Après des mois d'hésitations, le gouvernement français va enfin présenter la mouture 2023 de sa réforme des retraites. Elle devrait prévoir de repousser l'âge de départ en retraite à 64 ans (contre 62 ans aujourd'hui). Une mesure très impopulaire.
Jour J pour une réforme emblématique: le gouvernement présente mardi ses choix pour l'avenir du système de retraites en France, le report de l'âge légal de départ annonçant une vive opposition dans la rue et au Parlement, malgré les mesures de "justice sociale" promises.
La Première ministre Elisabeth Borne dévoile à 17h30 cette réforme voulue par Emmanuel Macron pour "préserver" le système de retraites par répartition. Selon l'exécutif, il y a "urgence" à redresser un régime qui pourrait afficher une vingtaine de milliards d'euros de déficit en 2030. A cette fin, le gouvernement pourrait annoncer le relèvement de l'âge légal de départ à 64 ans, au lieu de 62 ans actuellement, progressivement à partir de l'automne 2023. Cette mesure serait couplée à une accélération de l'allongement de la durée de cotisation, qui passerait à 43 ans avant l'horizon 2035 fixé par la réforme Touraine de 2014.
Selon les derniers sondages, une majorité de Français sont opposés au relèvement de l'âge de départ en retraite. Néanmoins, ce report à 64 ans plutôt qu'à 65 ans pourrait valoir au gouvernement le soutien de la droite LR, qui défend cette option depuis des années au Sénat.
Les autres oppositions et les syndicats sont vent debout contre tout relèvement de l'âge légal, estimant qu'il affecterait surtout les plus modestes, qui ont commencé à travailler tôt et ont déjà leurs trimestres à 62 ans. La suite ne fait guère de doute : réunis dès la fin d'après-midi à la Bourse du travail à Paris, les numéros un des huit grands syndicats (CFDT, CGT, FO, CFE-CGC, CFTC, Unsa, Solidaires, FSU) devraient appeler les salariés à une première journée de manifestations et de grèves le 19 ou le 24 janvier."Si Emmanuel Macron veut en faire sa mère des réformes (...), pour nous ce sera la mère des batailles", prévient le patron de Force ouvrière, Frédéric Souillot.
Mesures de compensation
Pour percer le front des syndicats et infléchir le premier d'entre eux, la CFDT, le gouvernement a mis en avant des mesures de compensation.
Le minimum de pension sera relevé à 85% du Smic (bientôt 1200 euros net par mois) pour une carrière complète. Le gouvernement insiste également sur le maintien d'un dispositif "carrières longues": le départ sera toujours anticipé de deux ans pour les travailleurs qui ont validé cinq trimestres avant l'âge de 20 ans, et pourrait l'être de quatre ans pour ceux qui en ont accumulé dix.
Pour améliorer le maintien au travail des seniors, le gouvernement veut créer un "index seniors" que les entreprises de plus de 50 salariés devront publier, ce qui suscite l'hostilité du patronat.
Au chapitre pénibilité, les trois critères abandonnés en 2017 (port de charges lourdes, postures pénibles et vibrations mécaniques) devraient être réintégrés, sous réserve d'un examen médical que les syndicats refusent.
Mais "même avec des mesures positives sur les carrières longues ou la pénibilité", "il n'y aura pas de deal avec la CFDT", a prévenu son secrétaire général, Laurent Berger.
Rasséréné par un possible appui de la droite mais rafraîchi par l'opposition syndicale unanime, l'exécutif veut aller vite. Il devrait inscrire sa réforme dans un projet de budget rectificatif de la Sécurité sociale présenté en Conseil des ministres le 23 janvier, avant son arrivée la semaine suivante en commission à l'Assemblée. Là où la gauche Nupes lui promet un déluge d'amendements.