "fait" 2020.

Mégafeux :

Australie, Brésil, ouest des Etats-Unis, Sibérie : l'année 2020 a connu de nombreux feux de forêts gigantesques, attisés par le changement climatique et entraînant la destruction de millions d’hectares de forêts et de broussailles. En plus de l'impact sur la faune et la flore des écosystèmes partis en fumée, les effets sanitaire et écologique de ces mégafeux se font ressentir à l'échelle de la planète : pollution causée par la fumée, la suie et les cendres, émission très importante de monoxyde de carbone (CO) et de dioxyde de carbone (CO2) dans l'atmosphère (renforçant à leur tour le changement climatique), etc.

Pangolin :

La vie des pangolins n'est pas de tout repos. Malgré leur apparence reptilienne, ils sont en fait des mammifères et font l'objet d'un trafic par des braconniers en Asie et, de plus en plus, en Afrique, pour répondre à la forte demande de pays comme la Chine et le Vietnam. Non seulement leurs écailles sont utilisées dans la médecine traditionnelle chinoise, mais leur viande est également considérée comme un mets délicat. Selon un rapport publié en 2020 par l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime, les saisies de pangolins ont décuplé entre 2014 et 2018. Ce commerce illégal les rend vulnérables à l'extinction.

En plus de cela, ces mammifères écailleux ont été pointés du doigt comme source potentielle du nouveau coronavirus, causant la pandémie qui a frappé le monde cette année.

La probabilité que cette situation se reproduise est sûrement élevée, car nous voyons des marchés non réglementés, même des marchés réglementés, qui continuent ce trafic. C’est vraiment une menace pour nous tous parce que la dernière chose que nous voulons, c’est vivre une autre pandémie", explique Jorge Eduardo Rios de l'Office des Nations unies contre les drogues et le crime

Déboulonnage :

Les manifestations du mouvement Black Lives Matter, ravivées par la mort de George Floyd lors de son interpellation par plusieurs policiers à Minneapolis, ont essaimé hors des Etats-Unis durant l'été 2020 et, avec elle les mobilisations contre les statues rendant hommage à certaines personnages historiques sur la voie publique. De Bristol au Royaume-Uni, en passant par la Belgique, et même en Colombie, nombreuses sont les statues de responsables esclavagistes, confédérés ou colonisateurs à avoir été déboulonnées, non sans débat, cette année.

Si certains y voient une volonté d'effacer l'Histoire, d'autres défendent ces déboulonnages de symboles racistes et arguent qu'il y a d'autres personnalités historiques, plus positives, à mettre en avant. Si le débat continue, ces événements auront au moins poussé de nombreuses villes et institutions à se pencher sur leur histoire, leurs liens avec ces périodes et leurs effets sur la société actuelle.

Doom-scrolling :

L'année 2020 et son lot d'informations toutes plus déprimantes les unes que les autres ont été un terrain favorable au doom-scrolling — 'doom' signifiant ici la ruine, et scrolling le fait de faire défiler l'écran sur un ordinateur ou une application. Le mot n'est pas une invention de l'année, mais l'Académie française n'a pas encore proposée de traduction officielle. On peut tenter de le traduire par navigation ou consommation compulsive de l'actualité, sur les réseaux sociaux ou sites d'information.

Le podcast 'Maintenant, vous savez', explique le phénomène ainsi : "Tout utilisateur de Twitter, Instagram ou Facebook connaît ce phénomène : on ouvre l’application un peu automatiquement et on se fait happer par le fil d’actualité, on scroll, c’est-à-dire qu’on descend, descend sans cesse dans l’infinité des publications. Si on ajoute à ça une situation un peu anxiogène, avec beaucoup d’actualité, il est encore plus difficile d’en sortir." Et de prévenir : "c’est pas très bon pour notre santé mentale" !

"Mascné" :

Mot porte-manteau liant "masque" et "acné", "mascné" désigne simplement les éruptions cutanées causés par le port prolongé d'un masque — accessoire indispensable de 2020 et un des gestes barrières contre le Covid-19.

Si quelques boutons valent mieux qu'être intubé lors d'un séjour en réanimation, le phénomène touche néanmoins de nombreuses personnes et a été couvert par des médias de par le monde. Interrogé par Radio Canada, Joseph Doumit, dermatologue dans une clinique de Montréal, explique que le masque ne provoque pas seulement des irritations acnéiques : "On peut voir de l'eczéma de la peau, de la rosacée, et [chez] quelqu’un qui fait déjà de l’acné, ça peut aggraver son acné".

Apéro-Zoom :

La fermeture des bars, restaurants et autres parcs puis les confinements ont re-dessiné la carte de nos vies sociales. Un nouveau rendez-vous amical ou familial a alors vu le jour : après le télétravail (pour ceux qui le peuvent), voici le télé-apéro, ou apéro Zoom, du nom de l'application de visioconférence devenue omniprésente avec la pandémie.

Et après neuf mois d'apéro-Zoom, qui se sont aussi déclinés en soirées jeux de société, blind tests, etc... pour pallier l'isolement des confinements successifs, on se dirige vers des fêtes de fin d'année également en visioconférence.

Populisme médical :

Avec la pandémie, l'incertitude et le besoin d'information sur le nouveau virus ont favorisé l'émergence de nouvelles figures, qu'elles soient du monde médical ou non, proposant des solutions simples à une situation complexe, fluide et qui continue d'être analysée par la communauté scientifique à ce jour. Parmi ces figures, le professeur Didier Raoult et sa proposition controversée de traiter les malades du Covid-19 à l'hydroxychloroquine ont acquis une renommée mondiale.

Le Dr. Damien Barraud, médecin réanimateur en unité Covid au CHR de Metz-Thionville, fait partie des professionnels de santé qui ont vivement critiqué leur confrère et son traitement dans les médias français. "Prendre tout le monde en otage et vouloir passer pour le sauveur avec le médicament miracle qui va sauver le monde, en s'asseyant sur toutes les règles méthodologiques et éthiques oui, c'est du populisme médical" a ainsi déclaré le Dr. Barraud en avril dernier sur RMC.

Aujourd'hui, Didier Raoult est au coeur d'une autre polémique, pour avoir étrillé la gestion de la crise par les autorités et les conflits d'intérêt dans la recherche internationale sur le traitement du Covid-19. Le Conseil national de l'Ordre des médecins en France a annoncé lundi 21 décembre qu'il avait porté plainte contre six médecins dont le professeur Raoult.

Au-delà des discours dissonants, voire "rassuristes" sur la dangerosité du virus ou l'existence (ou non) d'une deuxième vague de contamination, on a vu également l'explosion de théories du complots, notamment en ligne. Fausses informations, théories non-étayées, etc. ont fait florès dans certains médias et sur Internet, etc. Des documentaires complotistes tels que Plandemic aux Etats-Unis ou Hold-Up en France sont mêmes devenu eux-mêmes... viraux sur les réseaux.

ARNm :

Derrière cet acronyme un rien barbare se cache l'un des grands espoirs pour 2021 dans la lutte contre la pandémie de Covid-19 : les vaccins à Acide RiboNucléique messager (ARNm). Selon l'Institut national de la santé et de la recherche médicale en France, le principe des vaccins à acides nucléiques (vaccins à ARN ou à ADN) est légèrement différent de celui des vaccins traditionnels — une injection d'une forme atténuée ou inactivée d’un agent infectieux —, "même si l’idée de base est bien également de confronter le système immunitaire à un "leurre" pour le pousser à développer des anticorps contre le virus."

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Pour les vaccins ARN, dont ceux de Pfizer/BioNTech et de Moderna, il s'agit "de faire produire les fragments d’agents infectieux directement par les cellules de l’individu vacciné. Pour cela, ce n’est pas le virus dans sa forme atténuée qui est injecté mais seulement des molécules d’ADN ou d’ARN codant pour des protéines de l’agent pathogène." Dans le cas du coronavirus SARS-CoV-2, il s'agit de la protéine Spike présente à la surface du virus. L'Inserm explique que cette protéine est "la 'clé' permettant au virus de s’accrocher aux cellules puis d’y pénétrer et de les infecter. Ce choix d’un vaccin à ARN plutôt que d’un vaccin à ADN a été fait pour que la protéine Spike puisse être produite directement dans le cytoplasme des cellules de la personne vaccinée, sans passer par le noyau."

Une méthode selon l'Inserm qui est sans danger pour le patrimoine génétique des personnes vaccinées et est même mieux tolérée par l'organisme, car elle n'utilise ni adjuvants chimique, ni virus entier. Ce type de vaccin est le fruit de longues années de recherches, notamment par la biochimiste hongroise Katalin Kariko, qui travaille sur la question depuis près de trente ans et est désormais employée par BioNTech.

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